Revue Romane, Bind 33 (1998) 1Sur l'expression du genitif de tot roumain en langue ancienne et moderne *1par Coralia Ditvall 1. Introduction1.0 Préliminaires.Tout français, aile allemand et ail anglais sont traités, dans les travaux de linguistique moderne, sous la dénomination commune de quantificateurs (Kleiber & Martin 1977, Hawkins 1978, Vater 1986, Junker 1995, Flaux & Van de Velde, à paraître), à savoir quantifiants dans les termes de Wilmet (1986). Tot roumain se joint à ceux-ci du point de vue sémantique (cf. Ditvall, à paraître a.), notamment, d'une part, par sa fonction de quantifier sur le réfèrent du N (cf. Vater 1986), et, d'autre part, du fait qu'il indique Vextensité du N (cf. Wilmet 1986). Cependant, à en juger par sa morphosyntaxe, tot, peut-il appartenir à la classe des quantificateurs/quantifiants*. La présente étude essaiera de répondre à cette question. Les linguistes traitent les déterminants (Dét)2 du N comme un type d'articles (cf. Junker 1995) ou comme pronoms ou bien comme adjectifs. Nous suivons le modèle de classification de Wilmet (1986), que nous essayons d'adapter au système de détermination roumaine, afin de voir, de cette façon, dans quelle classe se range tot. Dans Ditvall (à paraître b.) nous essayons de trancher ce problème en examinant tot du point de vue de son comportement syntaxique, à savoir positionnel. Dans le présent travail, nous étudierons toi du point de vue de l'expression de son Génitif (tSN :G), c'est-à-dire la manière dans laquelle il réalise, à travers les siècles, un SN de type de tous les N. Cf.: (1) pàrerile
tuturor oamenilor3 Side 8
Sur la base des résultats que nous obtiendrons ici (joints à ceux obtenus dans nos autres études sur ce mot, voir Ditvall Études), nous essayerons de placer tot parmi les Dét roumains. En faisant cela, nous croyons pouvoir obtenir une réponse, au moins liminaire, à notre problème. Nos matériaux empiriques représentent la langue cultivée, dans le domaine de la prose. (Ils ne comprennent pas de combinaisons au caractère figé telles que l'expression toatd lumea 'tout le monde/le monde entier' ou le groupe prépositionnel de type (de) totfelul {de) '(de) toute(s) sorte(s)'.) Ils viennent, pour ce qui est de la langue ancienne, des textes en général à caractère religieux ou judiciaire et, pour ce qui est de la langue moderne, de romans, de pièces de théâtre et de journaux. Conformément au
procédé que nous avons déjà adopté (voir Ditvall
tot-I (tot
integral) au sens proche de celui de 'entier' tot-II (tot
generique) au sens proche de celui,
distributif/iteratif, de 'chaque' ou de tot-HI (tot
integral) au sens collectif de 'tousles' Avant d'aborder
notre étude sur le Génitif de tot, il convient de
présenter, 1.1 État de la question.1.1.1 Les déterminants français.Les critères d'après lesquels sont classifiés les Dét français sont divers. On distingue trois orientations principales, à savoir celle de la tradition scolaire, celle distributionnaliste (i.e. positionnelle, commutationnelle) et celle fonctionnaliste (Wilmet 1986, p.l3ss). D'autres linguistes s'appuient principalement sur le critère sémantique, souvent en combinaison avec le critère syntaxique (Vater 1986). Wilmet (1986) (cf. aussi id., 1983), qui constitue le point de départ de notre analyse, classine les Dét selon qu'ils indiquent Yextensité (à savoir «la quantité d'êtres ou d'objets auxquels le discours applique momentanément un substantif» (id., 1983, p. 18ss)) ou/et Yextension (à savoir «l'ensemble Side 9
potentiel des
êtres ou des objets» que le substantif dénote (id.,
ib.))- L'auteur - la classe des quantifiants, indicateurs d'extensité, obligatoirement antéposés au N-noyau, comprend les quantifiants stricts (i.e. tout, d'autres adjectifs indéfinis comme aucun, chaque, nul, plusieurs, quelque(s)), les quantifiants numériques (i.e. les adjectifs numéraux cardinaux) et les quantifiants bipolaires (i.e. les articles), - la classe des caractérisants, indicateurs d'extension, soit antéposés soit postposés au N, comprend les caractérisants stricts (i.e. les adjectifs qualificatifs, les adjectifs indéfinis autre, même), les caractérisants numériques (i.e. les adjectifs numéraux ordinaux) et les caractérisants possessifs (i.e. les adjectifs possessifs toniques), - la classe des quantifiants-caractérisants, indicateurs à la fois d'extensité et d'extension, obligatoirement antéposés au N, comprend les quantifiantscaractérisants stricts (i.e. les adjectifs indéfinis résiduels comme certain, différents, quel, n'importe quel, etc., les quantifiants-caractérisants démonstratifs (i.e. les adjectifs démonstratifs) et les quantifiants-caractérisants possessifs (i.e. les adjectifs possessifs atones mon, ton, etc.). Dans les
paragraphes suivants, i.e. (1.1.2) et (1.1.3), nous
allons considérer, 1.1.2 Les déterminants roumains.Les Dét roumains, comme les français, sont classifiés aussi d'après une grande diversité de critères. Gramática limbii romane I (GA) (1966), Lombard (1974), Dimitriu (1979), Avram (1986) adoptent la classification de la tradition scolaire. lordan et al (1967) et Coteanu (1982) regroupent les Dét d'après leurs propriétés sémantiques et distributionnelles. Niculescu (1978) les classine d'après le critère positionnel et le critère commutatoire. D'autres linguistes, comme Manoliu-Manea (1968) et Florea (1983), classifient les Dét d'après leur fonction d'adjoints du N-noyau ou celle de centre du SN. Cornilescu (1992) et Giusti (1991a, 1991b, 1994, 1995) expliquent, sur la base du GB, la distinction entre «determiners» et «quantifiers». Les opinions divergent fort, non seulement à propos de la classification des Dét, mais aussi à propos du placement de tot dans les différentes catégories. lordan et al. (1967), Lombard (1974) et Dimitriu (1979) le rangent parmi les adjectifs indéfinis. GA I (1966) et Avram (1986) le considèrent comme un adjectif qualificatif. Cependant ce dernier ouvrage admet que tot peut aussi se ranger parmi les adjectifs pronominaux ou numéraux. Nous proposerons, nous-même, une classification. Side 10
