Revue Romane, Bind 4 (1969) 2

Le syntagme du nombre cardinal en français moderne

PAR

CARL VIKNER

0. Introduction

Le syntagme du nombre cardinal (pour plus de commodité désigné dans la suite par «le syntagme cardinal») constitue un domaine de la grammaire qui, jusqu'à une époque récente, n'avait pas particulièrement retenu l'attention des grammairiens. En effet, les manuels de grammaire se limitent ordinairement à donner une liste renfermant les formes simples (un, deux, ... onze, douze, ... vingt, trente, ..., etc.) plus quelques échantillons de formes composées (vingt et un, deux cents, etc.). A partir d'une telle liste, le lecteur (étranger - car il va de soi que, pour le francophone, cette liste n'offre aucun intérêt pratique) est censé pouvoir construire des cardinaux corrects et éviter les constructions incorrectes. Et il le peut effectivement. Cela revient à dire que le lecteur établit lui-même, plus ou moins consciemment, une grammaire qui engendre les cardinaux - ce qui n'est possible, sans doute, que parce qu'il existe une très grande affinité entre Íes systèmes des numéraux cardinaux des différentes langues indo-européennes: un Français, un Anglais, un Allemand, un Russe, un Scandinave, etc. auront plutôt tendance à trouver «naturel» qu'on exprime le nombre 2963 au moyen d'un syntagme cardinal composé de six formes simples et le nombre 3000 à l'aide de deux formes simples seulement. Qu'il n'y ait là rien de «naturel» se révèle par le fait que la représentation en système décimal utilise quatre symboles pour chacun des deux nombres.

Comme les descriptions traditionnelles des numéraux cardinaux remplissent leur tâche de manière satisfaisante d'un point de vue pédagogique, on pourrait juger superflu de tenter une description plus exhaustive. Or, il y a, au moins, deux raisons d'effectuer pareille tentative:

I°. La méthode traditionnelle, implicite, est insuffisante lorsqu'il
s'agit de l'appliquer au traitement automatique des textes, et plus particulièrement
en matière de traduction automatique.

2°. Une grammaire précise et exhaustive du syntagme cardinal offriraitbeaucoup

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raitbeaucoupd'intérêt sur le plan théorique. Brainerd (p. 4l)1 note
avec justesse :

«Number ñames . . provide a small, usually well-defined, corpus upon which
to test various structural models used for thé description of natural language.»

Et il enchaîne:

«Thé use of formai grammars in thé description of number ñames and numerical expressions has thé advantage of giving a potentially complète description of thèse corpuses, unlike many of thé descriptions given in thé classical grammars. In thé case of a formai grammar for a corpus such as thé numerical expressions of a given language, inadequacies in thé description given by thé grammar at any stage become readily apparent and can be corrected by introducing changes in thé grammar.»

De fait, il se trouve justement que ces dernières années ont vu, avec l'avènement de la grammaire generative, s'accroître l'intérêt pour la structure des numéraux, accroissement dont témoigne surtout la publication récente, par H. Brandi Corstius, du livre Grammars for Number Ñames. Cet ouvrage contient une série d'articles sur la description formelle des numéraux de différentes langues (hollandais, anglais, roumain, etc.); en particulier, Barron Brainerd a inséré (pp. 47-48), dans son article «A Transformational-Generative Grammar for Rumanian Numerical Expressions», une grammaire des cardinaux français, sur laquelle je reviendrai plus 10in.2

I! convient de mentionner également l'ouvrage intéressant de Hans Chr. Sorensen: Tal - numre - navne. Glossematiske studier (Copenhague, 1969), qui aborde le problème des noms de nombre d'un point de vue assez différent du mien.

Dans ce qui suit, je vais tâcher de décrire la structure du syntagme cardinal (dans la langue écrite). Pour ce faire, je me servirai des méthodesélaborées par les tenants de la grammaire generative. Qu'on me pardonne d'avance ce que la notation peut avoir de rebutant pour le



1 : Les références renvoient à la bibliographie de la page 229.

2: Je n'ai pu, malheureusement, - parce que j'en ai eu connaissance trop tard - me procurer l'article mentionné dans Corstius, 1968a (p. 107): R. P. G. de Rijk: «Une grammaire «context-free» pour la génération mécanique des noms de nombre français», in: Braffort and F. van Schepen, Automation in language etc., Euratom CID. Brussels, 1967.

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non-initié. Mais j'ai cru pouvoir me dispenser d'explications supplémentairesà
ce sujet, étant donné qu'il existe déjà d'excellentes introductions
à la théorie generative, où le lecteur intéressé pourra s'informer.3

J'ai laissé de côté les problèmes d'accord entre le cardinal et un éventuel substantif le suivant (un/une, ainsi que le flexif du nombre dans le substantif, etc.). Ces phénomènes, ne concernant que le rapport entre le syntagme cardinal et d'autres syntagmes dans la phrase, n'ont pas d'incidence sur la structure interne du syntagme cardinal. Par contre, quand il se présente des problèmes de ce genre à l'intérieur du syntagme, je me suis efforcé d'en tenir compte.

