Revue Romane, Bind 14 (1979) 1

Une étude sur le suffixe -ation en français

par

Emmanuel N. Kwofie

1. Introduction

Examinant la dérivation, Ferdinand Brunot notait dès 1926 que les suffixes
subissaient une concurrence due à la vulgarisation de mots d'origine savante
tels que vaccination, conservation, animation, etc.

La formation des mots en -ation n'a rien de savant, affirmait-il: elle est connue des petits Français qui «en usent trop pour faire des mots qui n'existent pas». Aussi, à son avis, faut-il leur expliquer ce qu'ils font inconsciemment et leur apprendre à n'en pas abuser et à ne pas commettre de barbarismes (cf. La Pensée et la langue, 1965, p. 62).

Apprendre aux enfants comment employer des suffixes revient à les conduire à l'appréhension d'une procédure de reconnaissance, de segmentation des morphèmes connue des linguistes, procédure à laquelle est initié tout débutant en linguistique structurale.

Or, la dérivation repose, comme toute formation de mots, sur l'instinct analogique. Le francophone d'Afrique ou l'étranger faisant l'apprentissage du français en Afrique tout comme le petit Français est tenté de créer des mots tels que *supportage sur le modèle de allumage, dans la mesure où l'acquisition de toute langue implique en partie la création analogique et la généralisation. C'est ainsi que nous avons entendu dire par un lycéen ivoirien la phrase suivante: «presquement on parle de l'agni». Si le mot presque et le suffixe adverbial (ou nominal) -ment existent en français, la combinaison presquement est inconnue. Le risque de forger des barbarismes se pose évidemment à tous les niveaux de l'apprentissage.

Rien dans une langue ne peut suggérer à celui qui l'apprend qu'un mot
créé à partir de procédés connus de cette langue ou de matériaux qui lui sont
inhérents n'existe pas.

Les dictionnaires, dont le but principal est de nous renseigner sur l'emploi,la signification et quelquefois la prononciation des mots, ne sont d'aucun secours à ce point de vue. Le bon usage d'un signe linguistique s'établit et s'affermit avec le temps seul. Au lieu d'aborder un problème

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sans issue (personne ne peut dire quelles racines ou quels monèmes sont à combiner avec un suffixe donné), nous nous proposons d'examiner l'évolutiondu suffixe -ation en français. Cela nous permettra tout au moins de dégager certaines des tendances relatives à cette langue.

2. L'étude proposée

L'étude proposée soulève de nombreuses questions de méthode qui sont en général celles de la lexicologie. Peut-on étudier -ation indépendamment des autres membres de la série corrélative de noms? Dans la mesure où le suffixe en question date des premières origines de la langue, n'avons-nous pas affaire à la transformation du latin en français? Remarquons que -ement, cet autre suffixe nominal avec lequel -ation et -age constituent une série corrélative, apparaît déjà au IXe siècle dans les Serments de Strasbourg:

Pro Deo amur pro Christian poblo et
nostro commun salvament [...]
Si Lodhuvigs sagrament, que son fradre
Karlo jurât, conservât ...

Tout comme -ement, le suffixe -ation est d'origine latine. E. Littré écrit: «-ation, finale dérivant de la finale latine -atio, qui, provenant du supin, indique l'action du verbe dont il s'agit [...]. La finale latine -atio se rendait dans l'ancien français par -aison ou -oison', oraison, raison, saison» Dictionnaire la langue française, vol 1. Hachette 1883, p. 226).

La date d'apparition du suffixe n'est pas certaine. Selon Pierre Guiraud (cf. L'ancien français 1965; Les mots savants 1968), 200 mots comportant ce suffixe ont été forgés au cours des XIIe et XIIIe siècles. Cette constatation nous permet de conjecturer que le suffixe -ation remonte à tout le moins au XIIe siècle. Cette hypothèse se trouve confirmée par l'existence de mots en -ation dans le français du XIIe siècle. Le suffixe aurait fait son apparition dans la langue antérieurement à cette date mais non postérieurement. Au début, le suffixe semble s'être spécialisé, car les exemples cités par Guiraud à la suite de Kr. Nyrop (dont déprécation,glorification,prédication,purification, édification, vocation, sanctification, supplication, invocation, provocation, signification, mortification, excommunication) sont tous des mots du domaine religieux.

