Revue Romane, Bind 11 (1976) 1

Sur L'lmmoraliste d'André Gide: titre, unités de signification, discours d'auteur, mise en abyme

par

Walter Geerts

Une approche sémantique d'un discours littéraire se situe dans le cadre de Thypothèse que la linguistique peut fournir des éléments à une théorie de représentation adéquate que l'étude descriptive de la littérature est en train de se construire. Le souci fondamental de cette théorie est la formalisation entendue comme la mise en place de définitions univoques permettant d'énoncer des théorèmesl. Le caractère hypothétique est évident. D'une part, on n'a pas manqué de mettre en doute la valeur explicative de la linguistique quand il s'agissait de rendre compte de textes littéraires2. D'autre part, tenant compte des multiples niveaux de manifestation du texte littéraire (linguistique, communicatif, cognitif, sociologique, psychanalytique, anthropologique, e.a.) et de la différence de leurs systèmes respectifs - unités d'analyse, e.a. -, la revendication qu'une description linguistique soit à même d'instaurer une relation d'homologie entre tous ces niveaux peut, en effet, sembler exagérée.

Moins outrée pourtant est la thèse suivant laquelle la sémantique linguistiqueserait capable de distinguer entre le niveau de signification et le niveau d'interprétation. Tandis que le premier type de signification3 appartientà la linguistique, le second dépasse celle-ci et acquiert toute son importancedans



1: L'opinion qui veut que la formalisation n'ait aucune prise sur les textes littéraires repose sur le malentendu qui associe formalisation à quantification. Les deux opérations se situent à des niveaux différents: la première est d'ordre épistémologique et propre à tout énoncé contrôlable, la seconde est d'ordre technique et intervient dans la description d'un nombre relativement peu élevé de faits littéraires (p.ex. la théorie du vers).

2: K. Togeby, Linguistique et littérature, in: Orbis Litterarum 22 (1967), pp. 45-48.

3: Nous l'avons appelé signification minimale dans La lecture comme performance : psycholinguistique et communication littéraire fin : Actes du ler Congrès de l'Association Internationale de Sémiotique, Mouton, à par.). Cf. aussi, pour une application à un autre fait littéraire, notre étude intitulée L'épigraphe ou l'exergue intégré: contribution à une sémantique littéraire (in: Orbis Litterarum, à par).

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portancedansl'analyse de textes littéraires. Ainsi, le domaine de la significationcouvre celui des sèmes et des classèmes: des sèmes grammaticaux, à extension élevée, tels que [¿animé], [+ humain], etc. jusqu'aux sèmes référentiels de la lexicologie; il s'arrête dès que les investissements sémantiquesne se justifient plus textuellement ou contextuellement. Le domaine de l'interprétation comprend entre autres les traductions en un discours préconstruit tel que celui de la psychanalyse, de la sociologie ou de l'anthropologie(cf.

C'est le premier niveau de signification que notre analyse de Ulmmoraiiste
voudrait atteindre.

Pourquoi avoir choisi l'analyse du contenu? La théorie sémantique contemporainel'oppose en effet à une approche plus syntaxique de la signification.La première, associée généralement à une sémantique lexématique, part d'une conception de la signification comme préprogrammée à partir de structures logiques. Son but est d'arriver à des unités minimales de signification,à des sèmes, qui constituent une liste finie de symboles représentatifs définis par interdépendance et régis par une syntaxe non arbitraire, établie à partir d'observations linguistiques. La seconde s'applique dans la sémantiquegenerative : un seul type de règles, la transformation à fonction sémantico-syntaxique,subsiste et le lexique n'est plus une donnée primaire vu qu'il existe des transformations prélexicales. Il ne serait pas difficile de montrer que, aussi bien dans les Aspects of the Theory of Syntax de Chomsky4 que dans certains textes des sémanticiens générativistess, une analyse du contenu



4: Nous avons eu l'occasion de l'exposer dans une communication à l'Ecole Pratique des Hautes Etudes au cours du séminaire de «sémantique structurale» du Prof. A. J. Greimas (le 7 février 1974). Quand il s'agit de représenter la sous-catégorisation de catégories syntaxiques, Chomsky recourt à la représentation matricielle empruntée à la phonologie: une entrée à la colonne n et au rang m d'une telle matrice indique comment le segment n est spécifié par rapport au trait m. «Ces conventions, qui peuvent être simplifiées et généralisées par des moyens quine nous concernent pas, permettent d'appliquer des règles à n'importe quelle classe de segments spécifiée par une combinaison donnée de traits. Ces notions peuvent être adaptées à la représentation de catégories lexicales et de leurs membres» (. . .) (N. Chomsky, Aspects of the Theory of Syntax, Cambridge, Mass., MIT Press, 1965, p. 82 sq; nous traduisons). Cette adaptation n'est pas explicitée cependant. L'agrammaticalité de Jean scia la princesse vis-à-vis de la phrase grammaticale Jean scia la planche s'explique par la violation d'une restriction sur le NP-objet qui exige le trait [-animé]. L'établissement de la série ordonnée de traits sémantiques, hiérarchiquement dépendant de [-animé], constitue l'objet de l'analyse du contenu entendue dans le sens de l'articulation de informe du contenu (Hjelmslev): Jean scia la fleur est en effet aussi agrammatical que notre premier exemple.