Bien que le syntagme cardinal m'intéresse d'abord et surtout en tant
que membre du syntagme substantif:

le pont aérien . . a comporté mille huit cent trente-sept vols
(Monde 30/3 1969, 7),

il n'y a pas lieu de distinguer ici cet emploi de celui où le cardinal figure
comme pronom indéfini :

Le nombre des hélicoptères américains abattus . . est ainsi porté, selon les
statistiques américaines, à deux mille quatre cent soixante-trois (ib. 3),

puisque la structure du syntagme cardinal reste exactement la même
dans les deux cas.

Ce qui est intéressant avec le syntagme cardinal, et ce qui en fait en quelque sorte une espèce de «microlangue», c'est qu'à partir d'une trentaine de formes simples, il est possible de construire - selon des règles rigoureuses - un très grand nombre de formes composées:

«Indeed, when we employ thousand, million, billion in American English we can make IO12 -1 number ñames which would take about 100 years to list at 300 ñames per second. Yet any speaker of English can construct any given one of them in a few seconds» (Brainerd, p. 41).

Pourtant le système n'utilise qu'une infime partie des combinaisons possibles: ainsi *dix-cinq, *deux trentes, * trente douze, *trente vingt-deux, *quarante cents, *cent deux cents, *mille douze cents, *deux millions mille milliards, etc. etc. sont totalement exclus. Il convient donc d'établir avec précision une grammaire qui permette d'engendrer toutes et rien que



3: Je pense surtout aux ouvrages de Ruwet (1967) et de Bach (1964).

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les combinaisons correctes, et d'examiner ensuite la structure que cette
grammaire impose aux syntagmes engendrés.

1. G1 - la grammaire de Brainerd

Commençons par examiner la grammaire que propose Brainerd (pp. 47-48) pour les numéraux cardinaux français et que je désignerai dans la suite par GÌ. Le numérotage des règles employé par l'auteur se réfère à sa grammaire des cardinaux roumains, je l'ai remplacé par des numéros consécutifs:

Vocabulary :

Terminal: œ, yn, do, trwa, katr, sèk, sis, set, z//Y, nœf, di, dis, diz,
~3z, duz, irez, katorz, kèz, sez, diset, dizifit, diznœf, ve, trai, karât, sèkât,
swasât, sa, mil, miljô, milja:r, e, dd, NF, NM-

Auxiliary: S, SO, R, Sit S2, T, T^ T2, Q, /?,/?', N, U.
Boundary marker: #.

initial string: #S#.

Production rules:

Contcxî-frcs rulcs!


DIVL2698

1.

-
~

'


DIVL2704

DIVL2706

DIVL2708
Side 205

DIVL2710

5


DIVL2713

O.


DIVL2716

1


DIVL2719

8


DIVL2722

9.


DIVL2725

1U-


DIVL2728

a.


DIVL2731

12.

Context-sensitive rules:

13.


DIVL2737

DIVL2739

14.

Side 206

DIVL2742

15.

for p=£ U and /? not of thé form a miljô or a miljair.


DIVL2746

16.

GÌ appelle tout d'abord quelques remarques sur des fautes dues peutêtre
à l'inadvertance.

L'auteur note les formes di, dis, diz dans son vocabulaire terminal. Pourquoi ne pas y inclure également se, si, siz, ifi ? Dans la règle 10, il marque l'alternative di ¡dis. Pourquoi pas diz aussi ? Et pourquoi n'y a-t-il pas d'alternative dans la règle 7?

L'emploi de o et de y semble quelque peu fortuit.

Dans la liste du vocabulaire auxiliaire (c'est-à-dire non-terminal), R
figure deux fois, tandis que X et C font défaut.

16 ¿è\
\ de parenthèses,
¿2]

ou bien il faudra introduire Q directement dans les règles 3 et 4, sinon
la grammaire ne sera pas capable d'engendrer des syntagmes comme
vingt, trente, etc., mais seulement vingt et un, vingt-deux, etc.

Dans la règle 14, il faudra supprimer l'indicateur de frontière (#). Qu'il ne s'agisse pas là d'un lapsus se révèle à la page 49, où l'auteur dit expressément: «Tn thé case of French, un is inflected for gender, only when it occurs alone before a noun syntagma».4 C'est inexact: un s'accorde toujours en genre quand il occupa la dernière - ou la seule - position du syntagme cardinal:

vingt et un anciens amiraux (Julien, Empire 368);

mais:

vingt et une régions (Monde 30/3 1969, 23)
vingt et une réunions régionales (ib. 15/4 1969, 1)

la fermeture de vingt et une autres banques nationales (Afrique 31/3 1969, 20)
soixante et une organisations d'artisans (Monde 16/4 1969, 29)
c'est la géographie future de cent une communes (ib. 15/4 1969, 10).

Cf. aussi Grevisse (§ 405).



4: L'expression «before a noun syntagma» me semble peu heureuse. Je préférerais inside.

Side 207

Défaut peut-être plus grave: GÌ n'engendre pas les formes d'empiétement («overlapping»), c'est-à-dire que des nombres comme 1270 ou 2 942 000 000 ont aussi bien les formes mille deux cent soixante-dix et deux milliards neuf cent quarante-deux millions que douze cent soixantedix et deux mille neuf cent quarante-deux millions. Or, G! n'engendre que les premières.