1.1.3 Classification proposée.Sur le modèle de Wilmet (1986) nous essayons, nous-même, de classifier ici les Dét roumains. Pourquoi choisir la classification de Wilmet, à savoir une classification par rapport au français, et non celle de Giusti (1991b, 1994, 1995), à savoir une classification par rapport à l'italien - ce dernier étant, en soi, plus proche du roumain? Il y a deux raisons à cela : d'une part, le fait que le français possède, comme le roumain, le même morphème pour exprimer les divers sens de tout, i.e. le singulier tout 'entier' ou 'chaque'/'n'importe quel' et le pluriel tous - en roumain respectivement le singulier tot et le pluriel topi; cf. l'italien, qui en possède des morphèmes différents : tutto, ogni, tutti (cf. anglais whoîe, every/each, ail), d'autre part, la classification faite par Wilmet comprend tous les Dét- cf. celle de Giusti 1991b, 1994, 1995, qui ne se rapporte qu'aux «quantifiers». En plus, la classification de Wilmet est «plus complète» du fait qu'elle vise les critères sémantiques et syntaxiques - cf. celle de Giusti (1991b, 1994, 1995), laquelle n'a en vue que les critères syntaxiques. Pour ces raisons, nous trouvons que le système adopté par Wilmet nous permettra d'entreprendre une classification des Dét roumains susceptible de mieux répondre au but de notre étude, à savoir d'essayer de placer tot parmi les Dét. Ainsi donc, de même que Wilmet, nous tiendrons compte des critères sémantico-syntaxiques - toutefois nous nous appuyerons en premier lieu sur les critères distributionnels. Ainsi, pour ce qui est des propriétés sémantiques des Dét, nous aurons également en vue l'indication de l'extensité et celle de l'extension du N. Pour ce qui est des propriétés distributionnelles des Dét, à part la place auprès du N - critère relevé chez Wilmet aussi - nous nous intéresserons en plus à la compatibilité et à l'incompatibilité avec N-L ou avec -L d'une part, et à l'expression du Génitif de l'autre. Vu les limites de la présente étude, notre classification sera simplifiée, à savoir non-détaillée, non-exhaustive. Nous n'examinerons les Dét que de façon très générale, notre concentration se dirigeant, ici, sur tot et non sur la multitude de problèmes liés à la détermination roumaine. Suivant Wilmet (1986), notre classification comprendra les articles,5 les adjectifs pronominaux (i.e. nous citons quelques exemples-types) et les adjectifs qualificatifs.6 (Ne seront donc pas compris des Dét tels que les propositions complétives ou relatives ni les adverbes, cf. par exemple Florea (1983) pour le roumain et Goyens (1994) pour le français.) Cependant, nous ne suivons pas Wilmet (1986, p. 74-111) en regroupant les Dét d'après l'indication d'extensivité, celle de la représentation ou celle du nombre. Dans notre essai
de classifier les Dét roumains nous passons par trois
Side 11
Wilmet par les Dét roumains. En cela, elle se base en premier lieu sur le critère sémantique. Le critère syntaxique est ici relevé, en deuxième lieu. Il est représenté, d'une part, par la position du Dét par rapport au N, d'autre part par la compatibilité ou l'incompatibilité avec N-L ou avec -L. Par compatibilité avec N-L ou avec -L nous entendons un groupe de type N-L Dét/Dét N-L ou Dét-L N (ex. orasuf tot/ tot orasul 'toute la ville', marele oras 'la grande ville'). Par incompatibilité avec N-L ou avec -L nous entendons un groupe de type N DID N (orafe multe/multe orase 'beaucoup de villes', * oracele multe/ *multe oracele, *multek orase). Au niveau de cette
étape les Dét roumains sont classifîés dans les classes
On remarque ici
que, comme en français, en roumain : - les «Wïlmet-quantifiants», qui sont indicateurs de l'extensité du N, sont représentés par les articles (i.e. l'article défini suffixal -L, l'article indéfini un), un grand nombre d'adjectifs indéfinis et les adjectifs numéraux cardinaux, exemples : - articles : omul
'l'homme', un om 'un homme'. • indefinis
incompatibles avec N-L ou -L, uniquement anteposes :
fiecare • indefinis
incompatibles avec N-L ou -L, soit anteposes soit
postposes : • indefinis
compatibles avec N-L, soit anteposes soit postposes, ou
avec • indefinis
compatibles avec N-L, soit anteposes soit postposes, et
- numéraux
cardinaux, incompatibles avec N-L ou -L, uniquement
antéposés On observe que tot, en traduisant grosso modo le français tout, ne se range que par sa sémantique parmi les «Wilmet-quantifiants». Quant à sa morphosyntaxe, elle est différente de celle de la plupart des Dét compris ici, surtout du fait que tot est compatible avec N-L (cf. tot omul, *tot om 'tout (r)homme', *fiecare omul, fiecare om 'chaque homme', *trei oamenii, trei oameni 'trois hommes'). - les
«Wilmet-caracterisants» , qui indiquent l'extension du
N, sont representedpar Side 12
l'adjectif de
renforcement însusi 'même', les adjectifs numéraux
ordinaux - adjectifs
qualificatifs compatibles avec N-L ou avec -L, soit
antéposés soit - l'adjectif
indéfini ait incompatible avec N-L ou avec -L,
uniquement — l'adjectif
indéfini celdlalt incompatible avec N-L ou avec -L si
antéposé; - l'adjectif de
renforcement compatible avec N-L et incompatible avec
-L, - les possessifs
«toniques» incompatibles avec N-L ou avec -L, uniquement
- les «Wilmet - quantifiants-caractérisants», qui indiquent à la fois l'extensité et l'extension du N, désignent les adjectifs indéfinis tels que orice/ oricare 'n'importe quel', les adjectifs démonstratifs acest/-a 'ce (-ci)', acel/-a 'ce (-là)' et les adjectifs possessifs «atones», exemples : - indéfinis
incompatibles avec N-L ou avec -L, uniquement antéposés