Quant à l'histoire des mots (chaque mot, a-t-on dit, a son histoire), elle
pose plusieurs problèmes, dont la signification historique de la plus ancienneattestation.
On sait que les mots changent de sens suivant les circonstanceset

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cesetle milieu. Il arrive souvent qu'un mot tombe en désuétude à une certaine époque, mais soit rénové ou ressuscité pour une raison ou une autre (considérer coussin XIIe siècle, panse XIIe siècle, strapontin XVIe siècle, par exemple). L'une des tâches du lexicologue est ainsi de déterminernon seulement le sens primitif des mots mais aussi les sens nouveaux qui leur sont attribués. Il peut donc être utile d'indiquer le domaine, ou le milieu et les circonstances de temps dans lesquels le mot est employé. Au premier problème s'en ajoute un second: la distinction entre diachronie et synchronie: est-il possible de savoir si les locuteurs d'antan ou ceux d'aujourd'hui sentent qu'un mot en -ation est dérivé d'un substantif latin? La conscience linguistique du locuteur ne recourt pas souvent à l'histoire. Il y a des substantifs qui ne se rattachent pas à des verbes. Comme exemples on citera entre autres exsuccion et propension. Il serait intéressant de déterminer le pourcentage que représentent de tels mots par rapport au total des mots répertoriés. Comme le fait remarquer le professeur Pierre Guiraud, il n'y a que des tendances en lexicologie.

Or, la meilleure façon de dégager les tendances est, à notre sens, de classer les mots par siècles. Cette manière de procéder nous permettra d'abord de réduire la marge d'erreur dans la datation; ensuite, étant plus commode, elle nous évitera un atomisme qui risquerait de fausser les perspectives. On sait que, dans l'histoire d'un peuple, il est des périodes où le besoin de mieux s'exprimer, donc d'adapter ce véhicule insuffisant qu'est la langue, se fait mieux sentir. Il ne serait donc pas téméraire de croire que l'étude du suffixe -ation puisse nous renseigner sur quelques-unes des transformations survenues dans la société française à travers les siècles.

3. Documentation

L'étude proposée suppose une documentation immense. Le travail préliminaire sur lequel nous nous fondons est la liste des mots établie par M. A. Juilland dans son Dictionnaire inverse de la langue française (Mouton & Co. 1965 : 268 - 281). Selon M. Juilland, il y aurait 1.447 mots (1.446, selon nos propres comptages) en -TION. Cette liste n'est pas exhaustive (le reste de l'ouvrage non plus, comme le fait remarquer son auteur). L'on devrait ainsi s'attendre à un nombre de mots plus élevé, étant donné l'expansion de ce mode de formation sous l'influence de l'anglais depuis une dizaine d'années. Cette liste suffit pourtant largement à nos fins.

En l'examinant, on relève les faits morphologiques suivants:

a) II y a des formes non-segmentables, c'est-à-dire qu'il est impossible,

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du point de vue morphologique et purement synchronique, de décomposer un mot donné en radical et en suffixe. Exemples : scion, jussion, nation, action, traction, caution, sédition, attraction (cf. détraction), adduction, addition.

Généralement, ce groupe se compose de formes en -sionl-tion. On a
affaire ici à une catégorie hétéroclite. Dans la plupart des cas, les termes
sont formés directement sur le radical latin.

A l'intérieur de ce groupe, on pourrait distinguer entre les termes qui se terminent par une voyelle autre que A [i, e, e] plus [sjô] et ceux qui se terminent par une consonne autre que [k]: [p, 1, r,] plus [sjô]. Leurs nombres sont respectivement de 143, 149 et 87.

b) II y a des termes composés d'un préfixe, d'un radical, et du suffixe en
question: -ATION.

Bien qu'il soit possible, du point de vue diachronique, de considérer les préfixes de-, ré- (re-), in-, sous-, sub-, auto-, pro-, pré-, entre autres, comme des unités sémantiquement autonomes, le sentiment d'autonomie du préfixe, dans bien des cas, s'affaiblit, s'obscurcit, se perd totalement chez maints sujets parlants. Cela est fonction, sans doute, du niveau d'instruction du sujet parlant. Et le problème se réduit en fin de compte à la productivité ou à la disponibilité des morphèmes.

