Revue Romane, Bind 1 (1966) 1-2

Les combinaisons consonantiques finales en français parlé

PAR

BJARNE WESTRING CHRISTENSEN

0. Un modèle est approprié non seulement sil rend compte d'un grand nombre de données empiriques mais aussi sil s'applique à des résultats obtenus par un autre modèle de sorte que les deux, utilisés tour à tour, se complètent. C'est le cas du modèle établi par Henning Spang-Hanssenl qui interprète les fonctions glossématiques de solidarité, de sélection et de libre combinaison comme des hypothèses sur les éventualités susceptibles de se produire, et du modèle de Bent Sigurd2 qui a étudié surtout les relations d'ordre. En projetant les deux théories l'une sur l'autre, nous décrirons les groupes consonantiques finals en français parlé et leurs combinaisons avec les vocalismes simples.

1. Finales binaires

0. Spang-Hanssen3 décrit les trois fonctions glossématiques de la manière suivante: soit A et B deux éléments susceptibles de se combiner dans un texte; -|- signifie événement possible, -{- signifie événement exclu, X signifie «qui se combine avec»:


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1: Prohability and Structural Classification in Languagc Description (Copenhague 1959); abréviation: PASC.

2: «Rank Order of Consonants Lstublishcd by Distributional Criteria«, Studia Lingüistica IX (1955), pp. 8-20: « Lnglish Diphthongs from a Structural Point of View», Studia Linguistice X (1956), pp. 67-76; P/ionotactic Structures in Swedish (Lund 1965).

3: PASC § 13, § 25.

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Les fonctions peuvent être représentées graphiquement dans les diagrammes
à deux dimensions que voici :


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1.1.1. Diagramme des finales binaires

Nous appliquons ce modèle glossématique aux finales binaires. Dans le diagramme Fig. 1 sont inscrites les fréquences des combinaisons /-CC/ manifestées par [-CC(o)]4 et observées dans les expressions de mot du type /(C(C(C)))(V)VCC/; /(V)/ est /i/, /y/ ou /u/ manifestés par [j], M> [w];'/V/ est manifesté par [V] ou [V:]; nous n'avons pas tenu compte de /œbl/ «humble» parce que /&/ n'est pas un élément généralisable et n'appartient pas, par conséquent, au système normal des voyelles française ss. Les expressions de mot sont tirées de Margrethe Winther: Fransk-dansk ordbog, Copenhague 1961. La première consonne d'un groupe est placée dans la marge verticale, la deuxième dans la marge horizontale. (+) dans la case /-jt/ indique que nous n'avons trouvé cette combinaison qu'en décomposant une finale ternaire dans /fijtr/ «fichtre».

A l'aide d'une technique de réarrangement6, nous avons réuni tous les éléments qui - à part quelques exceptions - ne se combinent pas entre eux de sorte qu'est formé un grand champ - quasi - vide. Un tel champ est dû à un écart significatif d'une distribution aléatoire7. Ayant exclu les quelques combinaisons qui figurent dans le champ quasi vide, nous divisons les consonnes finales en trois catégories: (1) une classe I ou sélectionnante qui contient tous les éléments ne se combinant pas entre



4: Le paradigme /-CC/ serait tout autre si l'on tient compte des phonèmes latents et note /a/ après tout consonantisme prononcé comme le fait Togeby dans Structure immanente de la langue française, 2e édition (Paris 1965), pp. 36-59; cf. notre article «Les combinaisons du vocalisme simple avec la finale simple en français parlé», Acta Linguistica Hafniensia IX (1965), pp. 81-91.

5: Op. cit. pp. 78-80.

6: Détaillée dans PASC § 19.

7: Pour des calculs cf. PASC §§ 20-22.

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eux mais avec un ou plusieurs membres de la classe 11, à savoir: /ji z v b 3 g f J k p d m n/: (2) une classe II ou sélectionnée dont quelques membres se combinent entre eux et tous avec un ou plusieurs éléments sélectionnants,à savoir: /t sir/; (3) une classe comprenant la consonne qui ne contracte pas la fonction, c'est-à-dire qui n'est observée dans aucun groupe binaire, à savoir: /j/. Spang-Hanssenß définit les classes I et II ainsi:

«I. A class of elemenf(s) in a certain stage of the analysis (e.g.. phonèmes) no mutual combinat ion of which can form by itself a précèdent unit, but ecuh élément forming such unit {s) in combination with element(s) belonging ta Class II (below) is a selecting class - in casu the class of consonants.

By a précèdent unit is understood a unit of the class defined in the
preceding stage of the analysis; e. g. for phonèmes as éléments a
syllable or a word expression is a précèdent unit.

11. A class of element(s) mutual combination(s) of which form précèdent unit(s), and each élément forming such unit{s) in combination )\ith element(s) belonging to Class I above is a selected class - in casu the class of vowels. »


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Fig. 1



8: PASC p. 37.

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1.1.2. Unités analytiques et synthétiques

Dans l'extrait cité de PASC Yunité précédente en question est analytique, c'est-à-dire définie par rapport à des entités supérieures dans la description qui comporte une série de divisions en unités de plus en plus petites. Ainsi la syllabe est définie par rapport àla phrase9 ou àY expression de textel ® : «Syllables are the class of minimum parts of expression each of which is potentially a text expression, and combinations of which form the observed repertory of text expressions». La syllabe est définie synthétiquement par les éléments qui la constituent: voyelle(s) (et consonne(s)). Dans Fig. 1 l'unité ne peut être définie que de manière synthétique: groupe final composé de deux consonnesll.

