Revue Romane, Bind 18 (1983) 1

Literatur der Résistance und Kollaboration in Frankreich. Geschichte und Wirkung I (1930-1939) und II (1940-1950). Hrsg. Karl Kohut, Wiesbaden, Athenaion,l9B2.3B9p.

Jules Lund

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Ces deux recueils d'articles, que suivra un troisième volume qui paraîtra en mars 1983, sont l'œuvre d'une équipe d'historiens et d'hommes de lettres, qui ont conçu le projet passionnant d'étudier l'étroite interdépendance entre l'histoire et la politique d'un côté et la littérature de l'autre dans la France des années 1930 et 40. A priori, il me paraît évident que s'il existe une période du XXe siècle pour laquelle un tel projet de recherche promet d'être couronné de succès, ce sont bien ces années de crise et de guerre, où la littérature s'est vu conférer une tâche de transmetteur de valeurs idéologiques et de messages politiques.

Parmi les problèmes qui se sont posés à cette équipe de chercheurs il y a d'abord celui de définir l'objet de leurs investigations. Comme ils examinent la littérature qui exprime l'attitude politique de la résistance et de la collaboration, ils ont décidé d'y incorporer toute manifestation littéraire, y compris tracts et pamphlets, quel que soit l'accord de cette définition pragmatique avec la conception habituelle des historiens de la littérature.

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D'autres questions se posent aussi, comme p.ex. celle de savoir si la littérature de la résistance peut se distinguer de manière précise de celle de la collaboration, et si les œuvres politiquement engagées se distinguent clairement des œuvres apolitiques pour ce qui concerne les années de l'Occupation. A ces deux questions les auteurs répondent par non, ce qui les amène à analyser les phénomènes d'ambiguïtés et de compromis (tome I, pp. 16-17 et tome 11, pp. 55-61), fondamentaux pour la psychologie de toute époque, mais en particulier pour des périodes troubles et troublantes, où censure et autocensure, du moins pour la littérature parue légalement, déterminent l'expression des opinions politiques.

Puisqu'il ne s'agit pas d'écrire une histoire littéraire des années 1930 et 40, la question se pose de savoir selon quels critères on peut distinguer la littérature politiquement engagée de celle qui ne l'est pas? L'intention de l'auteur d'une œuvre littéraire politique est un critère d'appartenance que l'on peut retenir avec une certaine vraisemblance, parce qu'on peut se référer à l'action politique extra-littéraire de l'auteur. Tandis que le critère de l'effet de l'œuvre, de sa réception est plus aléatoire lorsqu'il s'agit d'une période comme celle de l'Occupation, où la liberté d'expression est fortement restreinte. Finalement, il faut bien retenir le critère du contenu idéologique de l'œuvre.

Un problème très délicat est de savoir si toute littérature collaborationniste était fasciste et si toute œuvre fasciste était nécessairement une œuvre de collaboration? Les chercheurs prouvent de façon convaincante qu'il n'y avait pas toujours recoupement. Maurras était fascisant, mais n'a pas trempé dans la collaboration, Montherlant avait des tendances fascistes, mais refusa, lui aussi, la collaboration, tandis que Jacques Chardonne donne l'exemple d'une collaboration intellectuelle qui n'a pas versé dans le fascisme (tome 11, pp. 166-178).

Nos chercheurs soutiennent que ces critères, si on les prend chacun séparément, sont problématiques, mais que leur combinaison permet avec une relative certitude de décider si un texte peut être rangé dans une des catégories qui font l'objet de l'analyse. Il peut paraître intellectuellement insatisfaisant que cette combinaison de critères change d'un cas à l'autre, mais les exemples relevés par Wolfgang Babilas (tome 11, pp. 61-63 et 70-72) nous montrent la complexité du problème:

Lorsque des œuvres publiées entre 1940 et 1944 manifestent la volonté de défendre la dignité et l'intégrité humaines, de donner un sens à la vie, de prévenir le danger de l'autodestruction ou d'exalter les vraies valeurs françaises et l'héritage éclairé du XVIIIe siècle, il est souvent difficile de savoir si on peut les classer parmi les œuvres littéraires de la résistance ou non. Selon W. Babilas, il faut prendre pour critère la situation de communication dans son ensemble, à savoir la vie et l'attitude générale de l'auteur, la politique ou la tendance de la maison d'édition ou de l'organe de presse qui a publié l'œuvre, le mode de distribution et la réception de l'œuvre et plus particulièrement ce que la presse de la résistance et celle de la collaboration en ont pensé.