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est présupposée. Il semble donc que, plutôt qu'une scission, une convergence
est en vue, qui justifierait l'application de l'analyse du contenu dans cette
analyse.

La séquence Ulmmoraliste se compose d'un introducteur - article défini - et d'un nom d'agent. L'article défini, dont la fonction principale est de référer à l'instance référentielle présentée antérieurement dans le discours, semble acquérir des caractéristiques particulières dès qu'il se trouve au début de celui-ci, comme c'est le cas dans le titre. Au lieu de reprendre une information déjà fournie, l'article défini, dans un titre comme Vlmmoraliste, renvoie à une information contenue dans le corps du texte. Il est difficile dès lors de distinguer nettement les deux sens générique et singulier que la combinaison de l'article défini et du nom d'agent peut prendre6; d'autant plus difficile que la fonction de référence à un élément déjà donné semble étrangère à l'emploi générique de l'article défini7. L'analyse montrera que cette ambiguïté dans le titre ne fait que refléter une ambivalence, dans le récit, quant à l'identité du personnage principal.

L'analyse morphologique du nom d'agent immoraliste ne va pas non plus sans problèmes. Le thèmeß immoraliste se divise en dérivatif + racine + dérivatif; en d'autres mots, deux dérivatifs déterminent une racine. Or, si le thème impraticable par exemple présente la même division, la différence morphologique est évidente : la racine pratique admet le suffixe - praticable - mais n'admet pas le préfixe - impratique* - de sorte qu'une hiérarchie morphologique s'instaure: {im - [(praktik) - able]}. La lexicographie montre



5: Cf. notre compte rendu du volume collectif W. Abraham, R. Binnick, Generative Semantik (Frankfurt, Athenâum, 1972, = Linguistische Forschungen 11) in: Linguistics 150 (avril 1975) pp. 83-93.

6: Le caractère indécis de la distinction est confirmé par G. Guillaume (Particularisation et généralisation dans le système des articles français, in : Le français moderne, avril-juillet 1944, - article repris dans id., Langage et science du langage, Paris, Nizet, 1969, pp. 143-156). Au niveau des faits de langue, «l'article le (...) symbolise le mouvement par lequel la pensée prenant son départ au singulier déjà atteint s'en éloigne et tend, (...) vers l'infinitude de la vision universelle» (p. 146). Au niveau des faits de discours une fixation a lieu dans ce mouvement de généralisation inhérent à le. Le discours L'homme était entré situera l'article à l'extrême début du mouvement allant du singulier à l'universel, tandis que L'homme est mortel le fixe à un moment d'universalité.

7: La phrase générique Le soldat meurt au champ d'honneur peut être remplacée par Un soldat meurt (...); or, l'article indéfini ne réfère pas à un élément déjà présenté.

8: La terminologie est celle de K. Togeby, Structure immanente de la langue française (Pans, Larousse, 1965) p. 92.

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que cette hiérarchie est aussi sémantique: «praticable (...) Io Qu'on peut mettre à exécution (.. .)»9 et «impraticable (...) Io Qu'on ne peut mettre à exécution (.. .)»10; la négation dans la seconde définition porte, en effet, sur le groupe thème + suffixe. Dans le cas de immoraliste on pourrait être tenté de dire que la racine moral admet à la fois immoral avec préfixe et moraliste avec suffixe. Une analyse morphologique nous révèle cependant que les racines respectives de immoral et de moraliste ne sont pas identiques: immoral a une racine adjective moral, et moraliste est formé à partir d'une racine substantive moralell. La racine de immoraliste n'apparaît donc pas de façon évidente. Nous montrerons plus loin que le lexème immoraliste peut être considéré comme une formation néologique à partir de moraliste, à cause de la régularité dans la cooccurrence contextuelle. A ce stade-ci nous pouvons postuler le néologisme à un niveau moins articulé, celui des racines: s'il est vrai que immoraliste est formé sur moraliste, où le suffixe -iste s'agglutineà la racine substantive morale, la racine de immoraliste est immorale*, laquelle n'est pas réalisée en lexème substantif isolé par le lexique. Il semble donc que la lecture adéquate du titre soit immorale-iste et non pas im-moraliste:cette dernière restait en effet possible dans le cas d'une affixation sur racine adjective et aurait posé avec acuité le problème de la hiérarchie sémantique.