11 faut bien préciser que l'unité synthétique est la finale binaire et non la finale tout court. Pour Hjelmslevl2, il ya combinaison -ce que Spang- Hanssen appelle libre combinaison - entre/et / parce que ces consonnes peuvent constituer un groupe (cf. fleur) et que chacune apparaît seule à l'initiale (cf. faire et leur ; l'unité est ici l'initiale tout court). En appliquant le modèle spang-hanssennien selon lequel l'unité est l'initiale binaire, on aboutit à un tout autre résultat : /f / - avec /v g b k p d t/ et peut-être /m/ - appartient à la classe sélectionnante, et /l/ - avec /s r/ et peut-être /J n/ - àla classe sélectionnée des consonnes initialesl3. La solution de Spang- Hanssen est à préférer parce que la sélection rend compte de réelles différences combinatoires ignorées par la (libre) combinaisonl4.

1.1.3. Exclusion et généralisation

La sélection de Fig. 1 exclut toute combinaison entre les consonnes
/jizvb^gfjkpdmn/, donc aussi /-zd -d^ -gm -km -mn -nj -nd/



9: Togeby, op. cit. pp. 33-34

10: PASC p. 12

11: Cf. aussi Povl Skârup: «Om analysen af det faeroske lydsystem », Acta Philologica Scandinavica XXV (1964), pp. 70-72.

12: «Essai d'une théorie des morphèmes», réimprimé en Essais linguistiques TCLC XII (Copenhague 1959), p. 154.

13: Bjarne Westring Christensen: En typologisk beskrivelse af fonem- og grafemforbindelser i monovokaliske ordudtryk pà moderne fransk (Copenhague 1964, dactylographié, non publié), pp. 63-78.

14: Cf. PASC § 77 où Spang-Hanssen relève les différences entre les diagrammes des expressions de mot et des syllabes d'un côté et ceux des groupes consonantiques et vocaliques de l'autre - sans faire intervenir de manière explicite les notions d'analytique et de synthétique.

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observés dans 7 expressions de mot qui toutes sont d'origine étrangère:

On peut réintégrer [drszd] comme /drssd/ en interprétant [z] comme une variante totalement assimilée de /s/, consonne forte et sourde, devant la consonne douce et sonore /d/. Cette interprétation est possible puisque aucun exemple de [-sd] commutable avec [-zd] n'est constaté. 11 est donc adéquat de noter /drssd/ en accord avec la sélection quand la case /-sd/ est librels. De même nous interpréterions [-izm -azm] - non relevés par Margrethe Winther - «isthme» ou «-isme», «asthme» ou «-asme» comme variantes - avec [-ism -asm] - de /-ism -asm/16.

Quant à «punch» et «stand», Blinkenberg & Hoybyel7, FouchélB, Warnantl9 transcrivent tous [pœntj] et [st&:d], c'est-à-dire que la sélection est respectée puisque /t/ appartient à la classe sélectionnée; de plus, tant /-nt/ que /-tj/ sont enregistrés: /sprint katj matj spitj/ «sprint catch match speech».

En excluant /brid3 dogm drakm imn/ et éventuellement /pœnj stand/, on ne prétend pas que ces expressions de mot ne sont pas «françaises» mais seulement qu'elles ne se conforment pas au système normal que constituent les finales binaires du français parlé, système normal qui est délimité par la sélection. D'ailleurs, ces expressions de mot sont étrangères non seulement d'un point de vue interne, c'est-à-dire qui relève de la seule forme de l'expression, mais d'un point de vue externe, en l'espèce étymologiquel*o. Le système général - constitué par le système normal et



15: Cf. PASCpp. 163 s.

16: Cf. André Martinet: La prononciation du français contemporain (Paris 1945), p. 162.

17: Fransk-dansk ordbog (Copenhague 1960-66).

18: Traité de prononciation française (Paris 1959), p. 218.

19: Dictionnaire de la prononciation française (Gembloux 1962).

20: Herbert Pilch: «Zentrale und periphere Lautsysteme», Proceedings of the Fifth International Congress of Phonetic Sciences (Baie - New York 1965), pp. 467-73 ; cf. Acta Linguistica Hafniensia IX, pp. 79-80. - Les étymologies sont tirées de Bloch et Wartburg: Dictionnaire étymologique de la langue française (Paris 1960).

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les combinaisons périphériques - est toujours susceptible de s'élargir par l'addition de nouvelles entités périphériques qu'on ne peut exclure: on n'a qu'à ouvrir le Traité de Fouché ou le Petit Larousse pour rencontrer des combinaisons étrangères telles que /-pf -jj"/ dans /obsrkapf rajj"/ «Oberkampf Reich».

En établissant la sélection on ne prétend nullement qu'il est possible de généraliser à partir des combinaisons observées pour en extrapoler d'autres non enregistrées dans les champs 1.11, 11.1, 11.11. Nous avons constaté, par exemple, trop peu de combinaisons dans les colonnes /t s/ du champ LU, dans les lignes /t s/ du champ 11.1, dans la ligne /s/ et les colonnes /l r/ du champ 11.11, pour oser généraliser. D'autre part, on ne peut exclure, par exemple, /-rz/ non enregistré dans les expressions monovocaliques de mot et qu'on ne rencontrera que dans une expression contenant deux vocalismes: /kaUrz/ «quatorze». L'entrée de ¡z¡ dans le diagramme repose sur une seule combinaison trouvée dans une seule expression de mot: /-lz/ dans /alz/ «ailes» (argot pour «elles»). Nous n'avons relevé ce mot que dans le dictionnaire de Margrethe Winter et dans Bauche: Le langage populaire, Paris 1929. Nous avons admis /-lz/ parce que cette combinaison - avec /-rz/ - se conforme à la sélection. - Un système normal se délimite donc avec une certaine partie d'arbitraire, mais il y a moins de mal si l'on explicite les entités exclues et les raisons de leur exclusion.

