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Revue Romane, Bind 17 (1982) 1La Correspondance littéraire de Grimm et Meister à la lumière des manuscrits — une première approchepar Ulla Kölving Les correspondances littéraires abondent au XVIIIe siècle. Nombreux sont ceux, princes souverains ou hommes de lettres de la province et de l'étranger, qui regardent vers Paris, capitale incontestée de la vie littéraire et artistique de l'Europe de l'époque. Si les journaux français auxquels ils s'abonnent - le Mercure de France, VAnnée littéraire, le Journal encyclopédique et d'autres - les renseignent sur bon nombre des événements du monde des lettres parisien, ils se taisent sur d'autres, et souvent les plus intéressants, tenus en bride par une censure fort sévère. Ces hommes de la province et de l'étranger, avides de nouvelles parisiennes, sont donc obligés de recourir à des correspondants particuliers, dont une des tâches sera précisément de rendre compte de tout ce dont on ne parle pas dans les journaux: les querelles littéraires voire politiques, les livres condamnés, l'opinion du public sur un ouvrage contesté, les manuscrits clandestins qui circulent sous le manteau, etc. Au début, ces correspondances gardent encore le caractère d'une correspondance privée. Certains lettrés de province ont leur correspondant particulier à Paris avec lequel ils échangent, plus ou moins régulièrement, des informations d'ordre littéraire. En général, l'auteur et le destinataire se connaissent, se traitent d'égal à égal, parlent de leurs relations communes et échangent les nouveautés littéraires. Ainsi les lettres du commissaire Dubuisson au marquis de Caumontl. A ce premier stade, les correspondants rétribués semblent être une exception: il est encore question d'échange, de réciprocité et les lettres gardent certains traits caractéristiques de la lettre privée: dialogue, exhortations, etc. Mais quand les princes étrangers, le futur Frédéric II par exemple, éprouvent le besoin d'avoir un correspondant littéraire à Paris, le phénomène du correspondantlittéraire appointé apparaît. Il n'est plus question d'un échange d'informationsentre égaux: le correspondant littéraire devient de plus en plus souvent un subordonné dont la fonction est de fournir à son ou à ses abonnés - rois ou princes, ses supérieurs — des informations sur la vie littéraire et culturelle de la 1: Lettres du commissaire Dubuisson au marquis de Caumont 1735-1741, avec Introduction, notes et tables par A. Rouxel, Paris, 1882. Sur le président Bouhier et ses "correspondants littéraires", voir Françoise Weil, Jean Bouhier et sa correspondance, I, Inventaire (1693-1746), travaux du Centre d'étude des XVIF et XVIIIe siècles, 1975, p. IXLII. Side 23
capitale
française, tout en étant chargé de commissions diverses.
Thiériot compte Plus on avance dans le siècle, plus ces correspondances dites "littéraires" sont nombreuses. Tout souverain étranger, même de la plus petite cour d'Allemagne, a la sienne. Quelques-unes de ces correspondances ont été publiées2, mais la plus grande partie en reste oubliée dans quelque fonds de bibliothèque. Parfois leur existance nous est connue. Tel est le cas par exemple de la correspondance adressée à la margrave de Bade-Dourlac, qui embrasse une période de plus de 25 ans et dont les auteurs furent successivement de Morand (1757), Maillet-Duclairon (août 1757-1766), Saint-Aubin (1766-1771) et l'abbé Aubert (1771-1783)3. Si, en règle générale, la plupart de ces correspondances littéraires ne méritent guère les honneurs de la publication, il en est une qui a beaucoup occupé le public. Qualifiée par Lanson de "chef-d'œuvre du genre"4, la Correspondance littéraire de Grimm et de Meister fut publiée dès 1812. Elle connut une nouvelle édition en 1829 et de 1877 à 1882 Maurice Tourneux donna l'édition dont nous nous servons encore aujourd'huis. Depuis 1812, elle sert de source et d'ouvrage de référence, et les dix-huitiémistes y puisent des renseignements précieux. S'il existe un certain nombre d'études sur Grimm critique, on s'est peu intéressé, jusqu'ici, à i'histoire interne de la Correspondance littéraire, et cela pour une raison fort simple: on ne la connaissait pas sous sa forme manuscrite. On savait déjà depuis quelques années combien l'édition de Tourneux est incomplèteet peu scientifique selon nos critères actuels. C'est pourquoi l'initiative d'une nouvelle édition a été prise lors d'un colloque qui réunissait en 1974 à Sarrebruckun certain nombre de spécialistes de la Correspondance littéraire^. Cette édition, qui se fera par une équipe internationale, comprendra les années 1753 à 1773, laissant de côté, dans un premier temps, les années 1774 à 1813, c'est-àdirela période de Meister, qui pose des problèmes particuliers. Les travaux de 2: Citons à titre d'exemple celle de l'abbé Raynal adressée à la duchesse de Saxe-Gotha (Grimm, Correspondance littéraire..., éd. Tourneux, t. I et II) et celle de La Harpe envoyée au grand duc de Russie et au comte de Schowalow {Correspondance littéraire, Paris, 1801, 4 vol. et 1807, 2 vol.). 