Examinons d'abord le suffixe / -iste /. Les grammaires historiquesl2 sont d'accord pour situer aux 19e et 20e siècles la plus grande extension du suffixed'adjectif/ -iste / servant à forger des noms d'agent à partir d'un nombre de mots-racines toujours croissant. J. Duboisl3 précise que «dès le début du 20e siècle l'apparition simultanée d'un mot en -isme et d'un mot en -iste, unis par un lien de motivation réciproque, se fait plus fréquente.» Sur le plan de la signification, le suffixe désigne, selon Nyrop, «un homme qui, de quelque manière, s'occupe de ce qui est indiqué par le radical, en le fabriquant, en le produisant, en le professant, en le cultivant. » (nous soulignons).Meyer-Lübke indique: «(. . .) mit -iste verbindet sich der Begriff



9: Le Petit Robert, p. 1368/B.

10: id., p. 877/B.

11: id., p. 871/B et 1112/B.

12: Kr. Nyrop, Grammaire historique de la langue française (Copenhague, Gyldendalske Boghandel Nordisk Forlag, 6 vol., t. 111, 2e éd. revue, 1938), pp. 161-167. W. Meyer-Lübke, Historische Grammatik der Franzôsischen Sprache (Heidelberg, Cari Winter Universitàtsverlag, 2 vol., t. 11, 1966), pp. 36-38.

13: J. Dubois, Etude sur la dérivation suffixale en français moderne et contemporain (Paris, Larousse, 1962), pp. 44-45.

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einer geistigen Beschâftigung, einer hôheren Ausbildung und daher zumeist auch einer hôheren gesellschaftiichen Stellung. Das ganz eigentliche Gebiet von -iste, bleiben aber natiirlich die Wissenschaften, Kiinste und die Politik: wer sich mit einem Gegenstànde spezielle beschàftigt, wer eine bestimmte kiinstlerische Richtung verfolgt, wer sich einer politischen Partei, einer politischenPersònlichkeit anschliesst, ist ein -iste.» (nous soulignons). J. Dubois conclut :«(...) dans la deuxième moitié du 19e siècle le vocabulaire politique et social use de plus en plus fréquemment du suffixe -iste pour former des mots désignant les partisans ou les adeptes d'une doctrine sociale et politique.» (nous soulignons).

L'accord des différentes grammaires historiques permet d'affirmer que le suffixe -iste, à condition de former un couple avec un -isme correspondant, tout au moins au début du 20e siècle - époque de la parution de U Immoraliste ~ est lié à la notion de programme, d'attitude philosophico-morale commune à plusieurs personnes qui la suivent et la pratiquent : un immoraliste professe la doctrine de Y immorale comme programme à destination générale, supra-individuelle. L'enseignement des différentes grammaires historiques nous autorise à poser les deux sèmes GÉNÉRALITÉ - postulé à partir de gesellschaftiichen {Stellung), société, {vocabulaire) social, {doctrine) sociale - et PROGRAMME - postulé à partir de professant, {gesellschaftiichen) Stellung, Richtung verfolgt, anschliesst, partisans, adeptes, doctrine {sociale) - comme inhérents au suffixe -iste dans les conditions où celui-ci apparaît dans le titre.l4 La description du lexème moraliste par rapport à celle du lexème morale posera moins de problèmes au lexicographe en raison de la charge sémique stable du suffixe et de la possibilité de référer pour la description de moraliste au lexème morale. Il apparaît donc, dans le cas d'une séquence hors-contexte comme celui du titre, qu'une description partant de la signification du suffixe, indépendante du contexte, offre plus de garanties de rigueur qu'une description partant de la racine morale - ou immorale qui en dérive - fortement déterminée par le contexte.

Nous proposons dès lors, devant la sollicitation du titre, de repérer dans
le texte les occurrences du sème PROGRAMME en indiquant si celui-ci
répond au sens du titre.



14: Une transcription logique donnerait la définition lexicographique suivante: ix[l(x)] 3 x VEUT que p p = le PROGRAMME est GÉNÉRAL où I représente le prédicat itnmoralmte, x une penatine, p une proposition régie par la modalité vouloir.

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Le programme de Michel, le protagoniste, se formule sous des formes multiplesls; la plupart attestent cependant un refus de l'applicabilité générale du programme. Quand il dit «je suis protestant ...» (373)16 il se modère aussitôt: «mais je croyais l'être si peu» (ib.). La morale, s'il en parle, est détournée de son objet propre :

«Le grave enseignement huguenot de ma mère s'était (...) effacé en mon cœur. (...) Je ne soupçonnais pas encore combien cette première morale d'enfant nous maîtrise (...). Cette sorte d'austérité dont ma mère m'avait laissé le goût en m'en inculquant les principes, je la reportai toute à Vétude.» (373; (nous soulignons)

