Revue Romane, Bind 12 (1977) 1

Assez avez alé: estre et avoir comme auxiliaires du verbe aler en ancien français

par

Helge Nordahl

Le fait que le verbe aler, en ancien français, puisse former ses temps composés tantôt avec es tre, tantôt avec avoir, est bien connu des grammairiens. La distribution apparemment asystématique des deux auxiliaires est, en général, plutôt sommairement constatée qu'analytiquement étudiée par les spécialistes. Joseph Anglade, par exemple, se contente de dire, sur le plan général, qu'il y a «de nombreuses confusions dans l'emploi des deux auxiliaires être et avoir» {Grammaire élémentaire de V ancien français, p. 200). Lucien Foulet souligne le haut degré de complexité de la distribution des deux auxiliaires, en disant «qu'on trouve aler tantôt avec être, tantôt avec avoir, et cela dans les mêmes œuvres à quelques vers d'intervalle» {Petite syntaxe de Vancien français, p. 100). Selon Gérard Moignet, il s'agit d'un effet de sens. «Aler avec l'auxiliaire avoir prend la valeur de «faire de la route», «marcher»» {Grammaire de Vancien français, p. 270), et Knud Togeby formule un point de vue analogue, quand il soutient que «avoir pouvait s'employer pour indiquer la durée de l'action» {Précis historique de grammaire française, p. 188).

Bien que sommaires et fragmentaires, les points de vue cités sont intéressants. Si nous nous proposons pourtant de reprendre l'étude de la distribution des deux auxiliaires estre et avoir avec aler, c'est tout d'abord pour concentrer l'attention sur deux facteurs grammaticaux concrets, qui, étudiés cornbinatoirement, systématisent et explicitent la distribution des auxiliaires et réduisent considérablement le nombre des «nombreuses confusions» dont parle Anglade:

1. L'emploi de l'auxiliaire avoir confère incontestablement une nuance de sens particulière à l'énoncé: «faire de la route», «marcher», selon Moignet, ou indique «la durée de l'action», selon Togeby. Le verbe aler, pourtant, dans la quasi-totalité des cas, est incapable d'exprimer tout seul cette nuance, c'est le syntagme aler + déterminant quantitatif {tant, molt, ne - gaires, une lieue) qui est porteur de cette nuance.

Side 55

2. Le verbe aler peut se construire avec un sujet impersonnel, un sujet nonanimé ou un sujet animé. Cette distinction, qui est fort importante, exerce son influence conjointement avec le facteur présence ¡absence du déterminant quantitatif. Disons, en guise de préambule, que l'emploi de l'auxiliaire avoir avec aler est presque obligatoire dans les cas où le sujet est animé et que le verbe aler est déterminé par un déterminant quantitatif. Dans tous les autres cas, c'est l'auxiliaire estre qui est quasi-obligatoire.

I. Sujet impersonnel

L'auxiliaire estre semble obligatoire:

- «Je te dirai, fet li anemis, cornent il est aie de lui.
(La queste del saint Graal, p. 120)

Si ne sai cornent ce est aie: ... (op. cit. p. 147)

II fust aie tôt altremant, s'il feust seù certaignement que li chevals avoit el cors: (Le roman d'Enéas 933-35)

Tut en ordre li ad cunté
Del rei e de lui cum est aie.
E tresbien dit,
(Beneit, La vie de Thomas Becket 739-41)

II. Sujet non-animé

Au moins quatre groupes sémantiques de noms non-animés peuvent avoir la
fonction de sujet du verbe aler en ancien français. L'emploi de l'auxiliaire
estre semble quasi-obligatoire.

1. afaire, chose (aler: «se développer»):

La ordena li empereres une pais convenable selonc ce que li afaires estoit alez.
(Le roman de Helcanus, p. 78)

«Pute, fait il, vous i mentes.
N'est pas l'afaire issi aies;
(L'âtre périlleux 2681-82)

Est donques tant la chose alee
Que vous serez a mort livrée,
(Le roman du comte d'Anjou 4008 09)

Side 56

tant est de vos la chose alee
que ma dame ceanz vos set.
(Yvain 1914-15)

Les deux exemples suivants, relevés dans Le roman de Vestoire dou Graal,
montrent que les deux auxiliaires peuvent s'employer, par «commodité
métrique», dans la même construction formelle:

Nouveles leur ha demandées,
comment les choses sunt alees. (1631-32)

Et il li unt trestout conté
comment les choses unt aie. (1699-1700)

2. bruit, cri, novele, renoumee (aler: «se répandre»)

Quer se il i vient, je sai bien
Qu'aie est ton bruit & le mien.
(L'évangile de Nicodème, Manuscrit B, 1355-56)

Par mi la vile en est le cri aie:
(Le charroi de Nîmes 1075)

N'i a celui joie n'en ait,
quant la novele est tant alee
que ele fu a toz contée;
(Lancelot 2422-24)

Dont si grant est la renoumée
De lui par tout le mont alee
Que . . .
(Amadas et Ydoine 1471-73)

3. Nuit, tens, vie (aler: «passer»):

La nuis estoit auques alée.
(L'escoufle 2861)

Molt est ainçois del tens aie
que si travail soient fine.
(Le roman d'Enéas 3117-18)

«Por quoi le ferrés vous. Ja est sa vie alée.
(Doon de Mayence, p. 284)

4. Colp (cops), glaive (aler: «pénétrer»):

Dist Bertram: «Cist colp est mal alé,
(La chanson de Guillaume 3093)

Side 57

Li cops fu granz et par vie feruz, et s'il fust droiz alez, mort l'eiist sans faille;
(Le roman de Tristan en prose, p. 185)

Mes se un po fust alez plus bas li glaive d'où je fui feruz, je fusse morz sans
faille; (ibid. p. 183)

car li glaives fu alez en esclichant, ... (ibid. p. 200)

III. Sujet animé

1. Emploi non-déterminé

L'auxiliaire estre semble obligatoire:

. . . trache tote nueve
De chevax qui aie estoient.
(Le roman de Perceval 3425-26)

«Sire compains, ou iestes vos aléz?»
(Ami et Amile 1898)

Et quant cil voit qu'ele est alée, il la prent et la porte desoz le temple,
(Le roman de Tristan en prose, p. 65)

Aussi avec une expansion finale

II se drecierent et sont alé séir.
(Huon de Bordeaux 2197)

La fame Amile a la clere fasor
Estoit alee por faire s'orison,
(Ami et Amile 3109-10)

Alees erent ses puceles
Por coillir floretes noveles.
(Le roman de Perceval 673-74)

2. Emploi déterminé

A. Détermination non-quantitative

L'emploi de l'auxiliaire estre semble obligatoire

a. Déterminant: adverbe ou locution adverbiale

Eneas est avant alez,
(Le roman d'Enéas 2621)

Aiols li fieus Elie est celé part aies.
(Aiol 9915)

Side 58

Cuntremunt sunt aie tuit trei
Artur et Bedoer e Kei.
(Le roman de Brut 11467-68)

Toutes les gens de Blaivies i sont alé
(Ami et Amile 2448)

Au plus tost que il pot est chele part alé.
(Doon de Mayence 4778)

b. Déterminant : complément prépositionnel:

... la roïne estoit alée a la fenestre, . .
(Le roman de Tristan en prose, p. 113)

Chascun a sun ostel est alé, .
(Guy de Warwick 1864)

A lor tres sunt alé tote la baronnie.
(Le siège de Barbastre 6036)

Desqu'a la porte est alé.
(Guy de Warwick 516)

Un jor estoit li rois aies en bois .. .
(Le roman de Tristan en prose, p. 108)

Vers le mostier sont li baron aie,
(Huon de Bordeaux 1488)

B. Détermination quantitative

La quasi-totalité des exemples avec avoir se trouve dans les constructions à
sujet personnel avec détermination quantitative du verbe aler.

Le déterminant quantitatif le plus fréquemment combiné avec avoir est
tant, soit en antéposition (Tant a alé que ...) soit en interposition (A tant
alé que . ..)