3: Ces renseignements nous ont été fournis par J. Schlobach, qui a consacré, en 1975/76 à l'Université de Paris 111, un séminaire à l'étude de la Correspondance littéraire et de ses origines. 4: Histoire de la littérature française, 12e éd., Paris, 1912, p. 822. 5: Correspondance littéraire, philosophique et critique par Grimm, Diderot, Raynal, Meister, etc., éd. Tourneux, Paris, 1877-1882, 16 vol. Pour l'histoire des éditions, voir J. Th. de Booy, "Henri Meister et la première édition de la Correspondance littéraire (1812-1813)", t. XXII, 1963, p. 215-269, et J. Schlobach, "Die Friihen Abonnenten und die ei^te Dru^kfdbSung der Correspondance littéraire", Romanische Forschungen, t. LXXXII,I97O,p. 1-36. 6: Les actes du colloque de Sarrebruck, tenu du 22 au 24 février 1974, ont été publiés: La Correspondance littéraire de Grimm et de Meister (1754-1813), Paris, Klincksieck, 1976. Side 24
préparation ont commencé dès 1975, et c'est dans le cadre de ces travaux que nous avons dressé un inventaire chronologique et critique de toutes les copies manuscritesde la Correspondance littéraire découvertes jusqu'ici, travail indispensableà la préparation d'une édition critique7. Notre inventaire, qui couvre la période 1753-1793, répertorie 15 copies manuscrites, de longueur et d'importance très inégalesB, la plus importante étant celle dite de Gotha I, qui servit de base à Tourneux. Il donne en outre les références exactes aux éditions antérieures. L'inventaire, qui suit l'ordre chronologique des livraisons, relève et numérote chaque article de Grimm, de Meister et de leurs collaborateurs. Il fournit sur chaque article les renseignements suivants: Io l'incipit, 2° le nom de l'auteur d'un ouvrage critiqué ainsi que son titre, 3° le nom de l'auteur d'une pièce originale insérée ainsi que son titre, 4° le volume et l'emplacement exact dans les manuscrits et les différentes éditions. Les lacunes de certains manuscrits ressortent clairement, tout comme les modifications apportées par les premiers éditeurs. L'inventaire a ensuite été traité par informatique, ce qui nous a fourni des "listings" par noms d'auteurs et par titres d'ouvrages. Ces listings ou tables, établis par ordre alphabétique, permettront une consultation plus facile des manuscrits en attendant la nouvelle édition. Dans son état actuel, cet inventaire ne permet donc pas une analyse thématique de la Correspondance littéraire semblable à celle faite par l'équipe du dépouillement des périodiques du LA 969. \\ permet cependant de démêler les rapports entre certaines copies et fournit des renseignements précieux sur l'histoire interne du texte. Nous nous proposons maintenant de retracer, à partir des données fournies par notre inventaire, certains aspects de la Correspondance littéraire dont Grimm fut le rédacteur de mai 1753 jusqu'au mois d'avril 1773, quand Meister lui succéda. Nous signalons tout de suite que nous nous occuperons beaucoup plus de la période de Grimm, qui de notre point de vue actuel est plus intéressante, que de celle de Meister. Grimm a-t-il donné dès 1753 à sa correspondance littéraire une forme bien définie,qu'elle gardera pendant les quarante années qui nous intéressent? ou est-il possible d'y distinguer une évolution, un changement? A ne considérer que l'éditiondonnée par Tourneux, on serait enclin à dire qu'elle a peu changé au cours 7: Cet inventaire, qui sera publié sous peu, a été établi sous la direction de J. Varloot au Centre d'étude des XVIIe et XVIIIe siècles - Laboratoire associé 96 du C.N.R.S. - dans le cadre d'une Action thématique programmée internationale financée par le C.N.R.S. et consacrée à l'étude des correspondances littéraires manuscrites. 8: La liste des copies manuscrites publiée dans les Actes du Colloque de Sarrebruck, p. 14, est à compléter par la copie retrouvée par Christiane Mervaud à Merseburg, voir "Les débuts de la Correspondance littéraire en Prusse: une copie inconnue: ler juin 1753-ler mai 1754", RHLF, 1979, p. 14-25. 9: Cf. l'article de Paule Jansen dans les Actes du Colloque de Sarrebruck, p. 143-151. Side 25
des années, exception faite de la longueur des articles. Un examen approfondi des copies manuscrites nous permettra d'arriver à une description plus exacte du texte du périodique et de son histoire. A cette fin, nous avons choisi d'appliquerles critères suivants, qui nous semblent pertinents en l'occurrence: — régularité des