Le trait commun que présentent les premières définitions du programme, sous différentes manifestations lexématiques, consiste en une recherche constante du moi authentique: «(...) je prétendis découvrir: l'être authentique (...)» (398). La métaphore du palimpseste matérialise ces tentatives de formulation du sujet qui «se livre voluptueusement à lui-même» (399): «II fallait laisser le temps, aux caractères effacés, de reparaître, (...)» (399). Défini d'abord négativement, le programme atteint la forme, non définitive, d'une morale de l'individu et de sa spécificité inaliénable :

«Mon seul effort, effort constant alors, était donc de systématiquement honnir ou supprimer tout ce que je croyais ne devoir qu'à mon instruction passée et à ma première morale. (...)» (399; nous soulignons) «(...) la conscience de ma valeur propre: ce qui me séparait, me distinguait des autres, importait: ce que personne d'autre que moi ne disait ni ne pouvait dire, c'était ce que j'avais à dire.» (424; nous soulignons)

La préoccupation de Michel ne s'étend pas au-delà de sa propre personne. S'il utilise le langage de la philosophie avec son vocabulaire, ses autorités, sa rhétorique et même sa syntaxe, il prend soin, systématiquement, de lui enlever sa valeur générale. Le moi remplace le système philosophique auquel



15: La localisation du sème PROGRAMME présuppose une analyse sémantique des différents lexèmes où il se réalise. A défaut de cette lexicographie linguistique, les articles des dictionnaires peuvent servir d'indicateurs sémiques. La régularité lexématique de leur appareil descriptif permet de reconnaître comme des manifestations du sème PROGRAMME, des lexèmes tels que religion, morale, principe, stratégie, volonté, prétendre, leçon, éthique, etc. Le détail de cette procédure est décrit dans un mémoire présenté à l'Université de Gand (septembre 1971) que nous avons allégé de sa technicité.

16: Les chiffres entre parenthèses, derrière les citations, renvoient à André Gide, Romans. Récits et Soties. Œuvres lyriques (Paris, Gallimard, 1958 = Bibliothèque de la Pléiade).

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remontent cependant des expressions figées telles que vivre selon + (tendance
philosophique), transformées comme suit :

«J'avais vécu pour moi ou du moins selon moi jusqu'alors; (. . .)» (375; nous
soulignons).

Le vocabulaire de la morale, utilisé explicitementl7, encadre de sa généralité
un égotisme aigu:

«(...) j'organisai ma stratégie. Pour un temps, seule ma guérison devait devenir
mon étude; mon devoir, c'était ma santé; il fallait juger bon, nommer Bien (en
italiques dans le texte), tout ce qui w'était salutaire, (...)» (384; nous soulignons).

L'éthique de Michel, quant à son contenu, n'est pas seulement une apologie
de l'individulB, elle est aussi présentée comme la doctrine d'un seul
adepte:

«(...) je me plaisais autour de moi à régler et à ordonner toutes choses, je m'éprenais de plus en plus de l'éthique fruste des Goths, (...) je m'ingéniais laborieusement à dominer sinon à supprimer tout ce qui la pouvait rappeler autour de moi comme en moi-même.» (418; nous soulignons)

Les références à des philosophies établies sont entourées de réflexions personnelles. Quand, se croyant condamné par la maladie, Michel embrasse le stoïcisme, il ne manque pas d'ajouter: «(...) en trouvant suffisamment beau mon stoïcisme.» (379, nous soulignons). Guéri, il conserve, «comme Descartes, une façon provisoire d'agir» (403; nous soulignons) là où le Discours de la Méthode parle d'une «morale par provision qui ne consist(e) qu'en trois ou quatre maximes, (...)».19 Jusqu'à l'aphorisme (où, par excellence, s'exprime la prescription générale de la morale), qui est dévié vers une définition de l'être authentique :



17: Le Bien du passage suivant se trouve en italiques et avec majuscule dans le texte. Les premières signalent une citation d'un autre discours que la seconde aide à identifier comme le discours moral au centre duquel se trouve le bien suprême.

18: La citation du Bien moral, interprété comme le bien commun dans une perspective comtienne d'altruisme, en devient d'autant plus ironique. La prédominance des doctrines démocratiques et humanitaires à l'époque est confirmée par H. Lichtenberger dans son étude La Philosophie de Nietzsche (Paris, F. Alean, 1898, p. 178): «( . .) l'immense majorité des hommes civilisés parle aujourd'hui, sinon en fait et par ses actes, du moins en théorie, par les doctrines qu'elle professe, en faveur de la morale du «troupeau»».

19: R. Descartes, Œuvres Choisies (Paris, Garnier, 1950) t. I, p. 20.