Mais une réception qui range une œuvre parmi celles de la résistance ne suffit pas pour que le chercheur doive faire de même, comme en témoigne le cas de «La reine morte» de Montherlant. En revanche, une œuvre comme «Le silence de la mer» de Vercors a pu être considérée par certains milieux britanniques et soviétiques de l'époque comme l'expression d'une cinquième colonne au sein de la résistance, sans que cela autorise le chercheur à dénier à l'œuvre son appartenance à la littérature de la résistance.

Il ne suffit pas non plus qu'une œuvre ait été interdite par la censure allemande pour la
classer parmi les œuvres littéraires de la résistance, comme nous le montre le cas de «Solstice
de juin» de Montherlant qui célébrait la victoire de la croix gammée sur la croix du Christ.

Montherlant est d'ailleurs un bon exemple de l'ambiguïté complexe de l'époque, que j'ai
déjà mentionnée, car tout fascisant qu'il était, ü n'a pas manqué de venir en aide à des Juiis
persécutés.

L'observateur naïf pourrait être tenté de croire que tout écrivain et tout phénomène littéraire
avaient dû être jugés de manière manichéenne par les gens de l'époque: d'un côté les

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bons et de l'autre les mauvais, ce qui d'ailleurs a été le cas la plupart du temps. Mais cela n'empêche que les auteurs mentionnent beaucoup d'exemples de liens d'amitié entre résistants et collaborateurs littéraires, comme ceux qui unissaient Aragon et Eisa Triolet avec un des plus grands éditeurs collaborationnistes, Robert Denoël, ou l'amitié de Paulhan et de Drieu La Rochelle ou de celui-ci et de Malraux. L'exemple le plus frappant est le fait que la pièce de théâtre la plus ouvertement résistante de l'époque, «Jeanne avec nous» de Claude Vermorel, a été en partie publiée dans les colonnes de «La Gerbe», hebdomadaire collaborateur. Jean Giraudoux était revendiqué en même temps par les deux camps à cause de son attitude ambigue, tandis que Gide était rejeté par beaucoup de gens des deux côtés (tome 11, pp. 55-61).

Un autre problème important est celui de la périodisation. A priori, on peut s'étonner qu'un ouvrage sur la littérature de la résistance et de la collaboration ne se contente pas d'analyser la période de l'Occupation et de l'après-guerre. Pourquoi y englober les années trente? Les arguments qu'avance l'équipe de chercheurs me paraissent défendables. La plupart des grands écrivains qui se sont rangés d'un côté ou de l'autre pendant l'Occupation avaient déjà publié une grande partie de leurs œuvres avant la guerre, et avaient même dans beaucoup de cas pris parti pour ou contre le fascisme.

Mais alors pourquoi choisir 1930 comme point de départ? Parce que c'est vers cette date que commence l'offensive culturelle du communisme et qu'a lieu la conversion au communisme de quelques grands écrivains bourgeois comme Gide et Rolland, ce qui va profondément transformer la vie littéraire des années suivantes (tome I, p. 15).

Une des tâches auxquelles s'astreint Karl Kohut dans «Die antifaschistische Einheitsfront der Schriftsteller und Kiinstler» (tome I, pp. 40-69) est d'ailleurs de montrer l'importance des compagnons de route pour l'évolution vers le front d'unité antifasciste. A la fin de son article il avance l'hypothèse que les expériences politiques et littéraires que les écrivains avaient pu faire durant ces années n'allaient montrer leur vraie valeur que dans la situation limite de la résistance.

Dans son article du tome II «Der literarische Widerstand», Wolfgang Babilas confirme
l'hypothèse de Karl Kohut. On pourrait citer l'exemple de François Mauriac, qui montre
comment un écrivain catholique retourne à l'esprit d'alliance antifasciste de l'avant-guerre
après une période de velléité pro-pétainiste, retour qui marque une continuité entre les années
30 et 40 alors que les circonstances extérieures ont complètement changé.
Mais pourquoi arrêter l'analyse précisément en 1950?