Voici quelques exemples des formes d'empiétement :

les quinze cents élèves des cinq écoles nationales de la marine marchande
(Monde 16/4 1969, 15)

Le conseil des ministres a porté à 2 942 millions le programme d'économies
budgétaires (Monde Hebdomadaire 23/1 1969, 7)

des contrats totalisant 26.700 millions de dollars (Julien, Empire 370) 3.429 millions de dollars .. les 29.000 millions investis en Europe .. une augmentation de 1.251 millions .. un total de 5.297 millions (ib. 226-227) 1 273 millions de mètres cubes (Calvet, Société 270)

22 942 millions de dollars (Afrique 31/3 1969, 16).

Dans le cas des nombres allant de 1100 à 1699, c'est même cette forme
qui est la plus usuelle, cf. Gougenheim, p. 69, Grevisse, § 402, Rem. 1,
et Togeby, 1965, p. 154.

Ce qui me gêne surtout dans GÌ, c'est la description structurale qu'elle
assigne aux syntagmes engendrés. Considérons quelques dérivations. Le
numéro de la règle qui a été appliquée est noté entre parenthèses:

(1) S0

(2) R

(3) C

(12) S2 sa T

(6) d0 sa T
(7) d0 sa TI
(8) d0 sa T2
(9) d0 sa duz

A cette dérivation correspond l'indicateur syntagmatique («phrase structure
marker») suivant:

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DIVL2801

Fig. l.

On voit que la structure associée à l'élément duz est plutôt «abondante». En effet, l'arbre de la figure 1 nous apporte l'information structurale que duz fait partie de la catégorie T2 (c'est-à-dire la classe des éléments susceptibles d'être postposés à swasât sans e, cf. la règle 10), laquelle fait partie de la catégorie T! (une des classes d'éléments susceptibles d'être postposés à katr v£, cf. la règle 10), qui elle-même fait partie de la catégorie T (une des classes d'éléments susceptibles d'être postposés à sa, cf. la règle 12). Or, pour le syntagme considéré, c'est uniquement cette dernière information qui paraît pertinente.

Cette «abondance» de structure devient encore plus évidente si l'on
examine des syntagmes très simples comme do ou diznœf. A ces deux
syntagmes correspondent les arbres suivants:


DIVL2804

Fig. 2.

Side 209

A remarquer que l'arbre associé à diznœf ne révèle même pas que ce
syntagme est une combinaison de deux autres éléments terminaux: diz
et nœf.

Cette particularité provient de l'économie de la grammaire de Brainerd. En effet, à l'exception de dis, 3z et swasât, les éléments terminaux ne figurent qu'une seule fois dans les règles indépendantes du contexte. Cependant, comme l'a bien dit R. W. Langacker5, la description structurale qu'une grammaire associe aux suites terminales engendrées importe plus que l'élégance des règles elles-mêmes. Je vois mal à quoi correspondrait, dans l'intuition du sujet parlant, les structures de la figure 2.

C'est pourquoi je proposerai une grammaire, certes moins élégante et
plus complexe, mais qui assigne des indicateurs syntagmatiques plus
simples aux syntagmes engendrés.

2. G2 - une grammaire des cardinaux danois

La difficulté d'établir une grammaire simple des cardinaux français tient notamment à ce que les cardinaux de un à dix-neuf se répartissent en 5 ou 6 classes différentes, à cause des différences de combinabilité de ces éléments. Tel n'est pas le cas des cardinaux danois, et il ne sera sans doute pas inutile d'esquisser d'abord une grammaire engendrant ceux-ci (Gì):

1.


DIVL2815

DIVL2817

2.


DIVL2820

3.



5: «Transformational analysis does not consist just in finding a set of rules that work; rather, what thé linguist is aller is thé RIGHT set of rules, one that makes true structural claims about thé nature of a speaker's linguistic compétence» (Langacker, p. 108).

Side 210

DIVL2823

4.


DIVL2826

5.


DIVL2829

6.


DIVL2832

,
7-


DIVL2835

8.

9.

NDI-19^en, to, tre, fire, fem, seks, syv, otte, ni, ti, elleve, tolv,
tretten, fjorten, femten, seksten, sytten, atten, nitten

10.

NDII-19 -> elieve, tolv, tretten, fjorten, femten, seksten, sytten,
atten, nitten

11.

NDÍ-9 -> en, to, tre, fire, fem, seks, syv, otte, ni

J'utilise des majuscules pour désigner les éléments non-terminaux, des
minuscules pour les éléments terminaux.

Cette grammaire est une grammaire de constituants indépendante du contexte (« context-free phrase structure grammar»). Il faut la compléter par des règles transformationnelles obligatoires, qui tiendront compte des problèmes d'accord interne:

T.l.


DIVL2849
Side 211

T.2.


DIVL2852

G2 répartit les éléments de en à nitten en trois classes différentes (règles 9 à 11). NDI-19 est la classe des éléments qui n'admettent pas d'antéposition ni de postposition d'autres éléments. NDI-9 est la classe des éléments susceptibles d'être antéposés à tyve, tredive, etc. (cf. règle 8). NDII-19 se justifie uniquement par le fait qu'il faut exclure ti de la règle 7, pour éviter le syntagme *ti hundrede.