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«- Mais, mon ami, répondait Marceline, vous ne pouvez demander à chacun
de différer de tous les autres. - Plus ils se ressemblent entre eux et plus ils diffèrent
de moi. »20 (423 ; nous soulignons)

Peu avant la rencontre avec Ménalque, l'éthique de Michel atteint la
formulation du programme universel :



20: L'aphorisme reste une figure de style ou genre littéraire mal défini: il se situe probablement sur le double niveau de l'expression et du contenu, et se caractérise à chaque niveau par le parallélisme (syntaxique et sémantique) entre les différentes parties qui le constituent. Dans l'exemple cité, le parallélisme entre les deux parties plus ils se ressemblent entre eux et plus ils diffèrent de moi s'établit, d'une part, au niveau syntaxique, par la construction plus .. . plus ... et par l'identité dans la composition Sujet - Verbe - Complément, au niveau sémantique; de l'autre, par l'opposition se ressemblent VS diffèrent et eux VS moi. - Le problème de l'aphorisme soulève en même temps celui de la présence, dans Vlmmoraliste, de l'œuvre de Nietzsche qui pratique l'aphorisme en tant que genre littéraire {Aurore, La gaie Science). Au niveau chronologique, les données définitives, bien que non décisives, ont été fournies par R. Lang {André Gide et la pensée allemande, Paris, 1949) et W. Holdheim {The young Gide's reaction to Nietzsche, in PMLA, 1957, pp. 534-544). Il est difficile de déceler dans ces écrits (de Gide e.a.) la part directe de Nietzsche, car les idées du philosophe allemand avaient pénétré en France avant même que ses livres aient été traduits et trouvèrent dans le milieu de Gide un accueil particulièrement chaleureux. (...) les jeunes revues, l'Ermitage, la Revue Blanche, le Mercure de France et le Banquet Facclamèrent(-elles) dès 1891, (...) la « Lettre à Angele » sur Nietzsche (...) publiée dans L'Ermitage en i 899 (...) commente l'œuvre entière du philosophe et fait preuve d'une excellente connaissance de sa bibliographie en France. (...) Gide savait suffisamment l'allemand pour ne pas dépendre d'Henri Albert, dont la première traduction d'un ouvrage complet de Nietzsche parut en 1898 (...); il est certain (...) que Gide avait dû rencontrer le philosophe allemand dès 1892 ou 1893. (...)» (R. Lang, o.c, pp. 82 sq.). Au niveau des rapports textuels cependant, on en est toujours à l'hypothèse d'H. Drain: «On serait pourtant tenté de faire de U Immoraliste un roman nietzschéen.» {Nietzsche et Gide, Paris, 1932, p. 178). Une lecture parallèle, non systématique pourtant, nous a fait rencontrer les correspondances suivantes : je fis de ma volonté de guérir, de vivre, ma philosophie (Frédéric Nietzsche, Ecce Homo, dans H. Lichtenberger, F. Nietzsche. Aphorismes et fragments choisis Paris, F. Alean, 1899, p. 162) et seule ma guérison devait devenir mon étude (384); ces philosophes, leur devise est «celui qui possède est possédé» (F. Nietzsche, La Généalogie de la morale, trad. par H. Albert, Paris, Mercure de France, 1900, p. 189) et On croit que l'on possède et Von est possédé (120). Une description parallèle de l'utilisation de l'aphorisme chez Nietzsche et dans L1 Immoraliste mettrait au jour, d'une part, des procédés de construction parallèles, et d'autre part, dans le texte gidien, des zones de grande densité aphoristique, correspondant probablement aux conversations avec Ménalque.

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«(...) appliquant mon rêve à la vie, je me construisais une éthique qui devenait
une science de la parfaite utilisation de soi par une intelligente contrainte.»
(410; nous soulignons)

Nous y retrouvons cependant les traces de l'ambiguïté antérieure : je me construisais dénote une élaboration originale et individuelle à partir de mon rêve. Les lexèmes éthique et science, par ailleurs, ainsi que la construction impersonnelle (soi) et l'article défini (la vie) marquent un pas vers la généralité.

Cette évolution est accélérée par les conversations avec Ménalque où
celui-ci professe sa foi (428). Egocentrique au début:

«Je ne peux pas dire que j'aime le danger, mais j'aime la vie hasardeuse et veux qu'elle exige de moi, à chaque instant, tout mon courage, tout mon bonheur et toute ma santé. (...) Je ne prétends à rien qu'au naturel, et, pour chaque action, le plaisir que j'y prends m'est signe que je devais la faire.» (428, 431; nous soulignons),

l'exposé prend résolument le ton général:

«(...) si tous ceux qui nous entourent pouvaient se persuader de cela. Mais la plupart d'eux pensent n'obtenir d'eux-mêmes rien de bon que par la contrainte; (...) C'est à soi-même que chacun prétend le moins ressembler. Chacun se propose un patron, (...) Il y a pourtant, je crois, d'autres choses à lire dans l'homme. (...) Lois de l'imitation, je les appelle: lois de la peur. On a peur de se trouver seul; et Von ne se trouve pas du tout. Cette agoraphobie morale m'est odieuse; (. . .) Ce que Von sent en soi de différent, c'est précisément ce que l'on possède de rare, ce qui fait à chacun sa valeur ;(...)» (431 ; nous soulignons).