- les
démonstratifs acest, acel, i.e. incompatibles avec N-L
ou avec -L, - les
démonstratifs acesta, acela, i.e. compatibles avec N-L,
postposés : - les possessifs
«atones», compatibles avec N-L et incompatibles avec -L,
L'étape A nous fait observer que les Dét roumains, par leur sémantique, se rangent facilement dans les classes de Wilmet. Mais il n'en est pas de même pour ce qui est de leur syntaxe. Celle-ci est, en principe, différente de celle de leurs correspondants français (cf. Wilmet 1986, pp. 74-111, 138-152). Dans l'étape B nous avons en vue, en premier lieu, les propriétés distributionnelles des Dét selon le système roumain de détermination. Nous regroupons ici les Dét de l'étape A, en «soi-disant quantifiants», «soi-disant caractérisants» et «soi-disant quantifiants-caractérisants». l'étape B nous fait remarquer que les Dét roumains qui, à cause de leurs propriétés syntaxiques, se rangent respectivement chez les «soi-disant quantifiants,-caractérisants et -quantifiants-caractérisants» révèlent un comportementsémantique (et même syntaxique, pour ce qui est de ces derniers) très Side 13
hétérogène (cf. la classification de Wilmet, résumée ci-dessus, 1.1.1). En d'autres termes, les «soi-disant quantifiants» et les «soi-disant quantifiantscaractérisants»arrivent à renfermer à la fois des Dét qui indiquent uniquementl'extensité ou uniquement l'extension ou bien à la fois l'extensité et l'extension. Les «soi-disant caractérisants» rassemblent des Dét qui indiquent soit uniquement l'extension soit uniquement l'extensité. Les «soi-disant quantifiants» sont tous incompatibles avec N-L ou avec -L et sont uniquement antéposés au N. Les «soi-disant caractérisants» sont compatibles avec N-L ou avec -L et sont soit antéposés soit postposés au N. Quelques-uns des «soi-disant quantiftants-caractérisants» sont incompatibles avec N-L ou avec -L. D'autres sont soit incompatibles soit compatibles avec N-L ou avec -L. Les Dét appartenant à cette classe sont presqu'en totalité soit antéposés soit postposés au N. Pour ce qui est de
tot, ce mot semble se ranger, ici, chez les «soi-disant
Le caractère hétérogène des classes obtenues dans l'étape B, les résultats repérés dans nos études antérieures à propos de tot (voir Ditvall Études) ainsi que ceux qu'on enregistrera dans le présent travail, voilà quelques raisons qui invitent à tenter d'établir un nouveau regroupement des Dét roumains. Dans ce qui suit, nous allons d'abord examiner l'expression du génitif (chap. 2) de tot, et ensuite nous proposerons une classification des Dét, notamment dans Y étape C (tableau 2), (chap. 4). Dans cette classification, nous nous appuyerons, en premier lieu, sur le critère distributionnel. Ici, la distribution des Dét visera en outre à côté de l'(in)compatibilité avecAT-L ou avec -L et de la place auprès du N (critères compris dans les étapes A et B), l'expression du génitif des Dét. Ces trois critères morpho-syntaxiques nous aideront à mieux repérer les ressemblances et les différences entre les Dét et, par la suite, à pouvoir les placer dans nos classes, c'est-à-dire dans ce que nous appelons quantifiants, caractérisants et amalgames.10 1.1.4 Tout français.Dans la classification de Wilmet ( 1986), nous l'avons vu ( 1.1.1 ), tout français trouve sa place dans la classe des quantifiants à côté, entre autres, des quantifiants numériques, par exemple trois, quatre, etc. (à savoir les adjectifs numéraux cardinaux de la grammaire traditionnelle). De même que ces quantifiants, tout désigne l'extensité du N et il est obligatoirement antéposé au N, cf. tous les hommes/ *les hommes tous, trois hommes/ *hommes trois. Dans un SN avec fonction génitive/dative, tout révèle également une syntaxe proche de celle des «quantifiants numériques», cf. les opinions de tous les hommes, les opinions de trois hommes. Side 14
La question
suivante se pose : en est-il de même du tot roumain?
1.1.5 Tot roumain.Tot,
contrairement à son correspondant français tout (1.1.4),
possède une En roumain, tandis que les adjectifs cardinaux prennent uniquement l'antéposition par rapport au N-noyau, tot, c'est bien connu,11 peut soit précéder soit suivre N (Coteanu 1982, Avram 1986, entre autres) (voir tableau 2), cf. to\i oamenii /oamenii tofi 'tous les hommes', trei oameni I * oameni trei 'trois hommes'. Rappelons que l'adjectif qualificatif est soit antéposé soit postposé au N, marti oameni/oamenii mari 'les grands hommes' (voir tableau 2). Ceci signifierait-il que tot, contrairement à tout français, par son comportement positionnel, ne semble pas se ranger chez les «soi-disant quantifiants», à côté entre autres des adjectifs cardinaux, mais plutôt chez les «soi-disant caractérisants», à côté entre autres des adjectifs qualificatifs (voir 1.1.3)? Une solution à ce problème, sur la base de la position de iof par rapport au N-noyau, a été proposée dans Ditvall (1996 et à paraître b.). Dans ce qui suit, nous allons en proposer une autre, en examinant l'expression du Génitif du tSN. Considérons les
constructions suivantes : (2) a. pàrerile
tuturor oamenilor On remarque que toi possède un Génitif synthétique, c'est-à-dire construit par flexion (Lombard 1974, Coteanu 1982, Florea 1983) (ex. 2 a) proche de celui des adjectifs qualificatifs, notamment antéposés (ex. 2 b) et différent de celui des adjectifs numéraux cardinaux qui est analytique, c'est-à-dire formé à l'aide d'une préposition (ex. 2 c). Serait-ce une
autre épreuve, hors celle de la position de tot, que ce
mot se Nous avancerons l'hypothèse que tot semble se développer, à travers les siècles, d'un état proche de ce que nous appelons (dans le tableau 2, infra) un quantifiant, notamment avec une syntaxe proche de celle des adjectifs cardinaux,vers un état proche de celui d'un caractérisant, notamment à syntaxe proche de celle des adjectifs qualificatifs - en ce qu'il possède respectivement Side 15