Le caractère compliqué des règles 3 à 7 ainsi que la répétition des éléments terminaux dans les règles 9àll sont compensés par la description structurale très simple que la grammaire assigne aux suites terminales. En voici quelques exemples :


DIVL2862

Fig. 3.

HUN1 de la règle 7 permet d'engendrer les formes d'empiétement avec
hundrede'. toogtyve hundrede, femogfyrre hundrede, etc., tandis que l'applicationde

Side 212

cationdela règle 5 donnerait :(o tusinde to hundrede, etc.6 Il semble tentant, à première vue, de réunir les règles 6 et 7 en une seule, mais ce n'est pas possible, car HUN apparaît dans les règles 3 à 5 et donnerait ainsi naissance à des syntagmes agrammaticaux, tels que *tre tusinde ioogtyve hundrede.

3. G3 - une grammaire des cardinaux français

3.1. Structure du syntagme cardinal

La grammaire suivante (G}) est construite en partie selon les mêmes
principes que G2:

1.


DIVL2876

DIVL2878

3.

4.

<
5-


DIVL2883

DIVL2885

DIVL2887

2



6: La délimitation de la liste des éléments antéposables présente toutefois des difficultés. Dirait-on, par exemple, tredive hundrede ou nioghalvfems hundrede^. J'en doute.

Side 213

DIVL2890

6.


DIVL2893

DIVL2895

8.


DIVL2898

9.

10.


DIVL2902

11.


DIVL2905

12.


DIVL2908

DIVL2910

13.

14.

NF2-9 ->• deux, trois, quatre, cinq, six, sept, huit, neuf

15.

NF7-9 -> sept, huit, neuf

Les règles 1 à 15 ne constituent qu'une partie de GT,, à savoir la grammairede constituants indépendante du contexte qui assigne aux syntagmes cardinaux leur structure profonde. Les problèmes d'accord interne seront traités au § 3.2. En attendant. G? engendrera donc des syntagmes tels que *un millions, *deux cents trois, *quatre-vingts-dix, etc., mais ceci n'a

Side 214

aucune influence sur la structure profonde des syntagmes et il me paraît
préférable de discuter auparavant de celle-ci.7

Voici d'abord, à titre d'illustration, une dérivation avec l'indicateur
syntagmatique correspondant:

(1) #CARD#

(2) MIO

(4) DIZAINE millions MIL

(6) DIZAINE millions NF2-19 mille CENT

(7) DIZAINE millions NF2-19 mille NF2-9 cents DIZAINE

(9) cinquante millions NF2-19 mille NF2-9 cents DIZAINE
(9) cinquante millions NF2-19 mille NF2-9 cents trente-NF2-9
(11) cinquante millions quinze mille NF2-9 cents trente-NF2-9
(14) cinquante millions quinze mille sept cents trente-NF2-9
(14) cinquante millions quinze mille sept cents trente-cinq


DIVL3075

Fig. 4.

G3, à l'instar de G! et de G2, ne donne pas de règles pour les cardinaux
supérieurs à ceux qui sont formés à l'aide de milliard. Théoriquement,
on pourrait former des syntagmes contenant îrillion, quatrillion, quinîillion,etc.



7: Pourtant, pour ne pas trop agacer le lecteur, j'utiliserai les formes orthographiquement correctes, sauf dans les cas où il s'agit expressément de syntagmes engendrés par 03.

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lion,etc.Mais, d'une part, ces syntagmes sont «pour ainsi dire inusités»
(Grevisse, § 402, Rem. 3), d'autre part, ils ne présentent aucun intérêt
syntaxique particulier puisque, à partir de million, les règles restent analogues.
- Je n'ai pas indiqué l'élément terminal billion (— milliard) parce
qu'il est également d'un emploi très rare, mais on pourrait facilement
, I^l [milliards]
1 insérer dans la règle 3: {, „,. }.
billions

Je n'ai pas inclus zéro parmi les éléments terminaux, car il n'entre dans la formation d'aucun constituant. Si on tient à le considérer comme un cardinal, on pourrait l'introduire directement dans la règle 2, mais, dans ce cas-là, ne faudrait-il pas y inclure également plusieurs, comme le fait Togeby (1951, p. 162)? - Dans une grammaire des nombres décimaux, il faudrait naturellement placer zéro sur un pied d'égalité avec les autres éléments terminaux, puisque, dans une telle grammaire, il ferait partie intégrante du système.