Les arguments avancés sont apparemment éclectiques: D'un côté, il y a des raisons politiques: la fin de l'unité de la résistance et le début de la guerre froide. D'un autre côte, il y a des raisons propres au système littéraire: les gens étaient lassés des récits des exploits de la résistance, ils avaient envie de lire autre chose (tome I, p. 15). Mais à y regarder de plus près, il y a une cause commune qui explique pourquoi, vers 1950, les thèmes de la résistance et de la collaboration se sont épuisés pour ne réapparaître que vingt ans plus tard.

C'est la désillusion consécutive à la faillite des grands espoirs nourris au sein de la résistance, désillusion qui provoque le retrait des écrivains et de intellectuels de l'engagement social et politique, et dont témoignent des phénomènes tels que le structuralisme, le scepticisme, le nouveau roman et le théâtre de l'absurde (voir l'article de Henning Krauss, tome 11, pp. 221-226 et celui de Christel et de Henning Krauss, tome 11, pp. 240-241).

Parmi les innombrables problèmes traités dans ces recueils, je voudrais en relever deux qui me paraissent fondamentaux. Les auteurs cherchent à comprendre pourquoi les écrivains de la résistance ont manifesté une si frappante préférence pour la poésie? Est-ce que c'était à cause du rationnement du papier? Ou à cause de la clandestinité où les textes devaient être recopiés? Ou bien parce que les résistants étaient contraints de vivre dans une situation limite où il y allait de la vie et de la mort, de la fidélité ou de la trahison? Cette dernière explication aboutirait à poser la question de savoir si la poésie répond à la menace existentielle

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immédiate? A l'opposé, on se demande si les collaborateurs publiaient des pavés, parce qu'ils disposaient de tout le papier qu'ils voulaient et qu'ils pouvaient écrire à peu près ce qu'ils voulaient et qu'ils jouirent d'un grand confort matériel et intellectuel pratiquement jusqu'à la fin?

L'autre problème fondamental est celui qui est soulevé dans l'introduction du tome I concernant la qualité des œuvres littéraires de la résistance et de la collaboration proprement dites, qui, de l'avis de tout le monde, est assez décevante. Le rédacteur se demande par conséquent si cela vaut la peine de s'occuper d'une littérature qui a produit si peu de chefsd'œuvre. Il y répond lui-même que, bien que cette littérature ne dépasse pas son époque, elle témoigne quand même de la réaction des êtres humains à des situations extrêmes, et d'une manière plus fraîche et concret que le récit historique n'est capable de le faire.

Dans l'introduction s'exprime le vœu que le groupe de chercheurs réussisse à intégrer les
aperçus historiques dans les articles littéraires et vice versa, pour que ceux-là ne soient pas de
simples alibis, inclus dans les recueils par acquit de conscience.

Il me semble qu'il a réussi, et le fait que l'analyse de cette période s'y prête particulièrement
bien n'enlève rien à leur mérite.

Wolfgang Babilas s'appuie dans «Der literarische Widerstand» sur les aperçus historiques de Joseph Jurt, lorsque (tome 11, pp. 43-46) il cherche à caractériser la résistance en ayant recours aux notions de continuité/innovation et d'hétérogénéité/alliance. Le terme de continuité recouvre la permanence dans la résistance de la scission idéologique de la France, telle qu'elle avait existé avant la guerre. La résistance maintenait les valeurs traditionnelles de la France, l'humanisme, les grands efforts créateurs (ceux de l'entre-deux-guerres aussi) en refusant le nouvel esprit, le nouvel ordre et la révolution nationale, et par là elle était la continuation de l'esprit d'alliance antifasciste de l'avant-guerre, tandis que les collaborateurs étaient persuadés de la décadence de la France (notamment de celle de l'entre-deux-guerres) et qu'ils saluaient la défaite comme la chance d'une innovation révolutionnaire et d'une rupture avec le passé.

Mais W. Babilas montre aussi que, face à la continuité, il existait dans la résistance une innovation qui consistait à transcender les divergences traditionnelles, voir p.ex. le poème d'Aragon: «La rose et le réséda» du recueil «La Diane française» (Pierre Seghers, Paris, 1945).