envois — volume et
présentation matérielle des livraisons — contenu des
livraisons — individualité
des copies manuscrites - interventions de
Grimm dans le texte Nous ignorons quel fut en 1753 le premier abonné de Grimm, mais la récente découverte de la copie du prince Ferdinand de Prusse nous permet de situer le début de cet abonnement au ler juin, ou peut-être même au ler mai de cette annéelo. De 1754 à 1759, les abonnés étaient au nombre de 3, ou éventuellement 4, pas toujours les mêmes, parmi lesquels la duchesse de Saxe-Gotha, dont la collection a été conservéel!. En 1760 commence l'abonnement de Louise-Ulrique de Suède, qui constitue aujourd'hui le manuscrit de Stockholml2. En 1763 s'ajoute celui de Frédéric II — de brève durée, il est vrai — et à partir de 1764 la clientèle augmentera régulièrement, de sorte que Meister a pu écrire "qu'il existoit dans les différentes cours de l'Europe, depuis les bords de l'Arno jusqu'à ceux de la Neva quinze à seize copies"l3. Régularité des envoisA partir du ler juin 1753, date initiale de la copie du prince Ferdinand de Prusse, les feuilles de Grimm sont envoyées régulièrement deux fois par mois, le ler et le 15. Il y eut donc vingt-quatre livraisons par an, numérotées de 1 à 24. J'ai dit "régulièrement", mais en fait ce n'est qu'une hypothèse: tout ce que nous savons avec certitude, c'est qu'il y eut deux livraisons par mois; mais comme les enveloppesoù elles furent enfermées sont perdues, la date exacte de leur envoi ainsi que la façon dont elles furent acheminées nous restent inconnuesl4. Tout porte à croire, cependant, que pendant une première période, Grimm fut assez exact dans l'envoi de ses feuilles. A partir de 1768 en revanche, il est souvent en retard, 10: La livraison du ler juin 1753 porte le numéro 3, ce qui donnerait à penser qu'il yaeu deux livraisons antérieures (Archives de Merseburg, Rep 57 I F 10, fol. 41ro). 11: Voir J. Schlobach, "Die frù'hen Abonnenten...", p. 1-36. 12: Voir l'lntroduction à notre thèse, Frédéric-Melchior Grimm, La Correspondance littéraire, ler janvier-15 juin 1761, texte établi et annoté par U. Kôlving, Uppsala, 1978, Studia Romanica Upsaliensia 22, t. 11, p. 26-29. Cette thèse est la première d'une série de quatre consacrée à l'édition du manuscrit de Stockholm de la Correspondance littéraire. 13: J.Th.de Booy, op. cit., p. 227. 14: Les seules indications que nous ayons àce sujet sont bien postérieures. Le manuscrit coté B 1281 à Gotha contient quatre enveloppes de 117x98 mm qui sont de 1795, 1800 et 1803, c'est-à-dire de la dernière période de Meister, quand il habitait Zurich. Side 26
parfois de plusieurs livraisons. Il s'en plaint lui-même en 1771 : "Le seul déplaisir que j'aie, c'est d'avoir eu tant d'affaires de toute espèce depuis quelques années que je n'ai pu compléter ma correspondance comme j'aurais désiré. Je regorge de richesses et de matériaux de toute espèce et malgré un travail non interrompu du matin au soir, je n'ai pu trouver encore le moment de les mettre en ordre et de boucher les trous qui subsistent encore dans les années précédentes"ls. Il convientdonc de se rappeler que la date indiquée en tête d'une livraison n'est nullementla preuve qu'elle a effectivement été faite à cette même date. Ces livraisons sont au contraire souvent antidatées. Une livraison peut ainsi renfermer le compterendu d'un ouvrage publié postérieurement à la date qu'elle porte. A partir de 1773, la Correspondance littéraire ne comprendra que douze livraisons par an, c'est-à-dire une par mois. Sur une feuille qui accompagne l'ordinaire de janvier, Grimm justifie ainsi ce changement: "Cette Correspondance sera dorénavant divisée par mois en douze parties. Cette division ne changera rien à son étendue, mais elle en rendra l'expédition plus prompte laquelle pourra se faire deux ou trois fois par mois suivant l'abondance des matières qui appartiendront à chaque mois. Chaque feuille se trouvant numérotée au bas de la première page, il sera toujours aisé de les ranger dans leur ordre" 16. La Correspondance littéraire a donc continué à être expédiée deux fois par mois, ce qui explique d'ailleurs un phénomène qui a pu paraître surprenant à première vue: il arrive que la suite d'un feuilleton se trouve dans la même livraison que son début. Ceci n'est pas un conte de Diderot, par exemple, figure dans l'envoi du mois d'avril 1773, mais séparé en deux morceaux différents. Maintenant que nous savons que les feuilles partaient deux fois par mois, cela n'a plus rien de surprenant. A partir de 1773, les feuilles ou cahiers sont numérotés à l'intérieur de chaque livraison, tout comme dans une revue. Volume et présentation matérielle des livraisonsPendant les premières années, une livraison comprend en moyenne une feuille et un feuillet,soit six pages manuscrites. Par la suite, le volume des livraisons va augmentantà un rythme assez régulier: de 1758 à 1759 la moyenne est de deux feuilles, de 1760 à 1761 de trois, de 1764 à 1765 de quatre et de 1766 à 1772 de cinq feuilles. Les quelques écarts que l'on constate par rapport aux moyennes indiquéess'expliquent tous par l'insertion d'oeuvres d'auteurs d'une certaine ampleurl7.Tout 15: F.