1. a. Tant en antéposition:

Tant unt alét que ore veient
Le leu u il aler deient:
(The voyage of St. Brendan 671-72)

Tant ont aie qu'il vinrent a la chit de Navers.
(Aiol 8176)

Tant a aie de la en ci
Que li quens est mors et honis.
(L'escoufk 2674-75)

Side 59

Tant ont alé qu'a un gué sont
Con claimme le Gué Perilleus:
(Le bel inconnu 322-23)

Tant a alé en tel maniere que il vint en Leonois.
(Le roman de Tristan en prose, p. 63)

L'emploi de l'auxiliaire est re est possible, mais rare:

Tant est alez li Troiens,
qu'il vint es chans Elisiens.
(Le roman d'Enéas 2791-92)

Tant est aie, si con Dex plout.
Qu'il vint au bore ou conversout
Sa famé .. . (La vie de saint Eustace 1527-29)

Tant sont alez que il trouvèrent
La ssente, et illec s'aresterent.
(Le roman du comte d'Anjou 5319-20)

1. b. Tant en interposition:

Ont tant aie qu'a la tor furent,
(Le roman de Perceval 5785)

S'ont tant aie qu'il sont venu
Au riv d'une clere fontaine.
(Guillaume d'Angleterre 1764-65)

Si ont tant aie qu'il comença a ajorner.
(La queste del saint Graal, p. 198)

Si a tant aie que il vint en une prairie petite, . , . (ibid. p. 90)

L'emploi de l'auxiliaire estre est possible, mais rare:

Sont tant aie qu'il vindrent près
d'un fort recet a un baron.
(Yvain 3766-67)

Thideus est ja tant aie
qu'il est ja près de la cité.
(Le roman de Thèbes 1253-54)

Et il estoit ja tant alez que langue mortiex
nel porroit dire ne cuers terriens penser, ..
(La queste del saint Graal, p. 85)

2. Autres déterminants adverbiaux: assez, molí, petit, un poi, trop:

«Sire, vos avez assez alé; ...» (La queste del saint Graal, p. 25)

Side 60

Molt avés hui alé par ceste vile,
(Aiol 2020)

«Amis, u est li reis? Mult l'ai alét querrant! »
(Le voyage de Charlemagne 279)

Petit eurent alé en tel maniere quant il virent tere,
(La fille du comte de Pontieu, p. 23)

Quant j'oi un poi avant alé
Si vi un vergier grant et lé,
(Le roman de la rose 129-30)

Et quant il a un poi alé, si voit que
(La queste del saint Graal, p. 81)

«A foi! fel desloial, vous avez trop alé,
(Doon de Mayence 3524)

3. Déterminants quantitatifs négatifs: ne - gueres, ne -pas gaires, ne -
pas longuement, ne - mie granment, ne - pas granment:

Mez n'oi gueres avant aie
Que senti ma bouete ouverte.
(Le roman du comte d'Anjou 4914-15)

N'a pas gaires aie, quand a veus
Les .1111. robeors a destre en sus.
(Aiol 3025-26)

Mes il n'a pas aie contremont longuement
Que au port est venu, ou passent li auquant.
(Doon de Mayence 2653-54)

II n'a mie granment aie qu'il encontre Tristan et Gorvenal qui . ..
(Le roman de Tristan en prose, p. 191)
II n'ot pas granment aie qu'il ataint le chevalier . . . (ibid. p. 207)

Dans les deux exemples relevés avec l'auxiliaire estre, le déterminant
négatif détermine l'adverbe loing (big):

Ne furent gaires loig aie
Qu'il encontrent un fouc de cers.
(La vie de saint Eustace 138-139)

... ; si ne fu pas granment aie loing qu'il encontra un chevalier armé de toutes
armes, .. . (Erec, p. 95)

4. Déterminant à base substantívale, seul ou déterminé par un numéral
cardinal (ou fractionnel) ou par un adjectif: arbalestee, .11. trais d'arbalestrier,

Side 61

le trait d'un arc, une archie, une huchie, journée, demi lieue, une lieue, quatre
lieues, .XII. lieues, .XV. lieues, .c. lieues, quatre pas, pièce, grant pièce, une
grant pièce:

Quant il orent aie plus d'une arbalestée,
(Florence de Rome 3677)

II nen ot mie aie .11. trais d'arbalestrier
Quant (il) les vit ensemble en un val caploier.
(Aiol 6993-94)

N'ot pas le trait d'un arc aie,
Quant il coisi une capele,
(L'âtre périlleux 748-49)

qu'il n'ot pas une archiee alee quant il vit en une valee tôt seul pasturer un chevrel. (Yvain 3439-41)

