Revue Romane, Bind 10 (1975) 2

Ernst Ulrich Grosse, Altfranzôsisches Elementarkurs. Hueber Hochschulreihe 7. München, Max Hueber, 1971. 143 p.

Povl Skårup

Side 424

Comme l'indique son titre, ce livre est destiné aux étudiants allemands qui doivent passer un examen d'ancien français élémentaire. «Der Wissenschaftler vom Fach vvird also fast nur Bekanntes finden» (p. 9). Le professeur ne basera pas son cours sur ce livre, mais il invitera les étudiants à s'en servir pour apprendre eux-mêmes les faits élémentaires. Le temps ainsi épargné pourra être consacré aux aspects linguistiques moins élémentaires et aux problèmes historiques et littéraires des textes.

Voilà l'idée de l'auteur. Bien que je ne l'aie pas mise en pratique, je doute qu'elle soit bonne. On ne peut se dispenser de discuter les faits élémentaires en classe; et je préfère un manuel dans lequel les étudiants pourraient trouver l'explication des faits - même moins élémentaires - rencontrés dans leurs textes, mais dont ils n'auraient pas à charger leur mémoire.

Le livre est divisé en deux parties : Lautlehre et Morphosyntax, auxquelles s'ajoutent quatre appendices. La phonétique comprend la moitié du livre: c'est trop à mon avis. La sémantique, elle, ne fait que le vingtième du livre (le premier des appendices): c'est trop peu, car c'est cette partie-là qui cause le plus de difficultés à tous ceux qui s'occupent de l'ancien français.

Dans la partie phonétique, le point de départ n'est pas l'ancien français, mais le latin, comme c'est très souvent le cas dans les grammaires de l'ancien français. Ainsi, nous apprenons ce que sont devenues les voyelles latines en syllabe tonique en positionentravée et ce qu'elles sont devenues en syllabe tonique en position libre, mais nous n'apprenons pas le système des voyellesen ancien français en syllabe tonique sans nasale: on ne nous dit pas qu'il y a dans la première période trois e différents en syllabe tonique (l'auteur attribue à celui qui provient de l'a latin les deux qualités des autres, p. 27, cp. p. 25), ni

Side 425

que ceux-ci se confondent au cours du moyen âge, et nous n'apprenons pas les diphtongues en -i ni celles en -u < -l. Pour le système des voyelles en syllabe non tonique, on nous dit qu'il est identique à celui des voyelles provenant de voyelles latines toniques en position entravée; c'est faux: en syllabe protonique, l'ancien françaisn'avait, du moins dans la première période, qu'un seul e et un seul o, sans doute fermés (cela vaut également pour o protonique provenant de au: oser, non oser, comme on le suppose aux pp. 29 et 43: si l'infinitif moderne n'est pas *ouser [uze], cela est dû à l'analogie des formes au radical tonique, de même que pour pleurer au lieu de *plourer) ; je crois même que le syncrétisme de 17 et de Yë latins et celui de Yü et de Yó latins en syllabe non tonique n'étaient pas postérieurs à celui de Yë avec ïjë et à celui de Yô avec u/ô (voir mon compte rendu de Palle Spore: La diphtongaison romane, dans Acta LinguisticaHafniensia XV, 1, 1974, 119). Le troisième système vocalique important est celui des voyelles en syllabe tonique devantnasale; on ne nous en donne que les monophtongues (p. 30), en présentant d'ailleurs deux nouveautés: la voyelle ou >u (de bons, contre) ne se serait peutêtrepas nasalisée (c'est peu probable), et la nasalisation de 17 et de Y y (< «) remonterait aussi haut que celle de e et de a (c'est bien possible, mais comment le prouver? Ce qu'on peut constater, c'est que in et yn continuent pendant un certaintemps à assoner avec i et y sans nasale,tandis que dès les premiers textes, en et an n'assonent plus avec e et a sans nasale). - Les consonnes sont mieux traitéesque les voyelles; notons un résumé simplifié, mais acceptable, de leur évolutiondu latin en ancien français (§ 2.5) et un aperçu des phoiièrncb consonantiques en ancien français (§ 5.9.3).

La seconde partie du livre est consacrée
à la morphosyntaxe. Le point de vue y

Side 426

elles n'ont jamais existé, puisque les désinencesétaient déjà -ions, -iez à l'époque où -a- y avait remplacé -/-). Au parfait, on n'a pas querismes, queristes (p. 108), mais quesimes, quesistes. Je ne connais pas la forme feüs, variante de fus (p. 110).

Le livre n'est pas dépourvu de qualités pédagogiques. Mais que dire d'une pédagogie efficace portant sur des choses erronées

Ârhus