Les éléments MIO1 et CENT1 donnent naissance aux formes d'empiétement. Pour million, il s'agit des cardinaux de mille millions à neuf cent mille millions; pour cent, il s'agit seulement des cardinaux de onze cents à dix-neuf cents (cf. p. 207), puisque, à l'encontre de l'usage danois, des formes telles que *vingt-deux cents sont exclues, cf. Togeby, 1965, p. 154. - II est nécessaire d'avoir aussi bien les éléments nonterminaux MIO et CENT que MIO' et CENT1, parce que MIO figure dans la règle 3 et CENT dans les règles 3 à 6, où ils contribuent à la formation de constituants placés à un niveau supérieur. Si l'on se contentait d'un élément CENT en réunissant les règles 7 et 8 en une seule, la règle 6, par exemple, donnerait naissance à des syntagmes comme *douze cents mille douze cents. - Qu'il ne soit pas nécessaire d'avoir également un élément MIA1 tient au fait que MIA n'apparaît pas dans des syntagmes supérieurs. Si j'avais voulu faire engendrer par G3 des syntagmes contenant trillion, il m'aurait fallu scinder la règle 3 en deux pour établir les constituants MIA et MIA1. - II n'y a pas d'élément MIL1. C'est que les formes contenant mille ne peuvent recouvrir le domaine de million: ainsi 1500000 se lit un million cinq cent mille et non *quinze cent mille.1A



7 A: Et pourtant. . . Lors de la correction des épreuves de cet article, Henrik Prebcnicn me communique cet exemple inquiétant' Quelque quinze cent mille habitants des provinces orientales (A. Fontaine: Histoire de la Guerre Froide. I, Paris, Fayard, 1967, p. 204).

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quatre-vingts figure comme un seul élément terminal et n'est pas analysé en vingt précédé de quatre. Il y a plusieurs raisons à cela: D'abord, il me semble douteux qu'une telle analyse corresponde à l'intuition du sujet parlant.8 Ensuite, cela compliquerait inutilement la grammaire, et le fait que vingt admette un élément antéposé dans ce seul cas ne me paraît pas une raison suffisante pour le traiter isolément. Enfin, selon Togeby (1965, p. 153), quatre-vingts se prononce [katra ve] et non [katvê], ce qui pourrait indiquer qu'il ne s'agit pas de l'élément terminal quatre, puisque quatre cents, quatre mille se prononcent bien [kat sa], [kat mil]. - Cependant, la manière dont quatre-vingts s'attache les éléments postposés dénote une affinité avec les éléments cent(s) et mille. Cf.: quatrevingt-un et cent un, mais: vingt et un. Et aussi: quatre-vingt-onze et cent onze, mais : soixante et onze.9

Comme dans G2, mais à la différence de GÌ, la règle 2 permet d'engendrer plus directement (c'est-à-dire avec «moins de» structure) des syntagmes tels que trois, dix-neuf, vingt-deux, qui auront les structures suivantes :


DIVL3078

Fig. 5.



8: En danois, firs(indstyve) est senti comme un seul élément terminal à part entière et n'évoque pas l'idée 4 x 20. Il est vrai que, là, l'élément tyve a disparu depuis longtemps de l'usage courant.

9: Huit cent quatre-vingt-onze trains (Monde 28/3 1969, 10), cent quatre-vingt-onze enseignants (ib. 16/4 1969, 13), cent soixante et onze votants (ib. 28/3 1969, 20), En 1967, deux cent soixante et onze prêtres auraient quitté la vie religieuse (ib. 15/4 1969, 12). Cf. Gougenheim, p. 69, Grevisse, § 403, Rem. 1, Togeby, 1965, p. 153.

Side 217

On remarquera que, contrairement à ce qui se produisait pour l'engendrement
de dix-neuf par GÌ (cf. la figure 2), l'arbre de la figure 5 (b)
rend compte du caractère composé de dix-neuf.

GT, répartit les éléments terminaux un, deux ... dix-neuf en 6 classes (règles 10 à 15). NFI-19 comprend tous les éléments concernés. Les éléments appartenant à NFI-19 peuvent apparaître avant et après milliards (règle 3) et millions (règles 4 et 5), après mille (règle 6), cent (règles 7 et 8) et quatre-vingt (règle 9). NF2-19 comprend ceux des éléments de NFI-19 qui sont susceptibles d'être antéposés à mille (règle 6). NFII-19 comprend les éléments susceptibles d'être antéposés à cents dans les formes d'empiétement (règle 8). NFIO-19S comprend les éléments susceptibles d'être postposés à soixante à l'aide d'un trait d'union, mais non à vingt, trente, ... cinquante (règle 9). NF2-9 comprend les éléments susceptibles d'être antéposés à cents dans les formes sans empiétement (règle 7) et postposés à vingt, trente, etc. à l'aide d'un trait d'union (règle 9). NF7-9 comprend les trois éléments susceptibles d'être postposés à dix (règles 10 à 13).

On voit que NF7-9 constitue un sous-ensemble de NF2-9, et NF2-9 un sous-ensemble de NF2-19, etc. Il aurait été plus élégant de faire exprimer ce fait explicitement par la grammaire, par exemple au moyen des règles suivantes (G3A) :10:10

C'est justement une formulation analogue11 qui confère aux syntagmes


DIVL2946

iOA.


DIVL2949

11 A.

12A.


DIVL2953

14A.


DIVL2956

15A.


DIVL2959


10: dix figure, isolé, dans la règle 11A et la classe NFIO-19S a disparu. Cela est dû au fait que NFII 19 n'est pai un sous-ensemble de NFIO 19S.

11: Cf. G,, règles 5 à 9.

Side 218

engendrés par la grammaire de Brainerd ce «surplus» de structure que
je lui ai reproché. En effet, le syntagme sept cent douze engendré par G$
a la structure:


DIVL3081

Fig. 6.