1.2. Le modèle de Sigurd

0. Après l'application de la sélection restent beaucoup de combinaisons non enregistrées que l'on ne peut ni exclure par la sélection ni postuler comme possibles par une généralisation motivée. La sélection ne fournit pas une classification très détaillée2l, surtout parce qu'elle est indifférente à l'ordre des éléments. En s'appuyant sur un article du mathématicien Lars Gârding22, Sigurd23 a démontré l'importance de l'ordre pour classifier des éléments.



21 : Cf. le compte rendu de PASC par Alvar Ellegârd en Language XXXVIII (1962), p. 399: «Glossematic catégories of sélection and solidarity, though certainly not inapplicable to a classification of phonèmes, are not capable of providing one that is articulated enough to be satisfactory. »

22: «Relations and Order», Studia Linguistica IX (1955), pp. 21-34.

23: Op. cit., cf. aussi Hans Karigren: «Positional Models and Empty Positions», Structure and Quanta Intcrdisciplinary Studies for the Scandinavian Summer University XII (Copenhague 1963), pp. 23-57, et « Distributionale Rangordnung der Phonème - zur schwedischen Silbenstruktur», S MIL microfiche card 2(1962). Em. Vasiliu a appliqué le modèle au roumain : « Une classification des consonnes roumaines d'après le critère de la distribution », Mélanges linguistiques (Bucarest 1957), pp. 97-112. Des techniques plus mathématisées sont proposées par S. Marcus et Em. Vasiliu: «Mathématiques et phonologie, La théorie des graphes et le consonantisme de la langue roumaine», Revue de mathématiques pures et appliquées V (Bucarest 1960), pp. 319-40, 681-703, et par Benny Brodda et Hans Karlgren: «Relative Positions of Eléments in Linguistic Strings», SMIL 111 (1964), pp. 49-101.

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La classification repose sur des paires du type x P y où P symbolise «précède» ou «est plus proche du vocalisme que». Si Ton ne rencontre que des paires du type x P y, la relation est dite antisymétrique; elle est symétrique si à chaque paire x P y correspond une paire y P x. Si chaque chaîne xPyPz entraîne la paire x Pz, la relation est dite transitive (symbolisée par F). Si le premier élément d'une chaîne et le dernier sont identiques: x P y P z P .y, la chaîne est dite fermée.

Prenons un exemple: Les groupes vocaliques du français parlé /iV yV uV/ manifestés par [jV qV wV] peuvent être décrits par la relation suivante:la réunion d'une chaîne antisymétrique transitive i F u P y F o j t\ a a e e f: è j o œ et d'une chaîne fermée transitive i F u F y F ¡'.La. chaîne antisymétrique exclut surtout les combinaisons entre les éléments derrière le dernier F, combinaisons qu'exclut aussi la sélection; de plus, les voyelles sélectionnantes ne peuvent figurer devant les voyelles sélectionnées.La chaîne fermée exclut les combinaisons /yy yu uu/. La réunion des deux relations engendre24 les combinaisons suivantes: /iu ui iy yi ii uy io io ia ia ià ie is is: is io 'w iœ uo voua ua ua ue ue ue: us uo 110 uœ yo yo ya ya ya ye ys ye: ys yo yo yœ/; toutes ces combinaisons sont enregistrées dans notre corpus sauf/ii uo uo ya/ qui sont postulés comme



23: Op. cit., cf. aussi Hans Karigren: «Positional Models and Empty Positions», Structure and Quanta Intcrdisciplinary Studies for the Scandinavian Summer University XII (Copenhague 1963), pp. 23-57, et « Distributionale Rangordnung der Phonème - zur schwedischen Silbenstruktur», S MIL microfiche card 2(1962). Em. Vasiliu a appliqué le modèle au roumain : « Une classification des consonnes roumaines d'après le critère de la distribution », Mélanges linguistiques (Bucarest 1957), pp. 97-112. Des techniques plus mathématisées sont proposées par S. Marcus et Em. Vasiliu: «Mathématiques et phonologie, La théorie des graphes et le consonantisme de la langue roumaine», Revue de mathématiques pures et appliquées V (Bucarest 1960), pp. 319-40, 681-703, et par Benny Brodda et Hans Karlgren: «Relative Positions of Eléments in Linguistic Strings», SMIL 111 (1964), pp. 49-101.

24: Une acceptation linguistique mais moins technique de ce mot se trouve déjà chez Du Bellay à la suite d'une métaphore développée: «Ainsi puis-je dire de nostre langue, qui commence encore à fleurir sans fructifier, ou plustost, comme une plante et vergette, na point encore fleuri, tant se faut qu'elle ait apporté tout le fruit qu'elle pourroit bien produire. Cela certainement non pour le défaut de la nature d'elle, aussi apte à engendrer que les autres... », La Deffence et Illustration de ¡a Langue Francoyse, Livre I, Chapitre 111 (édition Henri Chamard, Paris 1948, p. 24; cf. Sperone Speroni, Dialogo delle Lingue: «. .certo non per difetto della natura de lei, essendo cosi atta a generar, come le altre» (Pierre Villey: Les sources italiennes de la « Deffence », Paris 1908, p. 45).