-M. Grimm, Correspondance inédite, éd. Schlobach, Miinchen, 1972, p. 137. Les années précédentes présentent en effet des lacunes, dont certaines sont communes à toutes les copies manuscrites: 6 livraisons manquent en 1768 (ler mars, ler avril, ler et 15 oct., 15 nov., ler déc), 11 en 1769 (ler mai-15 sept., 15 oct.), 2en 1770 (ler août, 15 sept.) et 2 en 1771 (15 févr., 15 juin). 16: Bibl. hist. de la Ville de Paris, cote provisoire 3857, fol. Iro. Signalons que la copie conservée à la Zentralbibliothek de Zurich (cote M 44: 1-13), qui commence en 1774, garde la division en 24 livraisons pour l'année 1774. Side 27
pleurl7.Toutse
passe donc comme si le volume des livraisons augmentait
régulièrementde Pour la période de Meister, le volume des livraisons semble moins constant: les variations à l'intérieur d'une année peuvent aller de sept à douze feuilles, soit de 28 à 48 pages. Mais, comme pour la première partie, les écarts sont dus à la longueur de certains textes d'auteurs, et le volume du corps de la livraison, c'està-dire du texte de Meister lui-même, reste remarquablement constant. Au début de son entreprise, Grimm ne semble avoir disposé que d'un copiste, ou de deux au maximum. Un des premiers, sinon le premier, fut un certain Girard, maître d'école à Port-RoyaUB dont l'écriture figure dans le manuscrit de Gotha de 1754 à 1761. Pour ces années, le manuscrit de Gotha présente un texte peu soigné. Les ratures, ajouts et corrections y sont nombreux. Le copiste termine parfois la livraison au milieu d'une page. Quelquefois Grimm insère des textes copiés par des copistes étrangers à sa boutique (peut-être des copistes de Voltaire, car il s'agit souvent de textes du Patriarche). Il en résulte un ensemble peu homogène, peu soigné. La copie de Stockholm, au contraire, a un tout autre aspect: écriture soignée, peu de ratures et de corrections, texte régulièrement réparti sur toute la feuille, un seul copiste par livraison. Quel que soit le copiste — il y en eut au moins une cinquantaine au cours des années — chaque copie aura à partir de 1762 cet aspect homogène, régulier. Après des débuts fort modestes, où Grimm n'employait qu'un ou deux copistes, la Correspondance littéraire est ainsi devenue peu à peu une entreprise d'une certaine envergure occupant toute une équipe de copistes spécialisés, dont certains, tels Girbal, ont d'ailleurs été employés à copier les ouvrages de Diderot^. Contenu d'une livraisonChaque ordinaire commence invariablement par un article de tête assez long, souvent de 4 pages, à partir de 1763-1764 parfois de 6 ou 8 pages. Il peut s'agir du compte rendu d'un ouvrage récemment paru, rarement de romans, très souvent de pièces de théâtre. Grimm consacrait aux pièces nouvelles des analyses fort détaillées, qui permettaient à ses lecteurs de les connaître en détail avant même leur impression. Grimm, cependant, ne se limite pas à la production strictement littéraire. D'autres ouvrages d'actualité l'intéressent également. En 1756, par exemple, deux articles de tête sont consacrés au compte rendu des Intérêts de la France mal entendus par Goudar, et en 1761, trois autres traitent de la Théorie de l'impôtdu 17: Citons, à titre d'exemple, l'ordinaire du ler juin 1766 ou le début du Salon de i /OJ> de Diderot occupe à lui seul 9 feuilles ou cahiers. 18: Cf. notre thèse, t. 11, p. 73, n. 9. 19: Cf. P. Vernière, Diderot, ses manuscrits et ses copistes, Paris, 1967. Side 28