un Génitif avec
prépondérance analytique (i.e. prépositionnel) en
roumain Bat-Zeev Shyldkrot
(1995) signale une évolution semblable pour tout
français, Giusti (1995) signale également la possibilité de relever chez le même Q, le statut d'un «Q-tête» et celui d'un «Q-modifieur». C'est le cas du «dual universal quantifient Cependant, à la différence de tot, ce Q manifeste ces deux statuts par deux entrées lexicales, i.e. amîndoi et ambii respectivement. Dans amîndoi N, 'les deux N\ il possède la syntaxe d'un Q-head of the nominal construction (id., p. 104), dans ambii N, 'les deux N', il possède la syntaxe d'un Q-modifier ofthe N, parallel to adjectives (id., ib.). Au chapitre
suivant, nous examinerons toi dans un SN avec fonction
genitive. 2. L'expression du Génitif et du Datif (G/D) en roumain2.0 Généralités.En roumain
moderne, c'est bien connu (cf., entre autres, Coteanu
1982, - soit synthétique
(à savoir par flexion) de type - soit analytique
(à savoir à l'aide d'une préposition, a/la) de type
Pour ce qui est du
Génitif synthétique, on distingue deux cas : (a) le Génitif
non-introduit par l'article ail al ail aie '" : Side 16
(b) le Génitif
introduit par l'article ail'alailaie : (voir par exemple
Lombard Dans ce qui suit nous examinons, tout brièvement, l'expression du Génitif/ Datif des adjectifs qualificatifs, des adjectifs numéraux cardinaux et celui des adjectifs comme mulfi 'beaucoup de', pufini 'peu de'. Ensuite, nous nous occuperons uniquement du Génitif (le Datif est traité dans un travail à part, voir Ditvall, Études). 2.1 Le G/D des adjectifs qualificatifs.Les adjectifs
qualificatifs, en tant qu'antéposés au N-noyau,
possèdent un ![]() (cf., par exemple,
GA1,1966, p. 114ss, Coteanu 1982, p. 94-97, Avram 1986,
Exemple de Génitif
non-introduit par l'article al (reprenons l'ex. 2 b ici
(3) pàrerile
marilor oameni Exemples de
Génitif introduit par l'article al (voir 2.0) : (4) a. pàrerile eronate aie mariîor oameni 'les opinions erronées des grands hommes' b. eronatele pâreri aie marilor oameni 'les opinions erronées des grands hommes' Cf. (5) *pârerile a
mari oameni Exemple du Datif :
(6) am dat marilor
oameni Side 17
Cf. (7) *am dat la
mari oameni On remarque que l'adjectif qualificatif (dans le style travaillé, étudié ici) ne possède pas un Génitif/Datif analytique, i.e à préposition. De même, dans le langage familier, dégagé ou moins cultivé, le Datif analytique (ex. 7) peut être employé (cf. Cornilescu 1995, p. 13-14) - ce qui vaut pour tous les Dét (id.). Voir aussi chap. (2.3), infra. Cf. dans un SN avec forme-base (à savoir au nominatif/accusatif, voir la note 12),15 comme déjà mentionné (1.1.2), l'adjectif qualificatif roumain, prend soit l'antéposition soit la postposition auprès du N-noyau (GAI, 1966, p. 121-125) (mareJe ora§/orasul mare 'la grande ville')- II en est de même de tot intégral, à savoir tot-I 'tout le N' et tot-111 'tous les N' (tot oraçul /oraçul tot 'toute la ville', toute oracele /oracele tóate 'toutes les villes'). Voir Ditvall (1996 et à paraître b.). 2.2 Le G/D des adjectifs numéraux cardinaux.Les adjectifs
numéraux cardinaux (à partir de «deux») possèdent un
Génitif/Datif ![]() Le Génitif est formé à
l'aide de la préposition a (l'ex. 8 est repris de l'ex.
2 c) : (8) pàrerile a
trei oameni (9) a. pàrerile eronate a trei oameni 'les opinions erronées de trois hommes' b. eronatele pâreri a trei oameni 'les opinions erronées de trois hommes' Cf. (10) * pârerile
treior oameni Le Datif est
exprimé à l'aide de la préposition la : (11) am dat la
trei oameni Cf. (12) * am dat
treior oameni Side 18
Comme on
l'observe, l'adjectif numéral cardinal ne possède pas de
Génitif/Datif Dans un SN en forme-base (i.e. au nominatif/accusatif) l'adjectif numéral cardinal n'est qu'antéposé au N-noyau (GA I, 1966, p. 186) (trei oameni / *oameni trei 'trois hommes') (voir tableau 2). Il en est de même de tot-II 'tout N\ en ancien emploi - toi dans ce sens n'existe plus en roumain moderne, voir tableau 3 (foi omul moare / *omul tot moaré 'tout homme meurt'). 2.3 Le G/D des adjectifs de type multi, putini, destui.D'autres adjectifs roumains, comme par exemple mulp 'beaucoup de' ou pupni 'peu de' peuvent exprimer leur Génitif/Datif soit par une construction synthétique, i.e. flexionnelle, soit par une construction analytique, i.e. à l'aide de la préposition {alla) (cf., entre autres, Lombard 1974, Avram 1986). Ainsi, le Génitif de ces mots est construit - - soit par une
formation synthétique de type «(article al ) Dét en
forme- - soit par une
combinaison analytique de type «prép. a+ Dét en
formebase (13) pârerile
(eronate aie) multor oameni ( 14) pàrerile a
mulfi oameni (15) pârerile
(eronate aie) pufinor oameni (16) pàrerile a
pu^ini oameni Leur Datif est
soit synthétique de type ![]() - soit analytique
de type : «pr6p. la + D6t en forme-base + N» (17) am dat
multor/la mulp oameni (18) am dat
pupnor/la pup'ni oameni II convient d'observer la remarque de Cornilescu (1995, p. 13-14) à propos du Datif prépositionnel, dans les cas où les deux types sont possibles : ce type de Datif «may be employed with virtually any Q/D though this use is generally frowned upon by prescriptive grammarians» - il est relevé «in relaxed, casual speech», «and also with less educated speakers» (id., ib.). Side 19
La place de ces adjectifs, dans un SN en forme-base (i.e. nominatif/accusatif) est soit avant soit après le N-noyau (cf. par exemple Avram 1986, p. 87-88) oameni/ oameni mulfi 'beaucoup d'hommes', pupni oameni/ oameni puf ini 'peu d'hommes') (voir tableau 2). D'autre part, un
adjectif comme destui 'assez de' ne possède qu'un
Génitif/ (19) parerile a
destui oameni (20) am dat la
destui oameni Et maintenant,
quelques brèves remarques sur le G/D en ancien roumain.