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possibles par une généralisation motivée2s. - Pour les finales binaires la
relation se complique.

1.2.1. Diagramme des finales binaires

Dans Fig. 2 nous avons arrangé les consonnes finales d'après leur adhérence vocalique de sorte que la consonne la plus adhérente au vocalisme est placée en haut et à gauche. La première consonne d'un groupe - celle qui est voisine du vocalisme - est placée dans la marge verticale, la deuxième - éloignée du vocalisme - dans la marge horizontale. La sélection exclut les combinaisons dans le grand champ vide au milieu. Evidemment on ne peut établir aucune relation antisymétrique d'adhérence vocalique vu le grand nombre de paires symétriques telles que r P k et k P r, l Pb et b P l, s P k et k P s, cf. /ark nakr galb tabi mask aks/ «arc nacre galbe table masque axe». Une propriété vaut pour toute la relation : on ne trouve aucune paire réflexive, c'est-à-dire aucune paire dans la diagonale; il ne peut être dû au hasard que ne soit observée aucune expression de mot du type /-(V)VCiCi/.

Bien que comprenant beaucoup de paires symétriques la relation d'adhérence vocalique peut servir à classer les consonnes si on la décompose en deux chaînes antisymétriques comme nous l'avons fait dans Fig. 326. La moitié droite du diagramme Fig. 2 est représentée du niveau 1 au niveau 5 marqué par le trait horizontal. La moitié gauche est représentée du niveau 5 au niveau 7 Une flèche signifie «précède/est plus adhérente au vocalisme que». La consonne la plus adhérente de chaque chaîne est placée au sommet: /r/ au niveau 1, /s/ au niveau 5.

La représentation de chaque moitié du diagramme implique les propriétés suivantes: (1) Les éléments d'un même niveau ne se combinent pas entre eux, (2) mais avec un ou plusieurs éléments appartenant à un ou plusieurs autres niveaux de sorte qu'une consonne ne peut précéder qu'une consonne d'un niveau inférieur. (3) Les flèches notent des combinaisons réalisées; la flèche en pointillé indique la paire tirée de la finale ternaire /-Jtr/.

(4) La place de quelques éléments est fixée, par exemple celle de /f p k/



25: On trouve cependant /ii/, par exemple dans [jiddij] «yiddish» (Warnant, op. cit.).

26: Pour d'autres «trucs» du même genre, cf. Brodda et Karlgren, op. cit. § q: «Homonymous» Eléments.

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Fig. 2


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i \u.

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au niveau 3 entre /l/ et /t/, tandis que la position d'autres éléments est variable: /n/ peut être mis au niveau 2 ou au niveau 3. Pour décider de la place de ces phonèmes on pourrait recourir à un critère arbitraire mais univoque qui permettrait des comparaisons avec d'autres systèmes: puisqu'il s'agit d'une relation d'adhérence vocalique et que l'on commence par la consonne la plus proche du vocalisme il serait normal de placer les éléments à un niveau aussi haut que possible. Une deuxième solution aussi arbitraire et aussi univoque consisterait à mettre les éléments à un niveau aussi bas que possible. On aboutirait à une troisième solution pas toujours univoque mais moins arbitraire, en projetant la sélection sur la relation d'adhérence vocalique27: Si la place de quelques éléments n'est pas fixée, les consonnes sélectionnantes seraient mises au niveau le plus proche contenant d'autres sélectionnantes, les consonnes sélectionnées au niveau le plus proche comportant d'autres sélectionnées. Ce critère suffit à Fig. 3, mais dans d'autres cas il faudrait encore recourir à la première solution ou àla deuxième2B. - Que nous ayons placé, par exemple, /n/ au niveau 3 et non au niveau 2 signifie que ni la sélection ni la relation d'adhérence vocalique n'excluent la combinaison /-In/. Que nous n'ayons pas mis de flèche entre, par exemple, /l/ et /n/ indique que nous ne pouvons postuler /-In/ par une généralisation motivée.

Ces quatre propriétés sont communes aux deux chaînes de tig. 3. Pour juger de la puissance generative des chaînes il faut examiner leur degré de transitivité. Si l'on considère la chaîne du niveau 1 au niveau 5 comme intransitive, elle n'engendre pas 16 combinaisons observées, à savoir: /-rb -rv -rf-rp -rg -rk -rd -rg -rj -rm -rt -rs -lt -ls -ps -ks/. Si l'on tient la même chaîne pour transitive, elle postule 4 combinaisons non enregistrées dans les expressions monovocaliques de mot, à savoir /-rz -ns -fs -Js/. Cependant /-rz/ est constaté dans une expression contenantdeux vocalismes: /katorz/ «quatorze». La chaîne ne postule /-ns/



27: Spang-Hanssen a esquissé de telles projections lors d'un séminaire tenu à l'lnstitut de Linguistique et Phonétique de Copenhague le 6 décembre 1962; dans Phonotactic Structures in Swedish, par exemple pp. 50-53, Sigurd tient compte tant de l'ordre que de l'incompatibilité sans égard à l'ordre, mais au lieu de se contenter d'une grande catégorie sélectionnante il observe plusieurs petites classes contenant des phonèmes incompatibles entre eux et aboutit ainsi à une classification plus détaillée mais plus difficilement comparable et plus susceptible d'être due au hasard.