pôtdumarquis de Mirabeau et la polémique qui s'ensuivit. C'est aussi en 1761, à une époque où le débat sur l'inoculation de la petite vérole bat son plein, que Grimm consacre un compte rendu de sept pages, d'ailleurs fort critique, à un Mémoiresur l'inoculation publié par d'Alembert dans ses Opuscules mathématiques-®. Cet article a été supprimé par Tourneux, de même que trois autres, écrits à l'occasion de la publication, en 1762, des Réflexions d'un citoyen sur la marine par un certain Faure et qui traitent surtout des problèmes d'hygiène des marin s2!. Les comptes rendus d'ouvrages sont parfois remplacés par des réflexions qui portent sur des thèmes d'actualité: le fatalisme (1756), le progrès des lumières (1757), le christianisme (1764), etc. Les persécutions subies par Diderot lors de la publication de Y Encyclopédie sont aussi fidèlement rapportées. A partir de 1759 figurent en articles de tête des œuvres d'auteurs telles que les Salons de Diderot, composés pour la Correspondance littéraire. Exception faite des Salons, les textes d'auteurs sont cependant rares en début de livraison pendant la période de Grimm. Pendant celle de Meister au contraire, ils sont plus fréquents et plus volumineux, car, moins fécond que Grimm, Meister a puisé dans les portefeuilles de ses amis bien davantage que son prédécesseur. C'est surtout Diderot qu'il met à contribution, et c'est pendant ces années (1773-1790) que sont insérées, sous forme de feuilleton, les œuvres les plus connues du philosophe: Supplément au voyage de Bougainville (1773-1774), Entretien d'un philosophe avec la Maréchale (1775), Jacques le Fataliste (1778-1780, 1786), La Religieuse (1780-1782), Le Rêve d'Alembert (1782), Lettres à Falconet (1786-1788), n'en mentionner que quelques-unes. Les abonnés royaux et princiers de la Correspondance littéraire eurent donc connaissance de ces ouvrages quelque vingt, parfois trente, parfois même, pour des pièces de circonstance, plus de cent ans avant le grand public. Pendant la période de Grimm, les articles de tête portent donc sur les sujets les plus divers, même s'il montre une prédilection toute particulière pour le théâtre.Une confrontation de l'édition de Tourneux avec les manuscrits nous révèle que celui-ci a fait des coupes sombres - sans en avertir le lecteur - dans les analysesde pièces de théâtre, souvent très longues. Des 154 comptes rendus de pièces de théâtre insérés en articles de tête pendant la période de Grimm, 65 sont incomplets.Tourneux garde l'introduction et la partie purement critique mais supprimel'analyse détaillée de la pièce, faite acte par acte, souvent d'un grand intérêtpour les historiens du théâtre, surtout quand il s'agit de pièces non imprimée s22. En 1761, par exemple, il a supprimé un texte où Grimm fournit les seulesindications 20: Cet article, dans lequel Grimm s'est inspiré d'un texte de Diderot, figure dans la livraison du ler décembre 1761. Cf. Diderot, Œuvres complètes, Hermann, t. 11, p. 356-361. 21: Insérés dans les livraison du ler mars, du 15 mars et du ler avril 1762. 22: Pour des exemples de ce procédé, voir Frédéric-Melchior Grimm, La Correspondance littéraire, ler janvier-15 juin 1763, texte établi et annoté par Agneta Hallgren, thèse, Uppsala, 1979,1.1, pp. 25-31 et 134-139. Side 29
lesindicationsque nous ayons sur
les changements apportés par Diderot lui-mêmeau Pour la période de Meister, Tourneux a écarté un nombre considérable d'analyses et de comptes rendus d'ouvrages divers. D'autres ont été abrégés. Ici les principes suivis par l'éditeur restent souvent incompréhensibles. Des 53 analyses de pièces de théâtre publiées en articles de tête, seules 11 sont complètes. En 1775, Meister consacre 32 pages manuscrites réparties sur trois livraisons à l'ouvrage de Necker intitulé Sur la législation et le commerce des grains; Tourneux en fait 2 pages. Le compte rendu du Cours d'étude de Condillac est supprimé, ainsi que celui de YEssai de traduction de quelques épîtres et autres poésies latines de Michel de l'Hôpital par Coupé (mars 1778) et celui des Lettres sur l'Egypte par Savary (avril 1785) pour ne citer que quelques exemples. Ces articles de tête sont suivis d'autres articles qu'on peut en gros classer sous les trois rubriques suivantes: 1° notices ou comptes rendus de spectacles ou d'ouvrages imprimés, 2° nouvelles, anecdotes et nécrologies et 3° œuvres d'auteurs. La première catégorie comprend des articles de longueur très inégale, parfois d'une demi-page, très souvent de quelques lignes seulement. Dans ce dernier cas, la Correspondance littéraire sert d'instrument d'information bibliographique: elle fournit le titre de l'ouvrage, souvent sans commentaire ou appréciation. Ces ouvrages relèvent des domaines les plus divers: littérature, histoire, tactique, économie politique, agriculture, etc. Une place importante est faite aux dictionnaires portatifs et aux manuels d'utilité pratique. Parmi les titres écartés par Tourneux, citons le Manuel du jardinier de Maudirola (ler oct. 1765), un Essai sur les abus des règles générales et contre les préjugés qui s'opposent aux progrès de l'art des accouchements (ler déc. 1765), le Code matrimonial de Ridaut (15 mai 1766), le Mémoire sur les maladies épidémiques des bestiaux de Barberei (ler juillet 1766), VEssai sur l'art de faire le vin rouge de Maupoin (15 avril 1767) et La Botanique