2.4 Le G/D ancien.En langue ancienne seuls les numéraux cardinaux possédaient un G/D prépositionnel (préposition de, a) (Dimitrescu et al. 1978, p. 244). Les adjectifs qualificatifs, les démonstratifs et les indéfinis exprimaient leur G/D, comme le substantif, en principe par une construction synthétique (i.e. flexionnelle) - parfois par des constructions analytiques (i.e. prépositionnelle) (Densusianu 196111, pp. 108,120ss). Les langues romanes occidentales, comme le latin lui-même, évoluent du système des cas synthétiques à celui des cas analytiques/prépositionnels (Dimitrescu et al. 1978). Le roumain manifeste aussi une telle tendance à toutes les époques de la langue) - mais cette évolution est lente, ce qui s'explique, entre autres, par une influence des langues slaves qui, étant synthétiques, poussent le roumain à conserver des formes casuelles synthétiques (Graur 1968, Dimitrescu et al. 1978). Que devient toi? Comment exprime-t-il son Génitif dès les plus anciens temps jusqu'à nos jours? Popescu-Marin (1986) signale qu'autrefois foi formait son Génitif soit à l'aide de la flexion soit à l'aide de la préposition. L'auteur ne précise pas si ceci est relevé dans tous les sens de tot. Examinons nos matériaux. 3. L'expression du Génitif de. tot3.0 Généralités.Il est généralement connu (cf., entre autres, Lombard 1974, Coteanu 1982, Florea 1983) que toi moderne dans un SN-Génitif n'est représenté que par sa forme plurielle : tuturorNÇde tous N'). Tot singulier existe aussi, il exprime son Génitif à l'aide de la préposition, mais l'emploi de ce toi est assez restreint - chez les grammairiens on le relève, en principe, dans des expressions figées telles que a totfelul de '(de) toute(s) sorte(s) (de)' ou a toatdlumea 'de Side 20
tout le monde/du
monde entier' (cf., entre autres, Lombard 1974, p. 223),
En d'autres
termes, le Génitif de toi moderne peut, en général, être
exprimé (i) analytique
![]() (ii) synthétique
![]() Examinons
maintenant tot ainsi qu'il est enregistré dans notre
corpus, dans Vu les limites imposées à notre exposé, nous n'aurons pas la possibilité d'examiner séparément les occurrences des trois types de tot (i.e. toi-/ 'tout le N', toi-// 'tout N', toi-/// 'tous les N', voir (1.0)), dans tous les types de formations enregistrées. Nous donnerons seulement quelques exemples, à titre d'illustration, et rassemblerons les différents types de structures repérées dans un tableau-résumé (le tableau 1, chap. 3.3). 3.1 Ancien emploi.Selon nos matériaux anciens, toi exprime son Génitif par des formations à morphologie fort variée, i.e. de type que nous appelons ici soit analytique (i), soit synthétique (ii) (dans différentes combinaisons), soit une combinaison de ces deux (i + ii) : - analytique (i),
a savoir une combinaison de type «prep. a + tot en
formebase -
analytique-synthétique, à savoir diverses combinaisons
de (i + ii) de type - quasi synthetique - (quasi ii), a savoir une formation sans preposition, mais non entierement de type (ii), comme dans «toten forme-base + N muni de -L en forme-GD» ou «article al + tot en forme-base + N muni de -L en forme-GD» - synthetique
(ii), a savoir une construction sans preposition de type
«tot en Voici quelques
exemples. Side 21
Tot-IExemples de
combinaisons - analytique de
type prép. a t-I N-L (21) to^i cine
vor s,ede spre fa^a a tot pdmdntul -
analytique-synthétique de type prép. a t-I :GDIB N-0 :GD
(22) sfera —, care
este a toatei lumi - quasi
synthétique de type t-I N-L :GD (23) incunjurarii
tot pdmintului - quasi
synthétique de type allai ail aie19 t-I N-L :GD (Dét)
(24) obs.tescu
folos al tot_ neamului romanesc Le N regissant
(fobs) precede immediatement, mais sans article.
Selon nos textes, les différentes combinaisons dont tot-I 'tout le N' ancien construit son Génitif sont, dans la presque totalité des cas, à la base de la préposition, à savoir soit de type analytique (i) soit de type analytique-synthétique(i + ii). Dès le XVIIe siècle on relève une tendance vers une combinaisonsans Side 22
sonsanspréposition, c'est-à-dire
une combinaison quasi synthétique (quasi Tot-IITot-II 'tout
N\ contrairement à tot-I (cf. supra) et tot-111 (cf.
infra), n'exprime - analytique de
type prép. a t-II N-L (25) sufletele a tot
omul - analytique de
type prép. a t-II N-0 où N apparaît sans l'article (-L)
(voir la (26) duhurile a
toatd jiganie —in doaa chipuri fac clatirea lor -
analytique-synthétique de type prép. a t-II N-L:GD
(27) s,i zise
Domnul lu Noe : sfirs,itul a tot trupului Nous n'avons
enregistré aucune occurrence de tot-II de type
synthétique (ii). Tot-IIILe Génitif de
toi dans le sens de 'tous les N' est, comme le Génitif
de tot-I Side 23
Ce toi offre, en
outre, une construction de type synthétique (ii),
flexionnelle, Exemples de
combinaisons: - analytique de
type prép. a t-111 N-L (28) dumineca a top
sfinfii -
analytique-synthétique de type prép. a t-111 N-LGD (Dét)
(29) cu voia a top
domnilor man —ai Ardealului - synthétique de
type tot-III:GD N-LGD (30) cu s,tirea
tuturor vecinilor - synthetique de
type article al/a/ai/ale tot-111 :GD N-L :GD (31) cu ruga
preacurateei sale maici §i a tuturor sfinplor
On peut constater, selon nos matériaux, que le Génitif de tot-I 'tout le N', tot-II 'tout N' et tot-111 'tous les N' est, dans la langue ancienne, très souvent prépositionnel, à savoir de type analytique (i) et analytique-synthétique (i + ii). Tot-I et tot-111 offrent aussi un Génitif sans préposition, à savoir formé à l'aide d'une combinaison de type quasi synthétique (quasi ii) chez tot-I (dès le Side 24
XVIIe s.) et de
type synthétique (ii) chez tot-Ili (dès le XVIe s.).