28: Dans la représentation des initiales binaires du suédois /!/, consonne sélectionnée, peut aussi bien être placé au niveau 1 avec /r j/ qu'au niveau 2 avec /v n/, cf. op. cit. pp. 54 61.

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que sur la base d'une combinaison /-nt/ enregistrée dans une expression de mot empruntée à l'anglais: /sprint/ «sprint», et /-Js/ sur la base d'une combinaison /-Jt/ que nous avons observée en décomposant la finale ternaire /-Jtr/ de l'interjection /fijtr/ «fichtre», /-fs/ est postulé à cause de la combinaison /-ft/ rencontrée dans trois expressions de mot: /lift/ «lift» (emprunté à l'anglais), /aft/ «aphte» (emprunté au grec via le latin), /loft/ «cophte» (du grec via l'arabe)29.

Se proposent plusieurs solutions: (1) Postuler les quatre combinaisons non enregistrées dans les expressions monovocaliques bien qu'une généralisation ne soit pas motivée. Va encore pour /-rz/ bien sûr, peut-être pour /-fs/ de sorte que toutes les quatre cases de la ligne /f/ dans le champ 1.1l seraient couvertes, moins bien pour /-ns/ car une seule case de la ligne /n/ du champ 1.11 est couverte, surtout pas pour/-Js/pour la même raison que /-ns/ et parce qu'une telle combinaison serait difficile à prononcer et à percevoir. (2) Exclure les combinaisons gênantes; solution acceptable peut-être pour /-nt/ et /-Jt/: non seulement parce que chaque combinaison n'est observée que dans une expression de mot, mais parce qu'en les excluant on dégage deux lignes du champ I.lÍ tout à fait de combinaisons - ainsi on pourrait établir la règle que dans les finales binaires, /J n/ - avec /ji z 3/ - ne sont jamais proches du vocalisme; /-ft/, par contre, est enregistré dans trois expressions, et deux autres cases de la ligne /f/ du champ 1.11 sont couvertes. (3) Mettre les combinaisons surengendrées dans un filtre en suivant l'exemple de Sigurd3o. -Un compromis acceptable consisterait à garder /-ft/ et à engendrer /-fs/ mais à exclure /-nt/ et /-Jt/.

Considérons la chaîne du niveau 5 au niveau 7. Si on la tient pour intransitive, elle engendre toutes les combinaisons observées sauf une: /-sm/. Si l'on considère la chaîne comme transitive, elle engendre trois combinaisons non observées: /-si-sr-sj/. On pourrait rendre la chaîne tout à fait intransitive en excluant deux combinaisons constatées dans quatre expressions de mot: /-tj/ dans /katj matj spitj/ «catch match speech » (empruntés à l'anglais), et /-tm/ dans /ritm/ « rythme » (emprunté au grec). Si ces combinaisons sont exclues, /m/ sera placé au niveau 6.

La chaîne allant du niveau 1 au niveau 5 est donc - quasi - transitive,
et celle du niveau 5 au niveau 7 est - quasi - intransitive. Autre trait
caractéristique de cette chaîne-ci, une consonne sélectionnée ¡il est



29: Grand Larousse Encyclopédique 111 (Paris 1960).

30: Phonotactic Structures in Swedish, par exemple p. 77.

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fixée au niveau 6 dont tous les autres membres appartiennent à la classe sélectionnante. Cette chaîne est d'ailleurs presque l'inversion de la relation antisymétrique d'adhérence vocalique que l'on constate pour les initiales binaires3l.

1.2.2. Classifications

Fig. 3 nous permet plusieurs classifications. (1) On peut se tenir aux
seuls niveaux sans égard aux flèches. Les consonnes sélectionnées sont
divisées en 4 classes :


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Les consonnes sélectionnantes sont divisées en 3 classes :


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Si l'on exclut les combinaisons mentionnées en § 1.2.1., les sélectionnantes
seront divisées en 2 classes, et /J/ sera placé au niveau 3 avec ¡p. n z 3/,
et /m/ au niveau 3 et 6.

(2) On peut faire intervenir la place variable de quelques éléments.
On arrive ainsi à classer les consonnes sélectionnantes en 9 catégories :


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Si l'on exclut les combinaisons nommées en § 1.2.1., la classification
n'aboutira qu'à 7 classes, parce que /n/ sera placé dans la même catégorie



31 : En typologiske beskrivelse . . „ pp. 78-84.

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que /ji/: entre niveaux 2 et 5, /J/ dans la même catégorie que /z 3/: entre
niveau 3 et 5, tandis que /m/ restera seul dans sa classe: entre niveau 3
et 4. entre niveau 6 et 7.

Quoique moins bien fondée qu'une relation asymétrique où toute une moitié de diagramme est vide, notre classification par niveaux est moins exposée au hasard que le classement où interviennent aussi les places variables, parce que celle-là permet plus d'exclusions et d'additions de combinaisons. Le deuxième classement plus précaire changerait à toute addition ou exclusion sauf en ce qui concerne les combinaisons entre niveau 6 et 7.

1.3. Classification par éléments

Reste à faire la classification la plus spécifique et la plus sujette au hasard, celle qui est fondée sur les seules combinaisons enregistrées et est définie non par une relation générale mais par les éléments qui entrent dans les combinaisons. Pour le paradigme /-VC/ une telle classification serait peu heureuse, parce qu'on peut là distinguer entre généralisation impossible et généralisation motivée; en basant un classement sur les seules combinaisons réalisées on mettrait sur un pied d'égalité /-üb/ non enregistré d'origine aléatoire et /-0J -oj -0r -or/ non enregistrés d'origine non aléatoire32. Nous n'avons pas détaillé les conditions de généralisation pour le paradigme ¡-CCI, mais une généralisation serait probablement immotivée ou impossible. Le classement qui suit est donné sous toutes réserves.