mise à la portée de tout le monde de Regnault (15 déc. 1769). C'est à partir de 1765 que Tourneux a opéré des suppressions de plus en plus nombreuses dans cette catégorie d'articles, peut-être contraint à cela par l'abondance des matériaux. Nous avons vu, en effet, que c'est vers cette époque que le volume des livraisons augmente de plus en plus. Les nouvelles, anecdotes et nécrologies ont en général été retenues par Tourneux, surtout pour la période de Grimm. Les sujets les plus divers y sont traités: les débuts ou la retraite d'un auteur, une élection à l'Académie,la maladie d'un auteur célèbre, etc. Les querelles littéraires sont rapportées, de même que les faits et gestes du Patriarche et les pérégrinations du malheureux Jean-Jacques. En 1783, Meister consacre aux expériences de Montgolfier trois articles, dont le dernier . celui de novembre, a été supprimé par Tourneux. Il en va de même pour deux articles qui signalent à l'attention des lecteurs une découverte faite par Faujas de Saint-Fond (avril 1785) et un instrument inventé par Guérin (oct. 1786). 23: Voir notre thèse, 1.1, p. 50-58. Side 30
C'est dans la dernière catégorie d'articles, les œuvres d'auteurs, que Tourneux a opéré les coupes les plus importantes, car, contrairement à ce qui ressort des éditions, chaque livraison contient au moins une pièce fugitive, souvent plusieurs. Il peut s'agir d'épigrammes, de poésies, de facéties ou de textes plus longs, qui circulaient sous forme manuscrite dans les salons de la capitale et dont Grimm et Meister avaient réussi à se procurer une copie. De ces pièces originales, qui forment 43°/o de l'ensemble du volume des livraisons pour les années 1753 à 1772, Tourneux n'a retenu qu'une faible partie. Pendant la période de Grimm, ces textes d'auteurs représentent 27°/o de l'ensemble des articles insérés. J. Varloot a déjà signalé en détail les contributions des collaborateurs pendant la première période24. Ici nous tenons seulement à souligner de nouveau l'importance des contributions de Voltaire, qui est de loin le collaborateur le plus important, ayant fourni plus de 630 œuvres2^. Loin derrière viennent Galiani (39), Saint-Lambert (35), Boufflers (34), Desmahis (26), Saurin (23) et Margency (22). Une place à part doit être faite à Diderot et à Mme d'Epinay, qui ont fourni aussi bien des articles critiques que des œuvres originales. Mais comme nous venons de le signaler, c'est surtout pendant la période de Meister que les contributions de Diderot sont nombreuses. D'autres auteurs de textes originaux qui figurent avec une certaine régularité pendant cette dernière période sont Lebrun (23), Florian (22), Cérutti (17), Cubières (16) et Beaumarchais (16); mais bien d'autres ont été mis à contribution, car pendant l'époque de Meister, les textes d'auteurs représentent plus de 46°/o de l'ensemble des articles (contre 27°/o pour la période de Grimm). Individualité des copies manuscritesLes copies diffèrent-elles suivant les destinataires? ou Grimm envoyait-il des copies identiques à tous ses abonnés? Pour répondre, il convient de distinguer d'une part les lacunes dans une ou plusieurs copies par rapport aux éditions, d'autres part les différences, lacunes ou autres, entre les diverses copies manuscrites. Le premier cas — lacunes ou différences par rapport aux éditions — peut paraîtrede moindre importance, puisque nous disposons aujourd'hui de plusieurs manuscrits. Nous nous arrêterons pourtant un instant sur ce problème, car il nous fournit une démonstration fort instructive de la façon dont procédaient les éditeurs du siècle passé. L'étude comparative des manuscrits nous montre que 27 livraisons manquent pour la période 1767-1772. Ce sont de véritables lacunes dues aux absences de Grimm, car ces livraisons ne figurent dans aucune des copiesdont nous disposons pour cette période. A première vue, certaines se trouventchez 24: J. Varloot, "La Correspondance littéraire de F.-M. Grimm àla lumière des manuscrits de Gotha: Contributions ignorées, collaborateurs mal connus", Beitràge zur franzôsischen Aufklàrung und zur spanischen Litteratur, Berlin, 1971, p. 427-445. 25: Cf. E. Lizé, Voltaire, Grimm et la Correspondance littéraire, SVEC, 180, 1979. Side 31