Tandis que G^A lui imposerait cette structure:


DIVL3084

Fig. 7.

Ce dernier indicateur syntagmatique nous fournit pas mal d'informations
non pertinentes (voir la critique relative à la figure 1). Voilà pourquoi
j'ai écarté la version G3A.

Togeby (1951, p. 162) estime qu' «il n'y a pas de différence fonctionnelle
entre les neuf nombres» (c'est-à-dire entre les nombres deux, trois,
.. . dix). La discussion qui précède aura montré que je ne suis pas

Side 219

d'accord avec lui. sept, huit et neuf se distinguent effectivement des autres en ce qu'ils sont les seuls à pouvoir apparaître après dix. dix se singularise de plusieurs manières: il ne peut pas apparaître avant cent, ni après vingt, trente, etc., alors que les autres le peuvent; il peut s'adjoindre un élément postposé, les autres, non.

Le phénomène des sous-ensembles se manifeste également si l'on examine les règles 3 à 8 de 63. Par exemple, l'ensemble des constituants spécifiés dans la règle 4 après millions est un sous-ensemble des éléments spécifiés dans la règle 3 après milliards. En tenant compte de ce fait, on pourrait simplifier considérablement la grammaire (j'omets les formes d'empiétement):

3A.


DIVL2973

DIVL2975

4A.


DIVL2978

6A.


DIVL2981

7A.


DIVL2984

9A.

Suivent les règles 10A, etc., de G3A.

Mais ici encore la simplicité des règles s'acquiert au prix d'une description
structurale qui me paraît totalement inadmissible. Voici, par exemple,
l'arbre correspondant à deux millions quinze :

Side 220

DIVL3087

Fig. 8.

Comment les rapports de subordination sont-ils rendus par nos grammaires? Il se trouve qu'ici G^ a au moins un avantage sur GÌ. Prenons, par exemple, le syntagme deux millions trois mille. G\ lui assigne la structure suivante:


DIVL3090

Fig. 9.

alors que 03 produirait cet arbre:

Side 221

DIVL3093

Fig. 10.

Ce qui signifie que G! analyse le syntagme en quatre constituants immédiats, n'indiquant pas si trois se rattache à millions ou à mille. G$ exprime clairement que trois se rattache à mille, les deux éléments étant des constituants de MIL.

Il y a toutefois un rapport très important qui n'est indiqué explicite ment ni par GÌ ni par Gs. Ainsi, en regardant la figure 7, on se rend compte que sept et douze sont considérés comme se rapportant à cents d'une manière identique. Ce phénomène ressort peut-être plus clairement si l'on se sert de parenthèses étiquetées pour représenter la description structurale (cette représentation est exactement équivalente à la représentation par «arbre»). Voici le même syntagme parenthétisé:

(((sept)NF2-9 centS (doUZe)NFI-19)cENl)cARD

Pourtant, pour obtenir la valeur numérique 712 - c'est-à-dire pour
procéder à une interprétation sémantique - il est clair que sept et douze
n'ont pas ici la même fonction. En réalité, il faut :

1° multiplier cent par sept,

2° additionner le résultat de cette multiplication et douze.

Personne ne songerait à additionner d'abord et à multiplier ensuite.

On pourrait faire exprimer explicitement ces rapports par la grammaire
en substituant CENT-A à l'élément CENT et en remplaçant la règle
7 par:


DIVL3008

7A-

Side 222

DIVL3011

78.

Avec cette modification, 03 affectera une autre description structurale
à sept cents douze :


DIVL3096

Fig. il.

Ou en représentation parenthétisée:

((((sept)NF2-9 CCnts)cENT-M (doUZe)NFM9)cENT-A)cARD

CENT-M sera alors interprété: «les constituants immédiats doivent être
multipliés»; CENT-A: «les constituants immédiats doivent être additionnés».

Toutefois, pour une application automatique de G3, si l'on veut, par exemple, faire traduire par un ordinateur des cardinaux français en chiffres arabes ou dans une autre langue, cette nouvelle analyse n'est pas indispensable. On pourrait se tirer d'affaire par les trois conventions suivantes:

1° A l'intérieur d'un même constituant, les éléments antéposés doivent
être traités avant les éléments postposés;

2° Le rapport d'antéposition équivaut à la multiplication ;
3° Le rapport de postposition équivaut à l'addition.

Mais ces conventions ne peuvent s'appliquer à GÌ, qui ne distingue pas dans tous les cas de manière suffisamment claire entre antéposition et postposition. Pour G2, il y aura des complications supplémentaires parce qu'il y a des cas où l'élément antéposé, dans un syntagme cardinal danois, doit être additionné, voir G2 règle 8.

Side 223

Les éléments terminaux de 03 se répartissent en cinq grandes classes :

Classe 1 : un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept, huit, neuf, onze, douze,

treize, quatorze, quinze, seize.

(Les éléments qui n'admettent pas d'autres éléments postposés
ni antéposés.)

Classe 2: dix, vingt, trente, quarante, cinquante, soixante, quatre-vingts.

(Les éléments qui admettent un élément postposé.)

Classe 3: cent(s), mille.