Les consonnes sélectionnées sont toujours divisées en quatre classes:

(a) après les sélectionnantes /g b fk p v d/ et la sélectionnée /t/,
devant les sélectionnantes /ji n b v f p 3 k d g J m/ et les sélectionnées
/t s 1/: /r/

(b) après les sélectionnantes /g bfkp/etla sélectionnée /r/, devant
les sélectionnantes /b v f z p 3 k d g J m/ et les sélectionnées
A s/: /!/

(c) après les sélectionnantes /n fpk (J')/ et les sélectionnées /s 1 r/,
devant les sélectionnantes /J m/ et les sélectionnées /s r/: /t/

(d) après les sélectionnantes /k p m/ et les sélectionnées /t 1 r/. devant
les sélectionnantes ,k p d m, et la sélectionnée /t/: /s/



32: Acia Linguistica Hafniensia IX, pp. 92-97.

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o O <' C/l n> re _ _^


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Si on exclut les combinaisons nommées en § 1.2.1., les consonnes sélectionnantes seront divisées en 9 classes, parce que /n/ appartiendra à la même classe que /ji/: après /r/, /J/ à la même classe que /sj: après /ri/, /m/ aura toujours sa catégorie à lui: après /ris/, devant /s/. Si l'on tient compte de /katorz/, fzf appartiendra à la même catégorie que II 3/; on aura donc 8 classes.

Cette classification - qu'elle soit appuyée par une généralisation ou non - a l'inconvénient de ne pouvoir servir à une comparaison typologique combinatoire, qui ne peut prendre en considération que des catégories, non des éléments33. Car une comparaison d'éléments implique que Ton identifie des éléments qui n'appartiennent pas à un même système; de telles identifications ne sont pas possibles sans recours à des considérations morphophonématiques ou à la substance sous forme de traits distinctifs ou de propriétés phonétiques «absolues»34. Dans la comparaison typologique combinatoire on ne peut employer que des critères généraux tels que sélection, relation d'ordre, nombre d'éléments. Les conditions combinatoires spécifiques, par exemple la généralisation impossible de quelques vocalismes simples devant quelques finales simples, peuvent difficilement être comparées d'un système à un autre. Ce n'est qu'en se servant des relations générales qu'on arrive à résoudre les problèmes de «mesurer» la parenté typologique3s et d'identifier des



33: Hjelmslev: Sproget (Copenhague 1963), p. 32, p. 92.

34 : G. G. Bès : « Certains aspects du rapport de la phonologie avec la dialectologie », Phonetica XIII (1965), pp. 22-26.

35: Cf. Spang-Hanssen: «Glossematics », Trends in Eurupeun and American Linguistics 1930 60 (Utrecht 1961), pp. 150 s.

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catégories appartenant à deux ou plusieurs systèmes différents: Une catégorie d'un système est identique à une catégorie d'un autre système, si les deux catégories sont définies de la même manière, par exemple par la même fonction glossématique ou la même relation d'ordre, et contiennent le même nombre d'éléments, que toutes les autres catégories supérieures ou inférieures soient identiques ou non. Par exemple, la classe sélectionnante des consonnes initiales du français parlé (système normal étroit) est identique à la classe sélectionnante des consonnes initiales du français écrit (système normal étroit), de même que les catégories sélectionnées sont identiques:

classes sélectionnantes :


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classes sélectionnées:


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bien que les classes ne contractant pas la sélection ne soient pas identiques : 5 éléments en français parlé : /J z 3 m n/, et 7 en français écrit : §ch h j m n qu z§, c'est-à-dire bien que les classes des consonnes initiales ne soient pas identiques.

Ceci dit, il faut évidemment, en ce qui concerne la description de chaque langue, continuer la classification combinatoire jusqu'au bout quoique les critères généraux fassent défaut36. La description pour des fins typologiques, celle visant à une classification aussi détaillée que possible et celle qui cherche des formules génératives peuvent faire un bout de chemin ensemble, comme l'ont montré les paragraphes précédents.

2. Finales ternaires et quaternaires

2.1 Finales ternaires

Nous avons enregistré 14(13) finales ternaires dans 36 (35) expressions de mot suivant que l'on tient compte de /pœntj"/ «punch » ou non. Toutes les combinaisons se conforment à la sélection constatée pour les finales binaires et qui peut donc être généralisée aux ternaires de sorte que les types /1.1.11/, /11.1.1/, /1.1.1/ sont exclus. Des cinq types possibles on n'a pas relevé /11.11.1/, par exemple /-tsk/, et un seul exemple de /1.11.1/: /pœntj/; les autres types observés sont /LU.II/, /11.1.11/, /11.11.11/.

Toutes les finales ternaires se conforment à la relation d'adhérence
vocalique constatée pour les finales binaires. Par exemple, le type im-



36: Togeby, op. cit. pp. 16s.

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possible /-CrC/ n'est pas trouvé; si la première consonne est sélectionnante
(du niveau 3), la deuxième ne peut être que /t/ ou /s/. Tous les types
possibles ne sont pas rencontrés, par exemple ni /-rit/ ni /-rps/.