ventchezTourneux. Disposait-il d'une copie inconnue qui différait de toutes les autres? Il n'en est rien. Une confrontation des éditions avec les manuscrits révèle qu'il a tout simplement enlevé des articles d'une livraison où il y en avait déjà beaucoup pour que ne ressortent pas les lacunes de son manuscrit. Il lui arrive aussi de déplacer un ou plusieurs articles non seulement d'une livraison à une autre,mais aussi d'une année à I'autre26. En préparant son édition de la Correspondance littéraire, Tourneux disposait du manuscrit de Gotha. Il est curieux de noter qu'il ne semble l'avoir suivi que rarement, se contentant le plus souvent de copier les éditions antérieures en ajoutant par-ci par-là des articles qui lui paraissent intéressants. Il en résulte que les articles qui sont mal placés dans les premières éditions le sont aussi chez Tourneux. Si ces textes, qui figurent après tout dans les copies manuscrites, n'ont été que déplacés, d'autres par contre, une vingtaine, ont été ajoutés après coup, soit par Tourneux, soit par les éditeurs de 1812-1813. Le manuscrit de Zurich, qui a servi de base à la troisième partie de la première édition, nous en fournit la preuve formelle, car un certain nombre de ces textes y sont insérés, écrits d'une écriture étrangère à la boutique de Grimm, sur un papier de format et de qualité différents. Une preuve supplémentaire nous est fournie par une lettre de Suard, l'éditeur de la troisième partie, à Meister où il écrit: "Je vous préviens qu'on pourra bien intercaler dans cette suite quelques morceaux qui y ont rapport et qui n'appartiennent pas à votre manuscrit. Ne m'avés vous pas dit que vous pourries aussi envoyer quelques autres morceaux propres ày figurer?"27 La présence dans les éditions d'un certain nombre de textes qui manquent dans les copies manuscrites de la Correspondance littéraire n'a donc rien de surprenant. Après avoir écarté ces différences qui ne sont qu'apparentes, venons-en maintenant à celles que révèle la confrontation des copies manuscrites. Une première catégorie se dégage tout de suite. Ce sont les lacunes ou différences dues à l'action du temps: feuilles ou livraisons perdues, bouleversement de l'ordre des feuilles au moment de la reliure, etc. Après avoir éliminé cette catégorie de différences qui ne sont, elles aussi, qu'apparentes, nous pouvons classer les différences réelles que présentent les manuscrits, c'est-à-dire celles qui proviennent de la boutique de Grimm, comme suit: - variantes qui portent sur un mot ou membre de phrase. Il nous est impossible d'apprécier leur fréquence en l'état actuel de notre travail. Seule une édition critique de l'ensemble du texte peut révéler l'importance et le nombre de ces variantes au cours des années2B. — article omis
dans une copie. Le cas se présente rarement et semble dû
plus à 26: Voir à titre d'exemple le Tableau de concordance de notre thèse, t. 11, p. 33-39. 27: J.Th. de Booy, op. cit., p. 237. 28: Voir le problème que pose la livraison du 15 juin 1763, thèse d'Agneta Hallgren. Side 32
- ordre différent
des articles à l'intérieur de la même livraison, cas peu
fréquent - imprimés et feuilles de notation musicale insérés. Certains manuscrits renferment, reliés à l'intérieur ou à la suite d'une livraison, des imprimés de contenu et de format variés. Des notes manuscrites de la main de Grimm ou d'un copiste ainsi que des marques de pliure qui correspondent à celles des feuilles normales prouvent qu'ils ont réellement fait partie d'un envoi de la Correspondance littéraire. Ces imprimés ne sont jamais les mêmes dans les différents manuscrits et on peut par conséquent se demander si Grimm a fait un choix parmi ceux dont il disposait, choix qui variait selon les destinataires. Signalons, toutefois, que ces imprimés, qui venaient détachés du reste de la livraison, ont fort bien pu se perdre par la suite. Il en est de même pour les feuilles de notation musicale dont un nombre restraint seulement figure dans les manuscrits29. - un nouvel abonnement. Il arrive que les premières livraisons d'un nouvel abonnement différent de celles des abonnements en cours. Grimm reprend alors des textes déjà envoyés aux autres abonnés, et ces premières livraisons sont en général plus volumineuses. Après quelques mois, ces différences disparaissent et les copies deviennent identiques. La copie de Zurich, qui commence en 1774, est la dernière à présenter cette caractéristique. - œuvres d'auteurs. Dans le domaine des pièces de circonstance, l'examen des manuscrits fait apparaître certaines différences et lacunes. Il semble effectivement que Grimm ait fait un certain choix en fonction des intérêts de ses abonnés, surtout en ce qui concerne les textes de Voltaire. La Pucelle, par exemple, ne semble jamais avoir été envoyée à Stockholm. Il convient cependant de signaler que ces textes arrivaient souvent, sinon toujours, à la fin d'une livraison copiés sur des feuilles à part qui ont pu s'égarer par la suite. Ces différences disparaissent vers la fin des années soixante. Interventions de Grimm lui-mêmeUn phénomène très caractéristique pour les premières années de la Correspondancelittéraire, ce sont ce que