N'ot pas aie, je croi, une huchie
Quant sont venu à la selve foillie.
(Huon de Bordeaux 9165-66)

«Tant vous ai de fin cuer longuement enamée Que pour vous ai aie mainte dure journée Et veillé mainte nuit jusqu'à la matinée. » (Doon de Mayence 3689-91)

N'ot pas demie lieue alee
K'i! a une forest trouvée.
(L'âtre périlleux 5485-86)

N'orent pas une lieue alée,
(Erec et Enide 2921)

II n'orent mie quatre lieues aie
Qu'en mi la voie ont un vilain trové.
(Le charroi de Nîmes 874-75)

«Nous avons bien .XII. lieues aie; »
(Huon de Bordeaux 3410)

.XV. grans lieues avaient bien aie.
(ibid. 3431)

Aine qu'il fust jors, on .C. lieues aie.
(ibid. 8621)

N'ot pas aie seul quatre pas
Que le tonbel fu tout ouvert;
(L'âtre périlleux 1148-49)

Side 62

Quant orent aie une pièce,
Li evesques vint a sa nièce;
(Le roman du comte d'Anjou 6433-34)

Et quant il ont grant pièce aie,
S'ont un escuier ancontré,
(Lancelot 2283-84)
Ainssi, comme il orent une grant pièce aie, il virent venir une pucele sus .i.
palefroi blanc grant aleùre; . . . (Le roman de Helcanus, p. 178)

Nous n'avons relevé que deux exemples avec le verbe estre:

Ainz que il fust demie lieue alez
(Ami et Amile 168)

... ; e quant il furent alé deus jornees e il aprismierent a la mer, il troverent une
nef appareilliee, . . . (La vie de saint Eustace en prose, p. 16)

5. Exceptionnellement, aler se conjugue avec avoir quand il est quantitativement
déterminé par un complément prépositionnel introduit par la préposition

Quant a aie par mainte terre,
Par bours, par viles, par citez
Et sainz et saintes visitez
Et faite mainte bêle cure,
Si con Dieu pleut, par aventure
A Romme droit est repairie.
(De la bonne enpereris qui garda loiaument sen mariage 2826-31)

Si a droit la lance et l'escu Com s'il eùst toz jors veschu En tournoimens et en guerres Et aie par toutes les terres Querant bataille et aventure, . .. (Le roman de Perceval 1475-79)

Dans le dernier exemple, c'est probablement l'influence conjointe du complément
prépositionnel introduit par par et du verbe conjugué avec avoir qui
explique le choix de l'auxiliaire.

6. Quand aler est pris transitivement, avec un nom comme voie, sentier ou
país pour complément d'objet direct, avoir semble prendre le pas comme
auxiliaire, mais esire est aussi possible:

Side 63

- «Donc lo je, fet Hestor, que nos aillons autre
voie que celé que nos avons aie.» (La queste del saint Graal, p. 148)
... toute la voye que Eret avoit alee le jour devant; ...
(Erec, p. 166)

Par Rotrout l'arcevesque a celé veie alee.
(Guernes, La vie de saint Thomas Becket 4444)

Si s'en vet un autre sentier que celui qu'il avoit autre foiz aie. (La queste del
saint Graal, p. 141)

Mes je cuit qu'ainçois qu'il le truisse en avra maint païs cerchié, maint aie, et maint reverchié, ainz que nule novele an oie. (Lancelot, 6410)

Exceptionnellement, on trouve l'auxiliaire estre:

. .., tu ne retornas pas ala voie que tu estoies devant aie, ... (La queste del
saint Graal, p. 144)

7. Coordonné avec un autre verbe, aler se conjugue le plus souvent avec
l'auxiliaire avoir. Il est possible que se fasse sentir, dans ces cas, l'influence
d'un déterminant quantitatif:

a) venir et aler [ aler et venir

Tote nuit a Guillaumes et venu et aie
(Le siège de Barbastre 7049)

Cis a servi ce povre ménestrel
Et en mains lieus a venu et aie;
(Huon de Bordeaux, 7579-80)

Quant voit que faire le convient A la nonain plorant revient Et tout li conte mot a mot Comment aie et venu ot. (G. de Coincy, Les miracles de nostre Dame IV, p. 391)