Nous écartons de notre discussion les termes relevant de la première catégorie. Seuls les termes de la seconde retiendront notre attention. Le problème de la préfixation n'entrera pas en ligne de compte. Sur les 1.447 mots en -TION, 978 mots se terminent en -ATION. Ces mots en -ATION se répartissent en trois groupes:

a) Les termes supposant un verbe en -ISER ; le substantif correspondant
se termine en -ISATION. On compte pour ce groupe 103 mots.

b) Les termes supposant un verbe en -IFIER ; le substantif correspondant
se termine en -IFICATION. Ce groupe comporte 72 mots.

c) Les termes qui sont tirés directement du verbe par suffixation de -ation, c'est-à-dire sans changement consonantique à l'intérieur du radical mais avec modification de la voyelle finale, sont de loin les plus nombreux. On compte pour ce groupe 776 mots. Etant donné l'étendue d'un tel corpus, nous nous limiterons à un échantillon de 312 termes, qui sont classés selon qu'ils correspondent ou non à un verbe, et selon la forme du suffixe. En annexe, on trouvera d'abord l'inventaire général des mots répertoriés, ensuite les mots classés par siècles, avec la profession à laquelle ils se rattachent. On constatera que le même mot peut appartenir à des domaines différents. Aussi le sens d'un mot peut-il se définir tant par le

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niveau de langue que par le niveau professionnel. Nous ne nous donnerons
pas pour tâche de distinguer les différents sens des mots dans notre corpus;
nous nous contenterons de deux exemples.

II ressort du tableau ci-dessus que le nombre de substantifs formés sur un verbe est beaucoup plus élevé que celui des substantifs qui ne le sont pas. Le pourcentage est de 81,3% environ. Les mots qui ne correspondent pas à un verbe sont ceux qui se rattachent directement à un substantif latin.


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Il arrive aussi, et assez souvent, que des verbes soient formés, après coup, à
partir de substantifs, ce qui semble être le cas pour les couples:

saponification (1803) / saponifier (1812),

trépidation (XIIIe siècle) / trépider (XIXe s.)

Dans d'autres cas, le verbe et le nom ont en commun le même radical sans qu'ils soient dans un rapport sémantique direct; ou ils peuvent être liés sémantiquement sans qu'ils se rattachent directement l'un à l'autre du point de vue formel. Comparer les séries:

appellation/appeler/appel

tarification/tarifer/tarif

allocation/allouer

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négation/nier

sudation/suer

supplication/supplier

dessication/dessécher

Sur les 312 mots répertoriés, 48, soit 18,7%, n'ont pas de verbes correspondants. On pourrait ainsi dire, en l'occurrence, que le substantif en -ation est dérivé directement soit du latin, soit d'un autre substantif. On citera comme exemples les termes suivants.:


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Il est à remarquer que la tendance générale du français est de former le
substantif à partir du verbe, puisque le pourcentage des substantifs ayant
des verbes est de 81,3%. Voici la répartition des termes par siècles:


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4. Historique

La formation du substantif à partir du verbe se révèle très productive au cours des XIIe, XIIIe, XIVe et XVIe siècles. Peut-être doit-on chercher lès causes de ce phénomène dans le fait que le français venait de naître et cherchait à se libérer du joug du latin et à s'affermir.

Cependant, la formation du substantif sur le verbe semble de moins en moins à la mode à partir du XVIIe siècle. On enregistre, par contre, un développement notable des dérivés en -isation et -ification. On compte au moins une soixantaine de verbes en -ISER, par exemple chez M. Frey (Les transformations du vocabulaire français à l'époque de la révolution, 1789-1800 P.U.F. 1925). Des substantifs comme fraternisation, nationalisation, fédéralisation, centralisation, etc., cités par Frey, appartiennent certes au vocabulaire politique. On ne saurait cependant nier qu'ils soient d'un usage courant. D'autres comme volcanisation, panthéonisation et monétisation gardent leur caractère technique ou spécifique. Or, on constate d'après le tableau que les deux suffixes se font concurrence au XVIIIe siècle. Pourtant, c'est -isation qui se révèle le plus productif à partir du XIXe siècle.