j'appellerais les apostrophes personnelles, c'est-àdiredeux ou trois lignes de la main de Grimm en fin de livraison, dans lesquelles il s'adresse directement à l'abonné en question et où nous voyons Grimm dans son rôle de commissionnaire. A quelques exceptions près, il est question de commandesde livres ou de manuscrits dont Grimm rend compte ailleurs dans la mêmelivraison. Le 15 avril 1755, il écrit: "J'attens les ordres de S. A. S. au sujet de la Pucelle. D'un côté j'espère toujours qu'elle sera imprimée et de l'autre je crains 29: Le manuscrit de Gotha conserve, dans l'envoi du 15 juin 1758, la musique pour une "Chanson dans le goût de la romance" de Diderot. Sous la date du ler juin 1771 ñgure, dans le manuscrit de la Bibl. hist. de la Ville de Paris, la musique composée par Philidor pour le poème de Diderot intitulé "Hymne à l'amitié". Side 33
que l'occasion
de l'avoir en MSC ne m'échappe." Ces apostrophes
personnelles, Grimm est aussi
intervenu régulièrement, jusqu'en 1768 environ, pour
corriger Nous trouvons aussi des interventions personnelles de Grimm plus importantes et d'une autre nature. Pendant les premières années, il peut s'agir d'articles entiers, de longueur très variée, allant de quatre lignes à une feuille, en général placés à la fin d'une livraison. Dans ce cas, tout se passe comme si Grimm, après avoir reçu la copie exécutée par le copiste, s'était décidé à ajouter un article ou deux ou à compléter son texte s'il n'avait pas eu le temps de le terminer avant de le donner à copier. A ces interventions il faut ajouter les quelques lignes de la main de Grimm qui servent d'introduction à plusieurs œuvres de circonstance et qui nous permettent d'en identifier l'auteur. En 1761 par exemple, il attribue sans équivoque quatre contes et dialogues à Mme d'Epinay, ce qui n'a pas empêché Tourneux de les laisser au nom de Diderot dans l'édition des Œuvres complètes^. A partir de 1764,
les interventions de Grimm se font de plus en plus rares
et Vers cette époque la correspondance littéraire de Grimm est devenue une entreprised'une certaine importance, le nombre des abonnés ayant augmenté régulièrement,et les quelques caractéristiques qu'elle avait eues en commun avec les premières correspondances littéraires du siècle ont disparu. Si, au début des annéessoixante, la composition des copies variait quelque peu suivant les destinataires,elle ne le fait plus guère, et le volume des livraisons se stabilise. Les copies, désormais soignées et identiques, sont exécutées par une équipe de copistes spécialisés.Fixée dans une forme qui ne changera que fort peu pendant la période de Meister, la Correspondance littéraire s'apparente de plus en plus à ce que nous appelons un journal ou une revue culturelle. Si la littérature y tient une place importante,bien d'autres domaines d'actualité sont abordés. A un tout autre degré que la plupart des journalistes et des correspondants littéraires de l'époque, Grimm et Meister ont su donner à leurs lecteurs l'impression d'être au fait de l'actualité parisienne, de participer de près à la vie des salons parisiens. Par le choix et la combinaison des textes critiques et des œuvres insérées — chansons, impromptus, poésies de circonstance, œuvres de fiction — ils font revivre aux yeux de leurs abonnés et à nos yeux le climat culturel de la capitale. Témoignage 30: Sauf les livraisons de janv.-sept. 1762 à Gotha. Aussi avons-nous pu constater que ces copies ont été exécutées à Gotha. 31: Diderot, Œuvres complètes, éd. Assézat-Tourneux, t. IV, p. 444-482 Side 34
exemplaire, leur
journal constitue ainsi une source de connaissances
inépuisable Ulla Kôlving
Uppsala RésuméOn sait depuis quelques années combien l'édition Tourneux de la Correspondance littéraire est incomplète et peu scientifique selon nos critères actuels. Une nouvelle édition se prépare et c'est dans le cadre des travaux de préparation pour cette édition que nous avons dressé un inventaire de toutes les copies manuscrites retrouvées. L'examen des manuscrits nous permet de suivre l'évolution de cette "entreprise" que fut la CL. D'un début modeste où le rédacteur n'employait qu'un seul copiste qui travaillait pour deux ou trois abonnés, nous assistons à la création d'un véritable atelier où travaillent toute une équipe de copistes spécialisés dont les copies sont distribuées à un nombre d'abonnés de plus en plus important. La confrontation des manuscrits avec l'édition de Tourneux révèle que celui-ci a supprimé ou abrégé bon nombre d'articles critiques et d'œuvres d'auteurs insérés, forçant par là l'image du journal. Une impression d'actualité prise sur le vif disparaît chez Tourneux en faveur du message littéraire et philosophique. |