(Les éléments qui admettent à la fois des éléments antéposés
et postposés, et qui peuvent seuls faire fonction de syntagme.)

Classe 4: millions, milliards.

(Les éléments qui admettent un élément postposé et exigent
un élément antéposé.)

Classe 5: - (trait d'union), et.

(Les éléments qui apparaissent uniquement entre un élément
de la classe 2 suivi d'un élément de la classe 1.)

La distinction entre les classes 3 et 4 est nécessitée par le fait qu'à
la différence de cent et de mille, million et milliard n'apparaissent jamais
seuls comme syntagmes cardinaux, Cf. :

près de cent experts (Express 18/9 1967, 22)
Plus de mille maisons (Monde 27/3 1969, 2)
plus d'un million d'habitants (Calvet, Société 62)
plus d'un million de dollars (Observateur 5/8 1968, 4)

Ces classes ne se dégagent pas nettement de G3. On pourrait les faire
ressortir immédiatement, par exemple, en commençant la grammaire
par des règles comme :

1.


DIVL3051

DIVL3053

2
2.


DIVL3056

3.

Mais on voit immédiatement que, pour formuler les règles spécifiant les

Side 224

constituants de COMPOSÉ (c'est-à-dire de formes comme vingt-deux,
trois cent dix-neuf, etc.), il faudrait recourir à une foule de règles dépendantesdu

3.2. Problèmes d'accord interne

Pour donner aux syntagmes engendrés par Gj une forme en accord
avec l'usage orthographique courant, il faut compléter les règles 1 à 15
des pages 212-13 par trois règles transformationnelles obligatoires:

T.l.


DIVL3107

T.2.


DIVL3110

T.3.


DIVL3113

T.2 et T.3 transforment des syntagmes comme *deux cents vingt et
* quatre-vingts-dix en respectivement deux cent vingt et quatre-vingt-dix.

Chevalier et al. (§ 403) sont d'avis que «cette bizarrerie orthographique, qui date de la fin du XVIIe siècle, semble peu à peu sortir de l'usage». Cette opinion semble - malheureusement - un peu trop optimiste. Du moins n'ai-je pas trouvé, parmi les quelques centaines d'exemples que j'ai relevés, un seul qui profite de la libéralité accordée par l'arrêté min istèrici du 26 février 1901. Cf.:

Quatre-vingts postes d'assistants (Monde Hebdomadaire 28/11 1968, 8)
quatre-vingts ans (Observateur 17/3 1969, 37)

quatre-vingt-dix lits (ib. 24)

quatre-vingt-dix-neuf ans (Monde 27/3 1969, 5)

quelque deux cents barons de l'empire (Julien, Empire 351)
Quatre cents malades (Express 18/9 1967, 33)
A cinq cents mètres des portes (Zegel, Idées 47)

Treize mille demandes d'inscription ont été reçues, dont quatre mille six cents
pour la première année (Monde Hebdomadaire 28/11 1968, 8)

avec ses huit cent quatre-vingt-trois filiales (Monde 28/3 1969, 6)
Deux cent quatre-vingts pièces (ib. 16/4 1969, 23)

Side 225

Huit cent quatre-vingt-onze trains (ib. 28/3 1969, 10) deux cent cinquante mille personnes (Zegel, Idées 19) sept cent mille étudiants (Observateur 17/3 1969, 9) un million trois cent mille familles (ib. 8/5 1968, 22) deux millions huit cent mille (Monde 27/3 1969, 12).

Même la règle «superbizarre» qui veut que cents et quatre-vingts
gardent leur s devant millions et milliards (mais pas devant mille) est
respectée :

il y a deux cents millions d'années (Afrique 31/3 1969, 44)

Lorsqu'il s'agit d'engendrer des suites terminales, les règles transformationnelles ne posent pas de problèmes particuliers pour le traitement automatique. Il suffit d'examiner les suites engendrées par G$ avec leur description structurale pour voir si une des suites à gauche de la flèche dans T.l, T.2 et T.3 s'y trouve et, dans l'affirmative, lui substituer la suite correspondante à droite de la flèche.

Le problème est autrement délicat si l'on veut faire analyser par la machine des suites terminales données. Dans ce cas-là, les règles de la grammaire doivent être considérées non plus comme des règles d'expansion, mais comme des règles de réduction. Autrement dit, il faut les lire à rebours, de droite à gauche. Pour appliquer une règle comme T.2, il faut donc savoir si, dans une suite donnée, se trouve un constituant DIZAINE: mais cela, on ne peut pas le savoir avant d'avoir analysé la suite, ce qu'on ne peut pas faire avant d'avoir appliqué la règle T.2, s'il le faut. Cette difficulté tient au fait que les règles transformationnelles sont dépendantes du contexte.

Il serait donc intéressant de pouvoir exprimer les faits d'accord à l'aide de règles indépendantes du contexte. Dans notre cas, cela est parfaitement possible puisque l'ensemble des syntagmes que nous considérons est un ensemble fini. On pourrait, par exemple, construire une grammaire G4 en modifiant les règles de 03 de manière que celles-ci engendrent l'ensemble des syntagmes orthographiquement corrects et rien que ceux-là. Ces modifications entraînent évidemment une complication assez considérable de la grammaire, mais les syntagmes engendrés par G4 seront structuralement équivalents à ceux de G3. Voici les règles de Gd (je ne donne pas celles qui restent identiques aux règles correspondantes de GV):

Side 226

3.