L'emploi de estre est possible:

En maintes terres iéz venus et aléz.
(Ami et Amile 92)

b) aler et retourner

Tant a et sus et jus aie et retourné,
(Doon de Mayence 945)

c) cherquier et aler

Tant ont parmi le bois et cherquié et aie
Que la nuit les sousprent, si s'en sont retourné.
(Doon de Mayence 111;

Lors a parmi le bois et cherquié et aie,
(ibid. 1804)

Side 64

Bien que le principe d'analyse appliqué semble expliciter les mécanismes décidant, dans la grande majorité des cas, du choix des deux auxiliaires avec aler, nous sommes loin de prétendre qu'il résolve tous les problèmes posés par nos textes. La difficulté signalée par Foulet, à savoir «qu'on trouve aler tantôt avec estre, tantôt avec avoir, et cela dans les mêmes œuvres, parfois à quelques vers d'intervalle» subsiste, sinon entière, du moins en partie. Voici les deux exemples relevés dans Le vair palefroi, que cite Foulet:

Li palefrois qui engrés
fu d'aler la ou il devoit
a tant alee s'ambleure
que venuz est grant aleiire
au chef de celé forest grant. (1098-1103)

Li vairs palefrois a droiture
/ est alez, qui le gué sot; (1106-07)

On constate que la distribution des auxiliaires s'éclaire dans la perspective d'analyse que nous venons de proposer: l'emploi Savoir, dans le premier exemple, s'explique par la présence du déterminant quantitatif tant ; l'emploi à'estre, dans le deuxième exemple, s'explique par la présence du déterminant non-quantitatif /.

Ayons pourtant le courage d'avouer que le problème évoqué par Foulet
n'est pas résolu pour autant. Voici deux exemples relevés dans La mule sans
frein:

Tant a aie par lou rivage
Que par aventure a trovee
Une planche ne gaires lee; (238-40)

Tant est alez par lou rivage
Que il a la planche trovee. (402-03)

Ici, le contexte pertinent est rigoureusement le même, les déterminants sont identiques, et il ne s'agit pas d'une «commodité métrique». Il suffit de constater que dans les deux cas il s'agit de tant, un des rares déterminants quantitatifs qui admette l'emploi des deux auxiliaires. Le système de distribution proposé par nous, bien qu'assez régulier et discipliné, semble donc laisser une certaine marge à l'arbitraire, marge qui ne devrait pas trop décourager le grammairien conscient du fait que l'un des traits caractéristiques de sa science est qu'elle ne dise jamais tout: Grammaticae est non omnia dicere.

Helge Nordahl

Oslo

Side 66

Résumé

Dans le petit article que l'on vient de lire, l'auteur a essayé de montrer que la distribution des auxiliaires estre et avoir pour former les temps composés du verbe aler n'est pas aussi arbitraire que le laissent en général sous-entendre les grammairiens. Deux facteurs semblent déterminer conjointement le choix de l'auxiliaire: le caractère du sujet et la détermination quantitative du verbe. Si le sujet est impersonnel ou inanimé, l'auxiliaire estre semble obligatoire. Si le sujet est animé, et le verbe est non-déterminé ou déterminé par un déterminant non-quantitatif, estre semble toujours obligatoire, tandis que l'auxiliaire avoir ne semble préféré que dans les cas où le sujet est animé et où le verbe est déterminé par un déterminant quantitatif.

Bibliographie des textes cités

Dans la série : Les classiques français du moyen âge

La queste del Saint Graal

Lancelot

Ami et Amile

Le siège de Barbastre

La fille du comte d'Anjou

La vie de Saint Eustace (vers)

La vie de Saint Thomas Becket

Dans la série : Société des Anciens textes français

L'évangile de Nicodème

La chanson de Guillaume

Le roman de Brut

Dans la série: Textes littéraires français

Le roman d'Helcanus

Les miracles de Nostre Dame IV

Dans la série: Les Anciens poètes de la France

Huon de Bordeaux

Doon de Mayence

Beneit, La vie de Thomas Becket. Gleerup - Munksgaard, Lund - Copenhague.

De la bone enpereris . . . Helsinki 1953.

La mule sans frein. The Scottish Académie Press, Edinburgh and London 1972.