Ces constatations semblent rejoindre en quelque sorte celles de Jean

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Dubois. Examinant l'expansion des suffixes -ation, -ification et -isation, celui-ci avait constaté que, vers les années 1960, les dérivés en -ation disparaissaient de plus en plus au profit des dérivés en -isation. Nous lui empruntons les chiffres suivants qui valent pour des mots de la lettre A, dans la période allant de 1949 à 1960 (voir/c Français Moderne No. 1 jan. 1960).

Pour ce qui est des professions, on constate (malgré les insuffisances du dénombrement dues à des renseignements lexicographiques souvent peu précis ou à leur absence) qu'au moins 55 termes appartiennent à la langue commune; 33 sont des mots d'église; 43 sont des termes de médecine et de chirurgie; 54 sont des termes juridiques (jurisprudence, termes du palais, administration, etc.); 77 sont des termes scientifiques (physique, chimie, astronomie, physiologie, biologie, anatomie, botanique).

Si donc on écarte les termes techniques ou spécialisés, le nombre des
termes de la langue commune apparaît comme très réduit, le pourcentage
étant de 17,6%.

En revanche, le vocabulaire scientifique (médecine, chimie, physique,
etc.) compte 38,4% des mots répertoriés.

Chaque activité humaine, pense Charles Bally, tend non seulement à se créer son vocabulaire, mais encore à dégager des éléments morphologiques qui deviennent caractéristiques du vocabulaire lui-même. C'est ainsi que l'on peut considérer les variantes morphologiques -IS/ -IFIC (-ATION) comme propres au vocabulaire scientifique et technique. Ce mode de formation, plus particulièrement la variante -IFIC, dérivée du latin -FICARE, n'est pas nouveau puisqu'il est attesté par des mots des XIIe —XIVe siècles tels que


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Nous signalerons que si, au départ, ce mode de formation se retrouve dans des domaines différents - religion, administration, chimie et médecine -, il se limite, aux XVIIIe et XIXe siècles, aux lexiques scientifique, politique et social (moral). L'appartenance des deux variantes au lexique savant, même aux XIVe — XVIIe siècles, est assez évidente.

D'autre part, si l'on compare les deux variantes on constate que IFICATION dans le vocabulaire scientifique (chimie, etc.), alors que -IS ATION se rencontre même dans le vocabulaire politique et social (et de la langue commune). Notre corpus ne nous permet pas de voir la pleine expansion de la variante -ISATION au XXe siècle. Nous remarquons tout de même qu'aucun terme en -IFICATION ne figure sur la liste. On a suggéré que l'expansion de la variante -ISATION en français, depuis le XVIIIe siècle, est due à son caractère international: elle se retrouve dans l'anglais (cf: visualisation, officialisation, nationalisation, standardisation, victimisation, africanisation, européanisation, etc.)

L'expansion de -ISATION doit ainsi expliquer le retrait de la variante
-IFICATION.

De toute façon, nous croyons pouvoir dire que le rôle des deux variantes
dans le renouvellement lexical des XVIIIe et XIXe siècles reflète l'essor des
sciences appliquées et le tempérament de la société française.

5. Vocabulaire technique/commun

Nous avons observé que les variantes: -ISATION et -IFICATION se sont manifestées spécialement dans le lexique scientifique et technique. Il est pourtant vrai que beaucoup de termes scientifiques sont d'un usage courant et que, par conséquent, ils appartiennent également à la langue commune.

On peut expliquer l'entrecroisement des divers lexiques de trois façons:

(i) le même terme s'emploie dans différentes langues techniques; ainsi,
un terme technique peut devenir un autre terme technique; il se pose ici la
question compliquée de la filiation des termes techniques;

(ii) les termes de la langue commune deviennent des termes techniques;

(iii) le vocabulaire commun se nourrit de termes empruntés aux diverses
techniques.

Dans le premier cas, il y a toujours spécialisation du sens. Ainsi, le terme neutralisation (XVIIe s.), qui est d'abord un terme de chimie, se retrouve dans les lexiques de physique, de linguistique, et de Droit international. Il s'emploie aussi dans le langage ordinaire.