Malgré la prédominance dans la résistance des deux voies non-confluantes de ceux qui combattaient l'éternelle Allemagne et de ceux qui luttaient contre la tête du fascisme international, il y avait un certain nombre de résistants littéraires et politiques qui découvraient ce qu'ils n'avaient jamais cru pouvoir trouver en eux-mêmes: Des internationalistes comme Edith Thomas se révélaient patriotes français, alors que des traditionnalistes tels que de Gaulle exprimaient des idées révolutionnaires. Lorsque l'historien de la littérature W. Babilas démontre l'hétérogénéité dans l'alliance, il s'appuie sur l'analyse de l'historien tout court (cp. Jurt, tome 11, pp. 17-22).

On pourrait relever un autre exemple de l'interdépendance des articles littéraires et historiques: en lisant l'analyse de Karl Kohut déjà citée, on constate qu'il y a bien des accords avec l'analyse de Joseph Jurt du même tome I. Il s'agit notamment de l'évolution pendant les années trente du P.C. par rapport aux autres partis de gauche en ce qui concerne les problèmes de la guerre et de la paix, du nationalisme et du rôle des écrivains.

Karl Kohut montre comment à la politique de la main tendue de Maurice Thorez correspond le manifeste de Vaillant-Couturier, approuvé par le comité central du P.C. en octobre 1936, et dans lequel les valeurs fondamentales ne sont plus le matérialisme dialectique, mais la liberté, l'humanisme, l'individualisme et le nationalisme.

Si on n'avait pas lu l'article de Joseph Jurt, on n'aurait pas pu comprendre l'importance
du rôle des compagnons de route pour l'évolution vers le front d'unité antifasciste dans

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l'exposé de Karl Kohut. Et celui-ci éclaire à son tour les passages de l'article de Joseph Jurt
où il est question de la préparation du Front populaire.

A la question que pose Karl Kohut de savoir si l'engagement politique des écrivains antifascistes des années trente a nui à la qualité littéraire de leurs œuvres, il répond par non, et pas seulement à cause de la valeur de bon nombre de leurs œuvres d'avant la guerre mais aussi pour ce que cela leur a permis de créer pendant l'Occupation.

Les analyses de l'antifascisme et de la résistance mettent en relief l'autre tendance de la vie politique et littéraire des années 30 et 40: celle du fascisme et de la collaboration, traitée dans deux articles de Hermann Hofer: «Die faschistoide Literatur» qu'on pourrait traduire par «la littérature fascisante» (tome I, pp. 113-145) et «Die Literatur der Kollaboration» (tome 11, pp. 151-192).

Dans le dernier article, il montre qu'il y a des raisons politiques et esthétiques au refoulement dont a été victime cette littérature de 1944 jusqu'aux années 1970. Il y a deux exceptions à la règle: les romans de Drieu La Rochelle d'avant 1940 et ceux de Céline d'avant 1940 et d'après 1944. Pour ce qui est des raisons politiques, elles sont faciles à comprendre: cette littérature et ses auteurs sont gênants pour l'esprit de reconstruction qui anime la France d'après-guerre, et qui est d'ailleurs incontestablement nécessaire pour en finir avec le laissez-aller de la vieille France et avec le sentiment défaitiste de culpabilité et de décadence. A ceci s'ajoute l'hypocrisie nationale et la version gaulliste de l'histoire de la résistance qui veulent faire croire que l'immense majorité des Français se sont conduits en patriotes en faisant front contre Vichy et l'occupant.

Tout cela met un tabou sur la littérature de la collaboration qui est seulement levé - au moins dans une certaine mesure - au cours des années 1970, où la science en accord avec des écrivains, des cinéastes et des journalistes s'efforce de déterrer ce chapitre oublié de l'histoire littéraire et politique de la France.

Mais il y a aussi des raisons esthétiques aux trente ans d'oubli de la littérature collaborationniste: C'est qu'il n'a été publié aucune œuvre de cette tendance vraiment valable entre 1940 et 1944. Ceci est d'autant plus étonnant qu'il y avait parmi les collaborateurs littéraires de très bons écrivains qui avaient, durant les années vingt et trente, fait paraître des livres de grande valeur, notamment Céline avec son «Voyage au bout de la nuit» et Drieu La Rochelle avec «Gilles».