Deux aphorismes parfaits, Lois de Vimitation, lois de la peur et On a peur de se trouver seul', et Von ne se trouve pas du tout2l, ajoutent le poids de leur généralité (lois, les impersonnels on, chacun) à la valeur supra-individuelle (ceux qui nous entourent, l'homme, on, chacun) du programme moral de ce paragraphe. Ces lignes corrigent en outre, par leur généralité, certaines phrases antérieures de Michel: C'est à soi-même que chacun prétend le moins ressembler reprend et corrige par l'impersonnel l'exclamation de Michel Plus ils se ressemblent entre eux et plus ils diffèrent de moi (423). Quand Michel disait (. . .) la conscience de ma valeur propre: ce qui me séparait, me distinguait des autres, importait (...) (424), il anticipait, en tant qu'individu,



21: En plus de la construction et des lexèmes symétriques, le second aphorisme joue sur l'ambivalence de se trouver: signifiant, dans le premier membre, être dans un état, dans le second membre ce lexème a le sens de découvrir sa véritable personnalité.

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la règle générale de Ménalque: Ce que l'on sent en soi de différent, c'est précisémentce que l'on possède de rare, ce qui fait à chacun sa valeur. La phrase la plupart d'eux pensent n'obtenir d'eux-mêmes rien de bon que par la contraintecondamne littéralement Y éthique de Y intelligente contrainte (410) que Michel s'était construite.

Aussi Michel continue-t-il dans cette voie tracée par Ménalque :

«(...) ma nouvelle question: Qu'est-ce que Vhomme peut encore? (...) Ce
que Vhomme a dit jusqu'ici, est-ce tout ce qu'il pouvait dire? N'a-t-il rien
ignoré de lui? Ne lui reste-t-il qu'à redire? (...)» (457; nous soulignons)

et il quittera le récit, muni d'une doctrine:

«(. . .) je (Marceline) comprends bien votre doctrine - car c'est une doctrine à
présent. (...) elle supprime les faibles.
- C'est ce qu'il faut, répondis-je aussitôt malgré moi.» (459; nous soulignons)

Nous avons relevé au début l'ambiguïté du titre L'lmmoraliste : générique ou particulier, la réponse revient au lecteur dans la mesure même où la responsabilité du procédé incombe à l'auteur. Le fait est que l'œuvre admet les deux interprétations. D'une part, Michel et Ménalque, tous les deux, parviennent à définir un programme général, ce qui mènerait vers une lecture générique; d'autre part, Michel n'atteint la formulation universelle qu'après les leçons de Ménalque, ce qui autoriserait une lecture particulière du titre, synonyme de p. ex. «Ménalque». Cette façon de titrer se distingue donc nettement de celle - p. ex. dans Adolphe - où une relation biunivoque s'établit entre le titre et l'ensemble des personnages du récit : par leur caractère de référence unique, les noms propres constituent des exemples privilégiés de ce type de titre. L'originalité du procédé gidien est bien illustrée par la comparaison avec, par exemple, L'Avare. En tête d'un texte où un seul protagoniste apparaît, un tel titre réussit à désigner, en plus de l'individu - que désignerait aussi un titre «Harpagon»22 -la catégorie ou le type que celui-ci représente. Gide, allant plus loin, a introduit cette ambivalence au



22: La situation du titre dans une autre comédie de Molière est symptomatique à ce point de vue. «Tartuffe» est un nom propre emprunté par Molière à la comédie italienne, où il désignait le personnage de l'imposteur. Introduit dans la comédie française du même nom, ce terme subit la transformation suivante: d'une part, il continue à désigner le personnage de l'imposteur, d'autre part, il commence à caractériser, en outre, la catégorie entière des imposteurs, ce qui amène Molière à intituler sa pièce «Le Tartuffe ou l'imposteur», formulation tautologique, où le premier Le rend redondante la formule d'explication ou . . . .

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cœur23 du récit où deux personnages se disputent l'accession au titre: si
l'auteur avait intitulé son roman «Michel», il n'aurait pas pu l'appeler
«Ménalque».

Le procédé gidien a été obtenu par la transformation d'un modèle de titre très répandu au 18e siècle: {Nompropre) + ou ~\- (Formule explicative). Citons ces deux exemples, parmi tant d'autres: Emile ou F éducation, Candide ou V optimisme^. De (A) «M. ouYimmoralisme» on obtient ainsi (B) «\Jlmmoraliste ». La formule explicative - immoralisme - du modèle de base (A) a été conservée dans la formule effective (B) par la présence d'un radical identique - immorale - et d'un suffixe -iste dérivé de -isme. Dans (B) la majuscule - Immoraliste - combinée au morphème de personne -iste équivaut au nom propre, explicite dans (A).

