Revue Romane, Bind 9 (1974) 2Hermann Witte/Hans Haupt: Karl Witte - Ein Le ben fur Dante. Hans Christians Verlag, Hamburg, 1971. 336 Seiten mit 12 Bildertafeln.Poul Høybye
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On peut avoir longtemps étudié l'œuvre
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grands travaux de critique textuelle de Karl Witte, qui vécut de 1800 à 1883, est le pionnier qui, dès les années 1820, préconisa l'étude approfondis des textes auxquels Dante doit sa célébrité. Comme on le sait, aucun manuscrit de Dante ne nous est resté. Il faut donc, pour reconstituer le plus fidèlement les textes originaux, comparer toutes les copies et tous les commentaires les plus anciens. Ces sources sont si multiples qu'une telle étude dépasse les capacités d'un seul chercheur, eût-il été à même d'y consacrer 63 ans de sa vie. Sans parvenir totalement au but qu'il s'était fixé, Karl Witte s'en approcha de très près. Dès son premier long séjour en Italie, il collectionna et étudia ces documents. Il devait d'abord les dépister dans toutes les bibliothèques publiques et privées, tâche alors bien plus malaisée qu'aujourd'hui, où l'on dispose de photocopies à bon marché. K.W. se liait facilement avec les propriétaires des documents, il s'en faisait souvent des amis pour la vie et entretenait avec eux une correspondance gigantesque. Avec une ardeur sans égale, il fit personnellement des copies qu'il collationna durant ses 29 séjours en Italie, de 1818 à 1876. De cette activité inlassable, la biographie qui vient de paraître nous donne une idée très vive. Cette œuvre d'Hermann Witte (1882-1955), petit-fils de Karl Witte, a été mise au point par un des dantologues allemands les plus en vue, M. Hans Haupt (Hambourg). K.W. n'était pas seulement dantologue, mais aussi traducteur de Dante: sa traduction de la Divine Comédie (1865), qui garde encore toute sa valeur, a été rééditée en 1965 par Verlag Philipp Reclam jun., Leipzig, avec de belles reproductions des dessins si justement célèbres de Botticelli. Il faut également souligner que K.W. publia en 1862 un texte amélioré de la Divina Commedia, qu'il créa en 1865 la première Société Dante du monde et que, la même année, il fit paraître la première série d'annuaires d'études consacrées à Dante, qu'il écrivait, en grande partie, lui-même. Il est vrai que, après la mort de K.W., la société hiberna pendant plusieurs années, mais elle existe toujours. Malheureusement, depuis quelques années, elle s'est scindée en deux: la plus grande section se trouve en Allemagne fédérale; l'autre, moins importante mais tout aussi active, en Allemagne démocratique, à Zwickau, près de Dresde, où la société fut fondéî sous la protection du roi Johann de Saxe (1801-1879), qui, avant de monter sur le trône, avait publié une bonne traduction de la Divine Comédie sous le pseudonyme de Philalethes («l'ami de la vérité»). K.W. était comme prédestiné au professorat de philologie romane. Mais de telles chaires existaient encore à peine, même en Allemagne, pays qui a ouvert la voie dans ce domaine. Le père des romanistes, Friedrich Diez, dut attendre ju^qu en ibjvJ puni obtenir une chaire, à Bonn. Le gagne-pain de K.W. fut l'enseignement du droit et de l'histoire du droit, discipline qui présente aussi un aspect philologique. L'histoire de sa vie mérite d'être connue. Sa biographie a pour sous-titre: Enfant prodige - jurisconsulte - dantologue allemand suprême. A 10 ans, K.W. était immatriculé à l'université de Goettingen; à 13, il recevait le titre de docteur honoris causa en mathématiques à Giessen. Il soutint, à 16 ans, sa thèse de droit à Heidelberg et, un an après, il s'habilita comme docent à Berlin. Le pere de K.W., qui s'appelait égalementKarl
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C'était un pédagogue dans l'esprit des «Illuministes». Selon lui, il fallait commencerl'enseignement des enfants bien avant l'âge scolaire normal, et il se réclamaitde la thèse d'Helvétius: Chaque homme communément bien organisé peut devenir grand homme, supposé quii soit élevé comme il faut. Karl Witte père, qui avait eu du succès comme professeur particulier d'un garçon gâté et peu développé (du nom d'Hercule!), voulut refaire l'expérience avec son fils unique. La biographie nous renseigne amplement sur la méthode: L'éducation devait être aussi libre que possible - la vie en plein air jouait un grand rôle. Avant tout, il ne fallait pas forcer l'enfant, mais lui inculquer les connaissances au fur et à mesure que son intérêt s'éveillait (il devait être « motivé »). Par bonheur, le petit Karl était extraordinairement réceptif, et pas seulement en matière de langues. Avant l'âge de 10 ans, il savait l'italien, le français, l'anglais, le latin et le grec (dernière langue qu'il avait pourtant mis neuf mois à apprendre). Malheureusement, le père continua à régenter son fils, même pendant ses études universitaires, et il devait par la suite se mêler continuellement de sa carrière, au point qu'il faillit la compromettre par des démarches inopportunes auprès de ministres nistreset autres personnages haut placés. Il est compréhensible qu'à Berlin on hésitât à laisser un docteur de 17 ans enseigner à des étudiants plus âgés que lui. Mais on parvint à lui procurer une subvention qui lui permit de passer trois ans en Italie, où il acquit rapidement plus de maturité humaine. Il se révéla un jeune homme d'une fraîcheur naturelle, auquel les expériences pédagogiques du père n'avaient pas nui durablement. Mais le fait qu'il eût été un enfant prodige, proposé en modèle par nombre de parents à leurs enfants, restait pour lui un boulet. Il fit éduquer ses propres enfants comme des enfants normaux, et il se brouilla avec son ambitieux de père, qui était déçu de voir son manuel d'éducation (gros de 1000 pages) ne recueillir aucun écho: à l'âge du romantisme, c'est à de tout autres idéals éducationnels qu'on s'attachait. L'ouvrage auquel se rapporte le présent compte rendu est avant tout une monographie de K.W. fils. Il fournit néanmoins au lecteur intéressé une mine de renseignements sur l'époque, notamment sur la vie universitaire à Breslau et à Halle et sur de nombreuses personnalités allemandes et italiennes avec lesquelles K.W. fut en relation. COPENHAGUE |