Hermann Hofer explique ce phénomène paradoxal par le fait que les écrivains de la collaboration n'ont pas compris que l'histoire les a doublés pendant l'été 1940. Leurs œuvres des années de l'Occupation sont cruellement anachroniques, car les auteurs vivent dans un univers de rêve sans aucune prise sur la réalité.

Robert Brasillac présente l'exemple le plus frappant de ce manque de lien au réel avec son livre de mémoires «Notre avant-guerre», écrit pendant la drôle de guerre, mais publié dans le Paris occupé de 1941, sans qu'il y ait retouché quoi que ce soit. L'attaque allemande contre la Pologne, la défaite française et la barbarie nazie sous l'Occupation ne changent rien à l'émerveillement de l'écrivain, menacé par l'ennui sans perspectives de l'atmosphère française, devant le spectacle glorieux des fastes hitlériens.

Exactement comme l'engagement antifasciste des années trente prépare un grand nombre d'écrivains à rejoindre la résistance, l'engagement d'une série d'écrivains fascisants ou de droite dans la lutte surtout journalistique, mais aussi littéraire, des années trente contre le communisme, la démocratie et les Juifs, les prépare à collaborer avec Vichy ou avec les Allemands.

Il est vrai que la grande majorité des écrivains et tous les poètes ont rejoint la résistance, ce qui n'empêche que la France est le seul pays occupé qui ait connu un phénomène massif de collaboration littéraire. Cela s'explique par l'importance des tendances fascisantes dans la littérature française des années trente. Car curieusement, tandis que le fascisme en tant que

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phénomène politique a échoué en France grâce au mouvement de Front populaire, il a indéniablementporté des fruits littéraires et journalistiques. Beaucoup des jeunes intellectuels en révolte contre les injustices, les compromissions et la pourriture de la IIIe République étaient de droite, tandis que la gauche des années trente était la force tranquille qui s'efforçait de réformersans rupture le parlementarisme républicain.

Eu regard à l'importance de la droite littéraire de cette époque, il était temps que des chercheurs fassent la lumière sur ce chapitre de l'histoire littéraire de la France que le monde, des lettres en France, semble-t-il, aurait bien pu continuer à faire oublier. On ne peut qu'apprécier le courage des Allemands qui ont osé faire fi des tabous, bien que la tâche n'ait pas dû être moins pénible pour eux.

Je regrette que le tome 111 n'ait pas paru à temps pour queje puisse en faire le compterendu en même temps que celui des deux premiers tomes, car il comportera des interprétations de textes littéraires des deux camps et l'index et la bibliographie des trois tomes que j'aurais bien voulu consulter pour vérification.

Je regrette également de ne pas avoir pu traiter, comme ils le méritent, l'article de Rowitha Kramer sur l'engagement antifasciste des écrivains français dans la Guerre d'Espagne et celui de Margrit Zobel-Finger sur le rôle des immigrants allemands en France entre 1933 et 1939. En outre, je n'ai pu faire que très brièvement allusion à un passage de l'article de Christel et Henning Krauss sur les théories de l'engagement. Ces regrets sont d'autant plus sincères qu'il me semble que tous les membres de l'équipe ont contribué à faire de l'entreprise le contraire d'une juxtaposition de travaux individuels. En effet, nous disposons enfin d'un ouvrage solidement ancré dans l'analyse des sources, traitant des aspects les plus importants de la problématique, et écrit par huit chercheurs qui semblent tous animés par la même volonté de créer un ensemble où les différents éléments se tiennent et communiquent entre eux, quelle que soit l'approche choisie par chaque chercheur individuellement.

Le contenu des articles montre que cette équipe de chercheurs a eu raison de traiter l'ensemble des années trente et quarante au lieu de se limiter aux seules années de l'Occupation. La démonstration que livrent les historiens de la littérature soutient la thèse d'historiens comme Robert O. Paxton et Stanley Hoffmann, selon laquelle la France a connu entre 1933 et 1945 une guerre civile larvée.

Je pense qu'on peut se réjouir de cette démonstration de la fécondité d'une coopération
véritablement pluridisciplinaire, qui a mis à profit, dans le domaine littéraire, une hypothèse
émise dans le domaine de la recherche historique.

Copenhague