Dans (A) le morphème de coordination ou rend explicite la présence du
discours de l'auteur2s. Or, celle-ci est confirmée, au niveau stylistique, par
l'apparition, toujours dans le titre, d'un néologisme.

Immoraliste n'est pas repris par Littré : or de multiples passages du Journal de Gide montrent que le jugement du lexicographe était décisif pour la correction de ses œuvres26. Pourtant, immoralisme est attesté à partir du milieu du 19e siècle, et immoraliste, dans la fonction de nom, semble figurer pour la première fois dans Les Diaboliques (1874)27. Cette dernière attestation vaut d'être reprise puisqu'on y voit apparemment la création d'un néologisme par écho :



23: J. Hytier, André Gide (Alger, Chariot, 1938), p. 184: «Dans Vlmmoraliste, la guérison de Michel est un allegro sauvage auquel répond la marche à la mort, l'agonie poursuivie de Marceline; entre ces deux parties, montante et descendante, il y a comme un palier formé par les expériences de Michel dans une vie régulière ; mais cette partie centrale est elle-même composée comme l'ensemble: les essais de Michel propriétaire et son dégoût naissant de la propriété encadrent les entretiens exaltants avec Ménalque qui décident de l'orientation du héros. »

24: Le titre du récit de Voltaire présente une analogie formelle avec «L'lmmoraliste» dans l'emploi du suffixe: -isme et -iste sont corollaires. Au niveau de la signification interprétative l'analogie se confirme: Candide, illustration parodique de la théorie leibnizienne de l'optimisme; L'lmmoraliste, d'après plusieurs critiques, expérience littéraire de l'immoralisme nietzschéen.

25: Le morphème de coordination ou fait partie de ce que E. Benveniste a appelé ïappareil formel de renonciation (in: Langages 17, mars 1970, pp. 12-18). Il est, en effet, un des indices spécifiques par lesquels le locuteur énonce sa position de locuteur.

26: A. Gide, Journal (Paris, Gallimard, 1951 = Bibliothèque de la Pléiade, 1.1, p. 241 ; t. 11, pp. 145,343, 1195).

27: R. Bray, «Immoraliste», in Le Français Moderne, juillet 1953, n° 3, p. 177.

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«(...) le vieux médecin, le vieux (sic) observateur, le vieux moraliste ... ou
immoraliste - (reprit-il, voyant mon sourire), - est déconcerté par le spectacle
auquel il assiste depuis tant d'années, (...)».

Les signes typographiques - points de suspension, et l'incise - reprit-il, voyant mon sourire - sont des indices qui renvoient à la situation d'énonciation d'une personne particulière, condition de l'apparition d'un néologisme. Il s'agit cependant d'un néologisme provoqué par le contexte : l'occurrence de moraliste dans le contexte immédiat avec lequel le terme immoraliste est en relation syntaxique de coordination - ou - a sollicité l'apparition de immoraliste selon le système de formation des contraires à l'aide du morphème in-. Il est à noter que dans aucune occurrence relevée par Robert les termes immoralisme et immoraliste n'apparaissent isolément. Ils ont chaque fois, dans leur contexte immédiat, ou moralisme ou moraliste. En termes de sémantique structurale, on pourrait dire que, sur le modèle du couple existant moralité - immoralité, Barbey d'Aurevilly a actualisé une possibilité fournie par le système linguistique du français - une case vide - en écrivant immoraliste, par opposition au terme moraliste, attesté depuis la fin du 17e siècle. La singularité du titre gidien a été remarquée d'ailleurs par Rachilde dans une livraison du Mercure de France (juillet 1902) contemporaine de la parution de Ulmmoraliste: «(...) Je ne veux pas davantage m'arrêter à la subtilité de son titre : Y immoraliste, qui fait songer à la dangereuse possibilité des moralistes, (...)» (nous soulignons).

En dehors du titre, d'autres caractéristiques de l'organisation romanesque renvoient explicitement à la présence d'une instance d'énonciation, d'un auteur. C'est le cas notamment des correspondances textuelles, relevées plus haut, entre les discours de Michel et de Ménalque. Il s'agit là de citations internes partielles qui marquent le tournant décisif vers l'établissement d'un programme général. Le sujet, inavoué, de ces citations ne peut être que l'auteur.

Les deux phénomènes - ambivalence du titre, citations internes - pourraientêtre subsumés sous un type d'agencement global que l'auteur luimême,parlant d'œuvres antérieures, a défini mise en abyme2B. Dans les deux cas un élément de l'œuvre réapparaît dans celle-ci même et puise dans cette



28: A. Gide, o.c, p. 41 - une analyse du procédé pictural de la composition en abîme telle qu'elle est appliquée dans Les Ménines de Velasquez, exemple auquel Gide se réfère explicitement, est donnée, après M. Foucault dans Les mots et les choses, par M. J. Layton dans son article «Las Meninas» Reflections on Reflections (in: Journal canadien de recherche sémiotique, vol. 11, n° 3, automne 1974, pp. 11-23).