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-En chimie, il signifie «l'action de rendre neutre un sel par une base»;

-En physique, le fait pour l'électricité positive de neutraliser l'électricité
négative;

- En linguistique, l'opposition (phonologique) qui, dans une position
donnée, devient inopérante;

- En termes de Droit international, «l'action d'assurer à un pays, à une ville l'état de neutralité». Et, finalement, en langage ordinaire, il s'emploie figurément et signifie «l'action de diminuer sensiblement la force ou l'action de quelque chose» {Dictionnaire de l'Académie française 8e édition).

Pour montrer comment un terme de la langue commune se transforme en terme technique on peut citer le motcommunication - (XIVe): ce terme, qui semble appartenir à la langue commune, signifiait d'abord «être en relation avec», «mettre en commun». Le mot est emprunté au bas latin.

Il se dit particulièrement des informations ou des renseignements que
l'on donne.

- En termes de Procédure, il signifie «Exhibition qu'une partie fait à
l'autre des pièces sur lesquelles elle fonde sa demande».

- Il s'emploie aussi en termes de téléphonie - mettre en communication
deux personnes qui veulent se parler par téléphone.

- En termes d'art militaire, on l'emploie sous les formes: rompre la communication, lignes de communication; il s'agit des «tranchées ou galeries que l'on pratique afin que deux quartiers de l'armée puissent correspondre à couvert et se secourir mutuellement».

Quant à la troisième catégorie, elle s'explique par le progrès des sciences, la vulgarisation et l'action incessante de la presse. Les dérivés en -ATION, -ISATION et -IFICATION ont en général une origine savante, en ce sens qu'ils sont des termes 'techniques'; ils appartiennent aux vocabulaires philosophique (politique et social), scientifique et technique. Pourtant, beaucoup de ces termes sont devenus populaires au fur et à mesure que les diverses techniques se sont vulgarisées. Le caractère savant d'un terme, en français, ne se confond pas avec son origine. Car il peut arriver qu'un mot savant (technique) soit emprunté au bas latin, tel vésication (XVIe s.) et qu'il reste dans le lexique technique sans jamais être employé dans la langue commune.

Conclusion

Selon l'inventaire de M. Juilland, les mots qui se terminent en -ATION sont
au nombre de 978. Nous avons observé que 103 de ces termes, soit 10,4%,

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supposent un verbe en -ISER, tandis que 73 termes, soit 7,3%, supposent un verbe en -IFIER. Le nombre de termes qui sont tirés directement du verbe par suffixation de -ATION s'élève à 776. Comme le pourcentage pour ce mode de formation est de 80% environ, nous pouvons dire que la tendance générale en français est de former le substantif à partir du verbe. La formation du substantif à partir du verbe est en vogue aux XIIe - XVIe siècles; toutefois, la fréquence de ce mode de formation est beaucoup plus élevée pour le XIVe siècle que pour les autres siècles. Le XVIIe siècle se signale par les chiffres bas notés pour toutes les catégories. En effet, on pourrait dire que l'importance de la formation du substantif à partir du verbe décline progressivement si ce n'est que le XVIIe siècle vient troubler cette tendance régulière. Le déclin du suffixe -ATION à partir du XVIIe siècle se fait au profit des suffixes -ISATION et -IFICATION.

Emmanuel N. Kwofie

Lagos

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Résumé

Cette étude examine l'expansion du suffixe -ation du XIIe siècle au XXe siècle à partir d'un inventaire établi par A. Juilland dans son Dictionnaire inverse de la langue française 1965, p. 268-281; elle indique les domaines ou les professions auxquels appartiennent les termes considérés. L'étude révèle qu'une cinquantaine de mots, soit 16% seulement des 312 mots retenus pour examen appartiennent à la langue commune; l'étude montre également que le suffixe -ation est en vogue aux XIIe - XVIe siècles comme un moyen de renouvellement lexical mais que son importance commence à décliner à partir du XVIIe siècle.

Ouvrages de référence

Dictionnaire de L'Académie française, 4e éd. revue et augmentée par W. von Wartburg P.U.F.

Hatzfeld, A. et Darmesteter, A. (1964): Dictionnaire général de la langue française du
commencement du XVIIe siècle jusqu'à nos jours. Delagrave 2 vol.

Littré, E. (1961-1962): Dictionnaire de la langue française, Gallimard Hachette 6 vol.

Robert, P.E. (1962-1965): Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française.
Société du Nouveau-Littré vol. 1-5.

Appendice

Inventaire général des mots


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2. Classification des termes par domaine


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