Les combinaisons suivantes sont enregistrées:

I.II.I: 3.4/6.7: /-ntj/: /pœntj"/ «punch»

I.II.TI: 3.4/6.7: /-Jtr/: /fiJtr/ «fichtre»

/-ptr/: /ssptr/ «sceptre»

/-ktr/ : /plektr spektr/ « plectre spectre »

3.5.6: /-kst/: /sikst mikst tekst sekst/ «sixte mixte texte
sexte »

11.1.11: 1.3/6.7 /-rpr/ : /purpr/ « pourpre »

/-rdr/: /perdr surdr tordr mordr/ «perdre sourdre
tordre mordre »

/-rbr/: /arbr marbr/ «arbre marbre»

/-rkl/: /ssrkl sarkl/ «cercle sarcle»

5.6.7: /-ski/: /myskl/«muscle»

II.II.II: 1.4.5: /-rts/: /kuarts/«quartz»

1.4/6.7: /-rtr/: /tertr tartr dartr Jartr martr moertr/ «tertre
tartre dartre chartre martre meurtre»

2.4/6.7 : /-ltr/ : /filtr/ « filtre/philtre »

5.6.7: /-str/: /tistr bistr sistr astr lystr môstr kyistr piastr
frystr/ «tistre bistre sistre astre lustre monstre
cuistre piastre frustre»

A part /-Jtr/, toutes les combinaisons peuvent être décomposées en deux
finales binaires constatées: par exemple /-ptr/ en /-pt/: «apte», et en
/-tr/: «autre».

On ne pourra guère établir une relation d'adhérence vocalique spécifique pour les finales ternaires parce que l'on n'a relevé que 36 (35) expressions de mot; d'ailleurs aucune relation simple ne se laisse entrevoir. Cependant on peut formuler quelques restrictions systématiques par rapport à Fig. 3 : à part /-ntj/, n'entrent dans les finales ternaires que des éléments rencontrés dans les paires symétriques de la relation d'adhérence vocalique; c'est-à-dire que nous ne trouvons pas les consonnes suivantes: /jî n z 3/ et éventuellement /J/ si nous excluons /-Jtr -tj/.

On peut classer les consonnes d'après la position absolue par rapport
au vocalisme. Soit appelée position 1 celle qui est la plus proche du
vocalisme. Les consonnes sélectionnées sont divisées en trois classes:

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Les consonnes sélectionnantes sont divisées en deux ou quatre classes
suivant que l'on exclut /pœntj fijtr/ ou non:


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Nous n'avons pas recouru aux positions absolues pour décrire les
finales binaires puisqu'elles peuvent se déduire des positions relatives
exprimées par Fig. 3.

On pourrait évidemment décrire plus avant les finales ternaires en
recourant à la classification par éléments - encore plus sujette au hasard
que ne l'est celle des finales binaires.

2.2. Finales quaternaires

Nous n'avons constaté qu'une finale quaternaire observée dans une expression de mot: ¡dekstr/ «dextre», donc du type /1.11.11.11/ ou /3.5.6.7/; elle peut être décomposée dans /k/ + /str/, /ks/ + /tr/, /kst/ + /r/, combinaisons qui toutes sont enregistrées, cf. «sec astre sexe lettre sexte ère». En excluant cette seule expression de mot on pourra établir la règle qu'on ne peut avoir des finales plus complexes que ternaires.

3. Combinaisons du vocalisme simple avec la finale binaire

0. Nous examinerons dans quelle mesure la description faite des finales binaires et ternaires servira à décrire les combinaisons que contractent ces finales avec les vocalismes simples et si les modèles utilisés pourront s'appliquer encore une fois.

3.1. Le modèle de Spang-Hanssen

Dans Fig. 4 nous avons inscrit les fréquences des combinaisons /-VCC/ relevées dans les expressions de mot du type /(C(C(C)))VCC/. Nous n'avons inscrit que les finales observées dans au moins 15 expressions de mot pour trouver plus facilement des différences combinatoires systématiques. Si l'on constate de telles différences, on peut élargir le corpus pour vérifier l'hypothèse pour les finales moins fréquentes.

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Dans le diagramme on constate une nette différence combinatoire entre les entités des marges sous forme d'un grand champ vide formé de ¡0 o e: a s 5 a/ X /-rt -rd -rs -rj -rm -st -sk/. Nous formulons l'hypothèse que toutes les combinaisons ¡0 o e: a s 5 a/ X /-Cr -sC/ sont exclues. L'hypothèse tient pour les finales moins fréquentes comme le montre Fig. 5. De plus, on voit de ce diagramme que ¡0 o 8 : a ë 5 5/ n'apparaissent pas non plus devant /-1C -Ct -tC/. Si l'on généralise le concept de sélection jusqu'à comprendre les diagrammes hétéro-marginaux où les entités marginales sont d'une part éléments, en l'espèce voyelles, et d'autre part groupes d'éléments, en l'espèce finales binaires37, on peut formuler la différence combinatoire ainsi : (1) les voyelles ¡0 o 8 : a ë 5 a/' sélectionnent les finales binaires /-ps -ks -ms -pi -kl -bl -gl -fl -pr -kr -br -dr -gr -fr -vr -tr/ soit les types /-Is -II -Ir -tr/; (2) les finales binaires /-rp -rk -rb -rd -rg -rf -r{ -rv -r¿ -rm -rn -rn -rt -rs -ri -Ip -lk -lb -ld -lg -If -1J -lv -lz -\¿ -lm -lt -ls -pt -kt -ft -nt -tm -tj -ts -sp -sk -sd -sm -st/ soit les types /-ri -rt -rs -ri -II -lt -ls -lt -ti -ts -si -st/ sélectionnent les voyelles /œ o 8 y u i a/. - Nous avons négligé le principe du plus grand champ vide que possible pour formuler plus simplement les conditions combinatoires en classant /-ms/ comme une finale sélectionnée avec les autres /-Is/ (/-ps -ks/) bien que nous n'ayons constaté aucune combinaison /-ms/ avec une voyelle sélectionnante. On verra si une autre délimitation est possible. -A l'intérieur des champs couverts la distribution n'est probablement pas assez serrée pour que l'on puisse généraliser.