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seconde occurrence, origine d'une structure réflexive, l'essentiel de sa
signification29.

Dire que la charge sémique du titre se reflète normalement dans l'œuvre, paraîtrait banal pour la majorité des textes littéraires. Cela ne l'est guère pour JJlmmoraliste, où la duplicité du titre, inhérente à sa lecture, se reproduit dans la scission du personnage principal, autorisant à la fois une lecture générique et particulière. Un aspect de la composition en abîme serait donc de fournir, au sein de l'œuvre, une explication de cette œuvre même.

Les citations internes constituent un exemple plus explicite encore. Michel atteint le contenu de sa nouvelle morale de Y être authentique (423) juste avant les conversations avec Ménalque; celles-ci y ajoutent la formulation universelle et certaines corrections (431). Cette évolution est rendue sensible à travers la citation, comme nous venons de le voir plus haut. Pendant la seconde discussion avec Ménalque, cependant, Michel, par lâcheté, rejette le contenu de sa nouvelle doctrine:

«Vous ne pouvez pourtant, cher Ménalque, demander à chacun de différer de
tous les autres ...» (432)

Non seulement il se cite lui-même négativement3o, mais, ce faisant, il reprend à son compte, littéralement, le commentaire que sa femme lui faisait au moment de la formulation de sa nouvelle éthique (cf. supra p. 205). Le jeu de citations illustre, à un autre niveau, le principe de Vœuvre d'art où Von retrouve, transposé, le sujet même de cette œuvre3l. Tout comme, dans La Tentative amoureuse, le parc apparaît deux fois, d'abord entouré de mystère et impénétrable, puis accessible et vulgarisé, matérialisant la dégradation amoureuse des protagonistes, ces citations successives constituent l'évolution des commentaires que l'œuvre livre sur elle-même.

Une structure abyssale se retrouve d'ailleurs dans d'autres aspects de U Immoraliste. A la répétition de l'épisode du parc répond la parfaite symétriedans la construction du roman. Le parallélisme du voyage - Biskra, Italie, Normandie, Paris, Normandie, Suisse/Italie, Biskra - crée le miroir



29: Pour une définition formelle, strictement narrative, de la structure en abîme cf. notre article La structure en abîme: un problème de syntaxe narrative - Sur «La Tentative amoureuse» d'André Gide (in: Akten 30 Vlaams Filologencongres, Gent, 1975).

30: cf. «Plus ils se ressemblent entre eux et plus ils diffèrent de moi.» (423)

31: A. Gide, o.c, p. 41.

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où l'évolution spirituelle de Michel se reflète. Rarement le narrateur opère
lui-même la confrontation:

«(...) je ne m'arrêtai point près du beau temple de Paestum où respire encore
la Grèce, et où j'allai, deux ans plus tard, prier je ne sais plus quel dieu.» (399;
nous soulignons)

L'épisode du vol des ciseaux par Moktir apparaît, lui aussi, deux fois. La première fois, l'absence de réaction de la part de Michel, devant le vol aperçu dans un miroir32, est un signe de sa renaissance à une nouvelle morale, Y immorale* du titre. La seconde fois, l'épisode subit deux changements: Ménalque apprend à Michel que, d'une part, au moment du vol, l'enfant se savait observé, et que, d'autre part, il a détruit les ciseaux sitôt après les avoir volés. Remarquons qu'ici aussi la seconde occurrence contient l'explication de la première. Acculé par Ménalque, Michel demande qu'on lui explique:

«(...) (Ménalque) Expliquez-moi votre silence.
- Je voudrais qu'on me l'expliquât.
(...)
- Il y a là, reprit-il, un «sens», comme disent les autres, un «sens» qui semble
vous manquer, cher Michel.
- Le «sens moral», peut-être, dis-je en m'efforçant de sourire.
- Oh! simplement celui de la propriété. (...)» (428)

Ce passage constitue une interprétation de la réaction de Michel, restée inconsciente la première fois. En même temps, la destruction gratuite des ciseaux est une confirmation après coup - et une explication - d'une affinité spirituelle ressentie antérieurement:

«(...) A partir de ce jour, Moktir devint mon préféré.» (395)

II apparaît, au terme de notre analyse, que des phénomènes apparemment divergents relèvent d'une même conscience de la composition, donnant raison àJ.P. Richard: «(...) l'originalité ou la profondeur d'une expérience tiennent bien moins à son contenu propre qu'à l'ordre et à l'organisation de ce contenu. »33

Walter Geerts

Antwerpen



32: L'apparition du miroir dans ce contexte allusif n'est probablement pas due à une troublante coïncidence. Peu développée, l'image constitue plutôt un indice ironique.

33: J. P. Richard, L'univers imaginaire de Mallarmé (Paris, Editions du Seuil, 1961).