Revue Romane, Bind 17 (1982) 2Edeltraud Werner: Die Verbalperiphrase im Mittelfranzôsischen. Eine semantischsyntaktische Analyse. Studia Romanica et linguistica 11, Frankfurt a.M., Verlag Lang, 1980.570 p.Lene Schøsler Side 145
Le domaine des périphrases verbales (=PV) est relativement bien étudié, d'abord par Georges Gougenheim (1929), puis, à partir des années 1960, dans bon nombre de travaux (K.-R. Bausch, E. Coseriu, Brigitte Schlieben-Lange, W. Dietrich, G. Roja), mais Gougenheim est à peu près le seul à avoir examiné en détail la période en question (1350-1500). Les études récentes consacrées au système verbal du moyen français - période particulièrement riche en PV - n'ont guère fait qu'effleurer le problème (R. Martin, M. Wilmet). Le mérite de ce nouvel ouvrage est de tenter de présenter une vue cohérente et systématique, basée sur une analyse sémantico-syntaxique, des PV en question, mais aussi de les considérer dans leur rapport avec le système verbal des formes non-périphrastiques, nommées "formes simples" (= FS). A cette fin, l'auteur établit, dans la partie théorique (p. 8-119), un ensemble de distinctions fort complexes, parfois assez éclectiques, d'un abord assez difficile, mais qui se révèlent par la suite capables de caractériser chacune des PV (p. 127-441). E.W. adopte - en l'élargissant — l'analyse de Coseriu, suivant laquelle il faut distinguer trois niveaux du langage: le Système, la Norme et la Parole, auxquels correspondent trois "valeurs": celle du Système, celle de la Norme et celle de la Parole. Pour les PV, phénomène appartenant au niveau de la Norme, ce sont les deux derniers types de valeurs qui seront étudiés. A cette hiérarchie, l'auteur ajoute l'analyse actantielle de la phrase proposée par L. Tesnière; c'est avant tout la distinction actant / circonstant et l'établissement des hiérarchies fonctionnelles (I / O,Z / A / E) qui seront utiles pour E.W. La définition de la périphrase en général est basée sur quatre critères: 1° syntaxique, 2° sémantique, 3° structural et 4° fonctionnel. Les deux premiers se résument en la formule suivante: l'unité (x) plus l'unité (y) donne (z), entité complexe (= critère 1°), mais dont le sens n'est pas la somme de (x) et de (y) (= critère 2°). La périphrase - (x) + (y) = (z) - se distingue ainsi d'un syntagme libre, qui pourrait être son homonyme, mais dont la formule est (x) + (y) = (xy). L'auteur cite comme exemple de périphrase: belle-soeur, qui s'oppose à belle soeur, syntagme libre. Side 146
Le troisième
critère concerne la "productivité" de la périphrase:
elle doit appartenir à un Le quatrième critère concerne la relation - en termes hjelmsleviens - entre les constituants. Dans une périphrase, il s'agit d'une interdépendance, soit belle •* soeur, alors que dans un syntagme libre tel que belle soeur, il s'agit d'une détermination, soit belle ->• soeur. Suivant les quatre critères, belle-soeur - contrairement à belle soeur -- serait une périphrase. Appliqués aux PV,
les critères 2° et 4° se révèlent efficaces: 1° est
banal, et 3° pas assez Ayant déterminé
les critères, E.W. analyse à tour de rôle les diverses
constructions formées 1) "essentielle
Auxiliarkonstruktion" (formes composées, surcomposées,
actives, passives, 2) "akzidentelle
Auxiliarkonstruktion" = PV Elle parvient à
dresser l'inventaire suivant de PV: aller, s'en aller,
venir, s'en venir, venir à, Le système verbal
des FS par rapport auquel sont analysées les PV est
celui qui a été proposé La valeur de base de chaque PV est analysée en deux temps, en fonction de la nature du V2 et en fonction de celle du VI. V2 est défini selon "die Betrachtung des Verbalgeschehens" (p. 101) qui, pour l'infinitif, est limitative, pour le participe présent "transgredient ', ce qui, dans le système des FS, correspond à l'aspect ponctuel ou "complexif" (Wunderli) face à l'aspect cursif ("non-complexif"). Le sens de VI est considéré dans les oppositions binaires suivantes: férent - non-férent, efférent - non-efférent, réflexif - non-réflexif. Ces termes, plus ou moins empruntés à Damourette-Pichon, signalent la relation entre le point d'observation du verbe et l'action en question. Suivant ces distinctions, chaque PV se laisse caractériser de façon cumulative par son aspect - limitatif ou "transgredient" selon la forme du V2 et par sa valeur relationnelle (férent, efférent etc.) selon le choix de VI, soit la PV aller + infinitif, dont la valeur de base ("Normwert") est indiquée par cette formule: (p. 128).
A propos de chacune des seize PV, l'auteur distingue à l'aide des critères signalés les PV des syntagmes libres. Elle considère également le fonctionnement du PV suivant le temps, le mode etc. de VI et du contexte, ainsi que l'importance éventuelle du type de phrase, de la négation etc. Toutes les formes qui entrent ou pourraient entrer en concurrence sont comparées les unes aux autres, p.ex. aller opposé à s'en aller, vouloir et devoir + infinitif. Des changements diachroniques sont notés, p.ex. l'apparition tardive de certaines PV (venir à/de, être pour etc.), bref, tous les problèmes soulevés par l'existence des PV sont discutés au cours de l'étude. Des particularités stylistiques propres à un auteur ou à un genre sont également dégagées, telle la fréquence des PV aller/être + participe présent dans Hugues Capet. Toutes les PV sont examinées avec la même minutie, ce qui semble parfois un peu exagéré. C'est ainsi que E.W. dresse des statistiques et discute longuement des PV dont le nombre d'exemples va de dix à quinze! De même, le critère 3° sur la "productivité" ne paraît guère respecté dans les cas de s'en venir, venir à. être à, être pour + infinitif, et venir, s'en venir + participe présent, représentés par quatre à quinze exemples chacun. Side 147
Si l'auteur a tendance à négliger l'aspect de la fréquence au cours de son étude, elle y remédie vers la fin, où elle parvient p.ex. à démontrer que la fréquence des PV formées à l'aide d'un infinitif augmente au cours de la période étudiée alors que celle des PV formées à l'aide d'un participe présente baissent. Au XIVe siècle ce sont ainsi les dernières qui dominent, mais au XVe siècle ce sont les premières. L'auteur prouve en outre que le choix entre les deux types de PV dépend en grande partie du choix du genre: les dernières sont fréquentes dans la poésie, alors que les premières se trouvent surtout dans les romans en vers, les nouvelles et les pièces de théâtre (NB: le corpus est limité à des textes littéraires). L'analyse
sémantique, basée sur les oppositions binaires, a permis
l'établissement d'un Odense
|