3.2. Le modèle de Sigurd

Les différences combinatoires exprimées par la sélection ne peuvent se déduire des combinaisons du vocalisme simple avec la finale simple3B: (1) Si une voyelle donnée n'apparaît pas devant une finale simple donnée /-Ci/, il n'est pas exclu qu'elle apparaisse devant les finales binaires du type /-CiCx/; nous n'en avons qu'un exemple - un peu douteux: /s/ ne figure pas devant /-r/ - pourvu que [-s : r] manifeste /-s : r/ - mais souvent devant /-rC/. (2) Si une voyelle donnée apparaît devant une finale simple /-Ci/, elle ne figure pas nécessairement devant /-QCx/; ainsi /s: a s 5 a/ se combinent avec /-r/ mais non avec /-rC/.

/-VCC/ constitue donc bien un paradigme avec ses règles propres dont



37: Cf. PASC §§ 30-32.

38: Acta Linguistica Hafnicnsia IX, pp. 9?-97.

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Fig. 4


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Fii

les analogies sont à rechercher moins dans le paradigme /-VC/ que
dans /-CC/: Grosso modo, les voyelles ¡a o s: a s 5 àf sélectionnent les
finales binaires décrites par la chaîne (quasi) intransitive allant du niveau

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5 au niveau 7, tandis que les finales binaires décrites par la chaîne (quasi) transitive allant du niveau 1 au niveau 5 sélectionnent les voyelles /œ o s yui a/. Grosso modo, car d'une part nous avons enregistré 3 expressions de mot où une voyelle sélectionnante se combine avec une finale binaire au-dessus du niveau 5, à savoir /lsks sfëks klôtps/ «lynx» (emprunté au grec via le latin), » sphinx » (emprunté au grec via le latin), «clampse» (mot argotique); d'autre part nous n'avons constaté aucune expression du type voyelle sélectionnante X /-sC/ parmi les 55 expressions /-VsC/, ni du type voyelle sélectionnante X /-il/.

4. Combinaisons du vocalisme simple avec la finale ternaire

Nous avons trouvé 8 vocalismes simples devant les finales ternaires
dans 33 (32) expressions de mot suivant que l'on tient compte de /pœntj/
ou non :


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A part /5/ dans /mostr/ «monstre», toutes les voyelles appartiennent à la classe sélectionnée, c'est-à-dire qu'une seule combinaison ne se conforme pas à la sélection établie pour les vocalismes simples X finales binaires, /-st/ étant une finale sélectionnante. Plusieurs solutions se proposent: (1) Considérer le paradigme /-VCCC/ comme autonome - ce qui serait peu avantageux puisque nous n'avons pas tenu /-CCC/ pour un paradigme indépendant de /-CC/; (2) exclure /mostr/ (emprunté au latin) ; (3) faire entrer /-st/ parmi les groupes sélectionnés de sorte que nous approchons de la formule la plus simple: /00 e: a s 5 &/ sélectionnent les groupes binaires engendrés par la chaîne intransitive - sous condition d'exclure /lëks sfsks klâps katj matj spitj/ et d'introduire aussi /-sp -sk -sd -sm/ dans la classe sélectionnée. - Un compromis acceptable consisterait à exclure /lsks sfsks . ../, à faire passer /-st/, mais non /-sp -sk -sd -sm/, dans la catégorie sélectionnée.

5. Conclusions

Si les deux modèles utilisés n'apportent pas la délimitation univoque d'un corpus, même d'un système normal, ils nous permettent de formuler pourquoi et à quel niveau de la description les entités périphériques sont exclues, d'expliciter dans quelle mesure elles sont étrangères au système normal. Au cours de la description nous avons exclu au maximum 18 expressions de mot sur 621, soit 2,90%: 1 à cause de /œ/, voyelle non généralisable: /œbl/, 6 à cause de la sélection entre consonnes finales: /brid;s dogm drakm imn pœnj stand/, 7 pour rendre les chaînes d'adhérence vocalique transitive respectivement intransitive: /sprint fijtr ritm katj matj spitj pœntj/, 1 à cause de la finale quaternaire: /dekstr/, 3 pour rendre la sélection entre vocalisme simple et finale binaire plus conforme à la relation d'adhérence vocalique: /lsks sfëks klâps/.

Les deux modèles permettent une classification générale et compartimentéeutile à une comparaison typologique. Ils exposent les propriétés fondamentales mais non tous les détails combinatoires; ce sera le fait d'une classification par éléments et d'une «grammaire generative» - assises sur le classement à critères généraux; le grand problème de la

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généralisation s'imposera, surtout pour les combinaisons des vocalismes avec les finales. Cependant, pour les finales binaires, le modèle de Sigurd arrive à établir une formule generative puissante - grâce au «truc» de décomposer une relation peu claire en deux chaînes à propriétés précises. En outre, cette opération abstraite ramène au concret en rendant compte, dans une large mesure, des différences combinatoires qui divisent les voyelles en deux grandes catégories.

Bjame Westring Christensen

COPENHAGUE