Tot-11, au contraire,ne 3.2 Emploi moderne.Comme on le sait
(voir par exemple Ditvall, Études) on retrouve seulement
Il convient de noter que nos exemples contenant tot-I, très peu nombreux, viennent de la première moitié du XIXe siècle, période de «transition» entre les deux époques de la langue, voir ci-dessous. (Dans les travaux de grammaire, on relève seulement la tournure contenant l'expression toatâ lumea 'tout le monde/le monde entier' qui n'est pas comprise dans notre travail (voir 1.0).) Nos textes n'offrent aucun exemple de tot-II 'tout N' dans l'emploi en discussion ici. La tournure signalée par les grammairiens est celle contenant le groupe figé a totfelul '(de) toute(s) sorte(s)' (cf. Lombard 1974, p. 223, entre autres) qui n'entre pas en ligne de compte ici (voir 1.0). Tot-111 'tous les N' est le seul qui a survécu jusqu'à nos jours. Voici quelques
exemples : Tot-ICombinaisons
- analytique de
type prép. a tot-I N-L (32) sa dea
raspuns — asupra — istoriii a toatd lumea -
analytique-synthétique de type prép. a tot-I N-L :GD
(33) pentru
savir§irea a tot lucrului sa-midea — Aucun exemple de
tot-I avec Génitif synthétique (ii). Side 25
Tot-IIIFormations de type
synthétique
(ii), introduit ou non par l'article al, ![]() (34) care se arata
la leaganul civiliza^iei tutulor popoarelor (35) reprezentanji
ai tutulor stdrilor sofietdfii -L:GD Pour ce qui est du Génitif moderne nous pouvons constater, à en juger d'après nos matériaux, que sauf quelques exemples de tot-/ 'tout le N' provenant de la première moitié du XIXe s. et représentant toujours le caractère archaïque de la langue, seul tot-lll'tous les N' est relevé dans un SN-Génitif. Ce toi offre uniquement un Génitif synthétique (ii). Il n'offre aucun exemple de type prépositionnel, c'est-à-dire ni de type analytique (i) ni de type analytique-synthétique (i + ii). Tot-II n'offre aucun exemple. Voici pour le SN
avec fonction de Génitif contenant tot dans les deux
3.3 Résumé.Dans ce qui précède, nous avons montré, exemples à l'appui, quelques-unes des diverses formations par lesquelles le SN contenant tot (tot-I, tot-11, tot- III) exprime son Génitif. Dans le tableau suivant, nous rassemblons les différents types de combinaisons enregistrées. Side 26
![]() Tableau 1. L'expression du Génitif du tSN, selon notre corpus2l Side 27
D'après nos matériaux, dans l'ancienne langue, le Génitif du SN contenant tot est nettement de type prépositionnel. Cela revient à dire que les diverses combinaisons dans lesquelles ce Génitif est construit sont surtout introduites par la préposition (i.e. elles sont de type analytique (i) et analytique-synthétique (i + ii)). Seul tot-111 possède en outre un Génitif de type synthétique (ii), c'est-à-dire sans préposition, flexionnel. Tot-I 'tout le N'
et tot-111 'tous les N' ont, en roumain ancien, un
Génitif : - en premier lieu
prépositionnel : analytique (i) et
analytique-synthétique (i + ii). Tot-II 'tout
N', par contre, possède un Génitif: Dans la langue moderne, tot (notamment tot-111 'tous les N' - qui est le seul survivant dans un SN:Génitif) au contraire, ne connaît qu'un Génitif de type synthétique (ii), c'est-à-dire sans préposition et exprimé à l'aide de la forme- GD tuturor introduit ou non par l'article al/a/ai/ale. (Les occurrences de tot-I 'tout le N' enregistrées représentent la période de «transition» de l'époque ancienne à l'époque moderne, d'où leur morphologie toujours archaïque — ce tot ne représente pas l'emploi général.) (Voir 3.2.) Nos investigations
nous ont permis de constater le même phénomène 4. DiscussionLa question qui a
guidé notre analyse dans le présent travail, a été celle
du Dans (1.1.3) nous
avons constaté qu'une classification sémantique, en
Sur la base de nos
résultats à propos de l'expression du Génitif du tSN
Ici, nous prenons en considération, en premier lieu, le comportement morpho-syntaxique des Dét et, en deuxième lieu, leur comportement sémantique. Nous regroupons les Dét en trois classes principales que nous appelons quantifiants proprement dits (Q), caractérisants proprement dits (C) et amalgames (Q-C et C-Q), à savoir combinaisons entre la classe (Q) et la classe (C). Il convient de
noter que nous ne prenons en considération, ici, que le
Side 28
![]() Tableau 2. Classification sémantique et distributive (étape C). Side 29
D'après ce
tableau, nous constatons qu'on a affaire à deux classes
(«pôles») Les quantifiants
proprement dits (Q), notamment (Ql), représentés par les
• indiquent
l'extensité du N (voir 1.1). • sont
incompatibles avec N-L ou avec -L (trei ora^e, *trei
orafele, *treile • sont uniquement
antéposés au N (trei orase, *orase trei). • et possèdent un
Génitif analytique (i.e. prépositionnel) (a trei orase,
Les caractérisants
proprement dits (C), représentés par les adjectifs
qualificatifs • indiquent
l'extension du N (voir 1.1). • sont compatibles
avec N-L ou avec -L (oraçele mari, marile ora§e 'les
• sont soit antéposés
soit postposés au N (voir les exemples précités).