6.

7.

7A.

8.

9.


DIVL3142

DIVL3144

DIVL3146

DIVL3148

DIVL3150

DIVL3152

DIVL3154
Side 227

DIVL3156

9A.

II y a encore une autre manière de résoudre ce problème à l'aide de règles indépendantes du contexte. Cette méthode m'a été suggérée par Peter Moller-Nielsen. D'abord, il faut entourer l's final dans les règles 3, 4, 7 et 8 de GT, par des parenthèses: milliard(s), million(s), cent(s). J'appellerai G5 la nouvelle grammaire qui résulte de ces modifications. Si l'on désigne par L(Gi) le langage (c'est-à-dire l'ensemble des suites terminales) engendré par une grammaire GÌ, on voit que L(GS) contient plus de suites que L(G3), parce que G5 engendre maintenant toutes les suites qui forment des syntagmes corrects, plus quelques suites incorrectes (*deux cent, *deux cents trois, par exemple). Il s'agit maintenant de construire une autre grammaire (Gs) qui, par des règles indépendantes du contexte, engendre toutes les suites incorrectes de L(GS), plus, éventuellement, d'autres suites incorrectes, mais aucune suite qui soit un syntagme cardinal correct. Cette «antigrammaire» servira de «filtre» pour les suites de L(Gs), en ce sens que seulement celles des suites de L(GS) qui ne seront pas acceptées par Gg (qui n'appartiennent pas à L(Gg)) sont des syntagmes cardinaux corrects. Symboliquement: une suite S est un syntagme cardinal français si et seulement si Se L(GS) p) L(G6).

Voici comment pourrait être conçue Gg :


DIVL3163

1.

Side 228

DIVL3166

2.


DIVL3169

,


DIVL3172

4.


DIVL3175

5.

Ainsi *deux cents trois, qui appartient à L(GS), n'est pas un syntagme
correct puisqu'il est également engendré par Gg. Cf. la dérivation:

ANTICARD

(1) T cents T"
(2) T cents T

(3) T1 cents TERM

(4) TERM cents TERM

(5) deux cents TERM
(5) deux cents trois

alors que deux cent trois, qui appartient également à L(GS), est correct puisqu'il ne peut pas être engendré par G6. En effet, cent, dans la règle 1 de G£, n'apparaît qu'immédiatement avant millions ou milliards, ou bien comme élément final d'une suite.

*

Je tiens à remercier cordialement mes amis et collègues, M. Peter Moller-Nielsen (Institut de Mathématiques Supérieures de l'Université de Copenhague), qui m'a fourni de précieuses suggestions relatives au sujet de cet article, ainsi que M. François Marchetti (Institut d'Études

Side 229

Romanes de l'Université de Copenhague), qui a bien voulu me prêter
son sentiment linguistique.

Cari Vikner

COPENHAGUE

BIBLIOGRAPHIE

Ouvrages de référence:

Bach, Emmon. An Introduction to Transfor mattonai Grammars. New York, Holt,
Rinehart and Winston, 1964.

Brainerd, Barron. «A Transformational-Generative Grammar for Rumanian Numerical Expressions». Cahiers de Linguistique Théorique et Appliquée 4 d967), pp. 35-45. Réimprimé dans Corstius. 1968b, pp. 41-52. Je renvoie à cette dernière

Chevalier, J.-C., C. Blanche-Benveniste, M. Arrivé et J. Peytard. Grammaire Larousse
du français contemporain. Paris, Larousse, 1964.

Corstius, H. Brandi. 1968a. «Automatic Translation between Number Ñames».
In Corstius, 1968b, pp. 103-123.

Corstius, H. Brandì, éd. 1968b. Grammars for Number Nantes. Foundalions of
Language, Supplementary séries, volume 7. Dordrecht-Holland, D. Reidel, 1968.

Gougenheim, Georges. Système grammatical de la langue française. Paris, d'Artrey,
1939. Cité d'après la réimpression, 1962.

Grevisse, Maurice. Le Bon Usage. Gembloux, Duculot, 1964. 8e édition revue.

Langacker, R. W. Compte rendu de A. Koutsoudas: Writing Transformational
uramniars. in. Language 44 (.1968,), pp. 98 108.

Ruwet, Nicolas. Introduction à la grammaire générative. Paris, Pion, 1967.

Togeby, Knud. 1951. Structure immanente de la langue française. Copenhague,
1951. Cité d'après la 2e2e édition: Paris, Larousse, 1965.

Togeby, Knud. 1965. Fransk grammatik. Copenhague, Gyldendal, 1965.

Textes cités:

Calvet, Henri: La Société française contemporaine. Paris, Nathan, 1956.

Jeune Afrique.

Julien, Claude: L'Empire américain. Paris, Grasset, 1968.

Le Monde - Sélection hebdomadaire.

Zegel, Sylvain: Les idées de mai. Paris, Gallimard, Collection «Idées», 1968.