• et possèdent un
Génitif synthétique (i.e. flexionnel) (marilor orase, *a
Entre ces deux «pôles», il y a un continuum des classes «intermédiaires», représentées par les quantifiants de type (Q2), les quantifiants-caractérisants (Q-C) et les caractérisants-quantifiants (C-Q) dont les propriétés sont en fait une combinaison des propriétés des (Q) et celles des (C). Les quantifiants de type (Q2) possèdent un comportement sémantique un peu différent de celui d'un (Q) proprement dit (i.e. Ql), en ce qu'ils indiquent à la fois l'extension et l'extensité, cf. orice 'n'importe quel'. Leur morpho-syntaxe est identique à celle des (Ql). Les (Q-C), dont
les propriétés se rapprochent plutôt de celles des
quantifiants - celle des (Q-C
1) qui comprend des Dét aux propriétés plus homogènes
• le groupe (c)
indique uniquement l'extensité, le groupe (e) indique
• ils sont tous,
i.e. les groupes (c), (d) et (e), incompatibles avec N-L
ou • ils sont tous
uniquement antéposés au N (fiecare oraç, *orasfiecare),
Side 30
- la sous-classe
des (Q-C 2) comprend des Dét aux propriétés très
hétérogènes • les Det du
groupe (f), incompatibles avec N-L ou avec -L, sont,
soit • les Det du groupe (g) sont compatibles seulement avec N-L (insu§i orasul orasul insusi, *insusile ora? 'la ville elle-meme'), d'autres, i.e. ceux du groupe (f), sont incompatibles avec N-L ou -I (multe ora?e, orase multe, * multe orasele, *multele ora§e 'beaucoup de villes'), etc. Les (C-Q), ont un
comportement plutôt proche de celui des caractérisants
- a part le fait
qu'ils indiquent l'extensite du N, contrairement a la
semantique • ils sont
compatibles avec N-L, groupe (k), (intreg ora?ul, orasul
intreg, • le Det dans le
groupe (1) est compatible avec -L (intregul ora? 'la
ville • les Det dans la
sous-classe (C-Q) sont, en principe, soit anteposes soit
• ils possedent un
Genitif uniquement synthetique (intregului oras, *a
Tot, notamment tot-I 'tout le N' et tot-111 'tous les N', se laisse ranger parmi les (C-Q). Cela revient à dire que par son comportement morpho-syntaxique tot semble se rapprocher des (C) tandis que par son comportement sémantique il est proche des (Q). En d'autres termes, de même que les (C), tot postposé est compatible avec N-L, et il est soit antéposé soit postposé au N. Tot-111 possède, comme les C, un G synthétique. D'autre part,
comme les (Q), tot indique l'extensité du N. Pour terminer, considérons le tableau (3) qui réunira les propriétés (P) morpho-syntaxiques et sémantiques de tot, ancien et moderne, et le comparera avec les quantifiants proprement dits d'une part et avec les caractérisants proprement dits de l'autre. Side 31
![]() Tableau 3. Tot ancien et tot moderne : un quantifiant vers un caract£risant? Ce tableau nous
invite à observer ceci, à propos de tot : - propriétés
sémantiques : • tot-I 'tout le N'/tot-111 'tousles N' (tot integral) ainsi que tot-II (tot generique) 'tout N' se rangent sous (PI), en ce qu'ils indiquent l'extensite du N, comme les quantifiants; cf. les caracterisants designant l'extension du N (P2). Side 32
- proprietes
morpho-syntaxiques: • la compatibility
avec N-L, semble rapprocher tot-I/tot-111 ainsi que
tot-II • quant a la place
de tot par rapport au N-noyau, nous observons que tot-I
• tot-11, par
contre, est uniquement antepose, comme les quantifiants
• le Genitif de
tot-I/tot-111 ancien est surtout de type analytique,
i.e. • le Genitif de
tot-II ancien est uniquement de type analytique (P7).
Tot-II qui,
par son comportement morpho-syntaxique, notamment (P5)
et Les survivants, tot-I et tot-111 possedent une syntaxe positionnelle d'un caractere qui semble proche de celui des caracterisants. Au Genitif, seul tot-111 survit - son comportement morphologique semble se rapprocher de celui des caracterisants, par la construction genitive de type synthetique. Tot-I au Genitif est remplace par intreg 'entier', qui, lui, possede un Genitif synthetique. 5. ConclusionOn disait precedemment (2.4) que dans la langue ancienne, seuls les numeraux cardinaux, a savoir nos quantifiants proprement dits (Q 1), revelaient uniquement un Genitif de type analytique, i.e. prepositionnel. (Rappelons a ce propos que les qualificatifs, les indefinis, etc. possedaient en principe un Genitif de type synthetique, i.e. flexionnel). Leur Genitif analytique existe encore de nos jours. Or, a en juger de nos resultats dans cette etude, le Genitif de tot £tait dans son ancien emploi exprime surtout par diverses formations de type analytique - tot-II 'tout N', «le vrai quantifiant», ne connaissait que ce type de Genitif. En roumain moderne, tot-II disparait totalement et tot-I 'tout le Nest,'est, au Genitif, remplace par le synonyme approximatif ?«freg 'entier' (dont le Genitif est synthetique). Ce qui a survecu de tot, a savoir tot-111 'tousles N', possede dans la langue travaillee, etudiee ici, un Genitif de type synthetique {flexionnel). Side 33
Nous pouvons constater que dans l'ancien emploi tot possédait dans ses trois acceptions (tot-I, tot-llet tot-III) un Génitif qui, en quelque sorte, était proche de celui d'un quantifiant tandis que de nos jours, tot-111 qui est le seul survivant au Génitif, a une morpho-syntaxe qui semblerait plutôt proche de celle d'un caractérisant. Bat-Zeev Shyldkrot (1995) signale une évolution pour tout français, à savoir du statut de «quantitatif» vers celui de «qualitatif», en ce qui concerne la sémantique de ce mot. Les choses sont, sans doute, fort différentes, entre tout français et tot roumain. Toutefois, pour ce qui est de tot, nos résultats parleraient en faveur d'une évolution non seulement du point de vue sémantique (par la disparition de tot-I au Génitif et de tot-IÎ) mais aussi du point de vue morpho-syntaxique (le survivant tot-111 ne possède, aujourd'hui, qu'un Génitif synthétique). - Et l'évolution continue... Coralia
Ditvall Université de
Lund Notes * Nous tenons à remercier sincèrement la rédaction de la Revue Romane, notamment Gunver Skytte, Université de Copenhague, et Povl Skârup, Université de Aarhus, pour plusieurs commentaires critiques importants. Nous remercions également les auditeurs de notre communication tenue, le 9 mai 1997, dans le cadre de la séance de la Société Roumaine de Linguistique Romane, Cluj-Napoca, Roumanie, pour leurs précieuses remarques à propos de certains aspects liés à l'essentiel de cet exposé. Il se peut que des lacunes subsistent encore - nous en sommes seule responsable. 1. Le présent travail constitue une version abrégée d'une étude plus large traitant de l'expression du génitif/datif de tot (comprise dans Ditvall, Études). 2. Nous employons le terme déterminant (Dét) dans son sens large, à savoir visant les éléments qui accompagnent le N-noyau d'un SN (cf. entre autres, Hawkins 1978, Wilmet 1986, Goyens 1994). 3. Pour expliquer des généralités, nous nous servons d'exemples construits (à savoir exemples sans renvoi bibliographique), fournis par nous-même en tant que locuteur natif du roumain. 4. Pour le choix du français comme base de comparaison, voir ( 1.1.3). 5. Al et cel n'entrent pas en ligne de compte, ici. C'est que, d'une part, ils sont «devoid of referential value or lexical meaning» (Cornilescu 1992, note 1), et que, d'autre part, ils ne peuvent pas entrer dans une «minimal structure» de type Dét +N (id., p. 202). (Pour ce qui est de al voir aussi la note 14, infra.) 6. Notre liste (tableau 2) rassemblera les mots qui sont, en général, rangés dans les tableaux de classification des Dét roumains (cf., par exemple, Manoliu-Manea 1968, Niculescu 1978). En plus, nous ajouterons mult 'beaucoup de', pupn 'peu de', însusi 'même', l'adjectif qualificatif (en suivant Wilmet 1986), amîndoi/ ambii 'les deux' (en suivant Giusti 1995) et întreg'entier'. Side 34
6. Notre liste (tableau 2) rassemblera les mots qui sont, en général, rangés dans les tableaux de classification des Dét roumains (cf., par exemple, Manoliu-Manea 1968, Niculescu 1978). En plus, nous ajouterons mult 'beaucoup de', pupn 'peu de', însusi 'même', l'adjectif qualificatif (en suivant Wilmet 1986), amîndoi/ ambii 'les deux' (en suivant Giusti 1995) et întreg'entier'. 7. L'article défini suffixal -L, on le sait, est obligatoire dans un SN contenant tot (Gramática limbii romane 1966, Lombard 1974, Avram 1986, entre autres). Dans la langue ancienne, ce -L peut parfois manquer (cf. par exemple Popescu- Marin 1986). 8. Remarquer que dans les deux dernières combinaisons -L est suffixe au premier élément du groupe. 9. -L est suffixe au premier élément du groupe. 10. Nous empruntons la terminologie à Wilmet (1986) et l'appliquons à nos critères de classification. 11. Mallinson (1986, p. 307) affirme, étrangement, que tot ne prend que l'antéposition. 12. Nous empruntons la terminologie à Lombard (1974, p. 24) et appelons forme- GD la morpho-syntaxe du génitif/datif (ex. omului 'de/à l'homme', tuturor 'de/à tous') et forme-base la syntaxe du nominatif/accusatif (ex. omul 'l'homme', top 'tous'). 13. Voir la note 12. 14. Il s'agit de «l'article possessif génitival» - qui reprend le genre et le nombre du N régissant (cf., par exemple Lombard 1974, Coteanu 1982, Avram 1986). On sait combien les opinions sont différentes à propos du statut de al : Grosu (1988) l'appelle dummy préposition, DraÇoveanu (1997) l'appelle pronom, etc. - pour une description détaillée du comportement de cette particule, voir ce dernier. Suivant les manuels, nous l'appelons, désormais, l'article al 15. Nous ne mentionnons ici qu'en passant, à titre de comparaison avec tot, la position auprès du N-noyau d'un caractérisant (i.e. adjectif qualificatif), d'un quantifiant numérique (i.e. l'adjectif numéral cardinal) et d'autres quantifiants (tels que par exemple mulfi 'beaucoup de', pupini 'peu de' ) relevée dans un SNnominatiflaccusatif. La place de ces mots dans le SN-Génitif, étudié ici, n'entre pas en discussion - seule l'antéposition nous intéresse. 16. Voir la note 12. 17. Voir la note 12. 18. Par GD, nous entendons ici la forme de GD (voir aussi la note 12). 19. Par la suite, dans des combinaisons de ce type sera donnée la description morphématique du N régissant. Voir la note 14. 20. Tot générique, à savoir tot-II ('tout N'), n'existe en roumain moderne que dans le langage populaire ou dans les quatre groupes figés tot omul 'tout homme', (de) totfelul (de) '(de) toute(s) sorte(s) (de)', in totcazul 'en tout cas' et la tot pasul 'à tout pas' (cf. Lombard 1974, Manoliu-Manea 1994). 21. Le type de structure mise entre crochets [ ] ne représente pas l'emploi général. 22. Les exemples qui sont àla base de ces structures viennent surtout de la première partie du XIXe s. période qui possède toujours le caractère archaïque de la langue (voir 3.2). Side 35
AbreviationsAmb. = ambigène
C =
Caractérisant(s) Cantemir = voir
Cantemir, Dimitrie CR = voir
Crestomape româneascd DI = voir
Documente s i însemndri romanes ti din sec. al XVJ-lea
GA = voir
Gramatica limbii romane -L = article
défini suffixal (orasw/ 'la ville') lg. anc. = langue
ancienne (XVIe-XVIIIe siècles) PO = voir
Palia de la Ords tie Q-C =
Quantifiant(s)-Caractérisant(s) TC =
Tetraevanghelul tipdrit de Coresi, Brasov 1560-61
(1963). Edifie TD = voir Tiktin,
H. tot-I = tôt
intégral ('tout le N') tSN :GD = tôt dans un
syntagme nominal avec fonction génitive-dative Side 38
RésuméLa présente étude se propose d'établir, à l'aide de l'expression du Génitif, le statut de toi'tout' roumain : est-il une sorte d'article, d'adjectif ou plutôt autre chose? Partant de la classification de Wilmet (1986), nous essayerons de classifier les déterminants roumains et de voir si tot se range parmi les quantifiants (ex. trei 'trois'), parmi les caractérisants (ex. mare 'grand') ou plutôt parmi les quantifiants-caractérisants/caractérisants-quantifiants (ex. flecare 'chaque'/ambii 'les deux'). Nos résultats montrent que, dans la langue ancienne, tot, qui existait dans ses trois acceptions (à savoir nos trois types tot-l 'tout le N\ tot-ll 'tout N' et tot-111 'tous les N') possédait un Génitif dont la morpho-syntaxe avait surtout un caractère analytique (prépositionnel), ex. a totomul 'de tout (l')homme', a tofi oamenii 'de tous les hommes'. Ce toi semble, de par cela, se rapprocher des quantifiants, cf. a trei oameni, *treior oameni 'des trois hommes'. Par contre, en roumain moderne, tot-111 'tous les N' (le seul survivant puisque tot-I 'tout le N' ne possède pas de forme de génitif/datif et que tot-II 'tout N' disparaît) révèle au Génitif une morpho-syntaxe synthétique (flexionnelle), ex. tuturor oamenilor, *a tofi oamenii 'de tous les hommes". On peut dire que, par cela, ce tot semble se rapprocher d'une certaine manière des caractérisants, cf. marilor oameni, *a mari oameni 'des grands hommes'. Ainsi donc, si l'on en juge d'après l'expression du Génitif, on pourrait dire que tot ancien semble plutôt se ranger parmi les quantifiants tandis que tot moderne trouverait plutôt sa place parmi les caractérisants-quantifiants. BibliographieAvram, Mioara (1986):
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